“C’est un mélange de beaucoup d’émotions, de la joie, un peu de stress aussi.” Comme Yuna, une collégienne parisienne de 13 ans, quelque 12 millions d’élèves reprennent lundi le chemin de l’école, avec des interrogations en suspens sur les réformes en cours en attendant un nouveau gouvernement.
“J’ai un peu peur parce que c’est nouveau”, confie Talia, 5 ans, devant le portail de l’école élémentaire Beausoleil à Cesson-Sévigné, près de Rennes, où elle entre en CP.
“Il y a un peu d’appréhension, mais aussi un peu de précipitation pour les parents”, avoue Marc, père d’un élève de CE2, devant l’école Madame Roland à Lille.
Même en sursis, le Premier ministre démissionnaire a respecté la tradition en se rendant dans une école d’Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine) pour présenter une nouvelle campagne nationale contre le harcèlement à l’école. “Le gouvernement gère les affaires courantes, mais le travail est loin d’être à l’arrêt”, a assuré Gabriel Attal.
– “La rentrée se passe bien” –
Pour son premier et potentiellement dernier mandat de ministre de l’Education, Nicole Belloubet a prévu deux déplacements, à Bourg-la-Reine (Hauts-de-Seine) le matin et à Orléans l’après-midi.
“Je pense que la rentrée se passe bien”, a assuré la ministre, interrogée par la presse sur la pénurie d’enseignants, lors de son premier déplacement.
“Tous les services académiques ont fait ce qu’il fallait (…) et donc je pense que nous avons un professeur devant chaque classe”, a-t-elle poursuivi.
Les postes d’enseignants non pourvus, l’une des « urgences structurelles » pour les syndicats, constituent un sujet brûlant de la rentrée scolaire. La crise se poursuit, avec plus de 3 000 postes non pourvus dans les concours d’enseignants publics et privés cette année.
“Je n’exclus pas qu’ici et là il y ait quelques professeurs absents, mais dans l’immense majorité des situations, les professeurs sont là et c’est une bonne chose”, avait déclaré plus tôt Nicole Belloubet sur France Inter.
Si le gouvernement se montre sur le terrain, il y a “beaucoup d’incertitudes” pour les enseignants en raison du contexte politique, explique Catherine Nave-Bekhti, secrétaire générale de la CFDT Education.
“C’est une rentrée qui n’est pas comme les autres, parce qu’il y a une crise politique, mais aussi parce que l’école est à un point de bascule” vers “une école du tri social avec le choc des savoirs, les groupes de niveaux”, estime Sophie Vénétitay, secrétaire générale du Snes-FSU, premier syndicat d’enseignants des collèges et lycées.
La fédération des parents d’élèves de la FCPE a annoncé lundi lors d’un point de presse qu’elle lancerait en septembre un “Tour de France” afin de “donner toujours plus d’écho à la voix des parents d’élèves”.
Les collèges sont particulièrement dans la ligne de mire, avec l’instauration de “groupes de niveaux”, rebaptisés “groupes de besoins”, en français et en mathématiques en 6e et 5e, mesure phare et contestée du “choc des savoirs” de Gabriel Attal lorsqu’il était ministre de l’Education.
Ces groupes, qui devraient également concerner les 4e et 3e années l’an prochain, seront appliqués “avec souplesse et pragmatisme”, a nuancé Nicole Belloubet ces derniers mois.
Pour Jérôme Fournier, secrétaire national du SE-Unsa, « c’est la cacophonie ».
– “manque de visibilité” –
Pour la 3e année, le brevet est une autre question. Gabriel Attal a souhaité rendre son obtention obligatoire pour passer en deuxième année. « Au moment où je vous parle, le brevet n’est pas du tout obligatoire pour entrer au lycée et je pense, mais le prochain gouvernement en décidera, qu’il serait un peu tard aujourd’hui pour changer cette situation », a précisé Nicole Belloubet.
“On attend des informations” à ce sujet, confie Nadia, 52 ans, qui a accompagné sa fille de 3e à la rentrée devant le collège Jean-François Oeben, dans le 12e arrondissement de Paris. Elle regrette le “manque de visibilité” sur les modalités d’évaluation du brevet, qui pourraient aussi être modifiées.
Pour certains élèves, cette rentrée sera aussi marquée par des expérimentations, comme celle de la classe « prépa-seconde », pour ceux qui ont échoué au brevet.
Ou celle de la « pause numérique », prévue dans quelque 180 collèges, en vue d’une éventuelle généralisation en janvier 2025. Si les collégiens ont déjà interdiction d’utiliser leur téléphone dans l’établissement depuis 2018, ils devront cette fois le laisser à la porte.
Cette mesure suit les recommandations de la commission “écrans”, voulue par Emmanuel Macron, mais suscite le scepticisme des syndicats.
Dans un peu moins d’une centaine d’établissements, essentiellement scolaires, c’est la “tenue unique” qui sera testée – certains l’ont déjà adoptée avant l’été. Un sujet politiquement sensible comme l’illustre une polémique à Limoges sur le coût des vêtements achetés par la municipalité.
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