Lorsque les touristes qui longent la Loire Ă vĂ©lo s’arrĂŞtent au domaine des Pierrettes, entre Chaumont-sur-Loire (Loir-et-Cher) et Amboise (Indre-et-Loire), ils n’ont aucune idĂ©e de la tragĂ©die viticole en cours. Après tout, les vignes sont feuillĂ©es. Mais si l’on s’approche, on dĂ©couvre qu’elles n’ont pas de grappes, juste quelques grains Ă©pars et flĂ©tris. Le feuillage est mouchetĂ© de taches grises virant au brun. Le mildiou, une maladie provoquĂ©e par un champignon pathogène, a tout ravagĂ©.
SituĂ© derrière une forĂŞt giboyeuse, Ă 6 kilomètres Ă vol d’oiseau du château de Chaumont et de ses cĂ©lèbres jardins, le domaine s’Ă©tend sur 40 hectares : 25 en bio, 15 en conversion. Lorsque des traitements s’imposent, seule la bouillie bordelaise – Ă base de cuivre – est autorisĂ©e, dans des volumes limitĂ©s.
Son directeur des opĂ©rations, Marc-Simon Boyer, rĂ©sume la situation : “Il a beaucoup plu d’octobre Ă juin avec des tempĂ©ratures ni trop chaudes ni trop fraĂ®ches. Il a mĂŞme plu trois fois 30 millimètres en une semaine fin mai : Ă ce moment-lĂ , la plante luttait contre le champignon et essayait de se former. Quand on traite et que, trois jours plus tard, on voit du mildiou partout, on se pose des questions. Le mildiou devient-il de plus en plus rĂ©sistant ? Les produits sont-ils toujours adaptĂ©s ?”
Parcelles abandonnées
En 2024, le mildiou s’est propagĂ© prĂ©cocement sur le territoire. D’abord en Gironde, oĂą les viticulteurs ont reprochĂ© aux propriĂ©taires de parcelles abandonnĂ©es d’avoir laissĂ© le champignon se propager. Dans l’AOC Cahors, les gelĂ©es printanières puis le mildiou ont dĂ©cimĂ© la quasi-totalitĂ© du vignoble.
Dans le Maine-et-Loire, un vigneron bio de la banlieue d’Angers explique avoir traitĂ© douze fois au lieu de cinq pour s’en dĂ©barrasser. A Limeray (Indre-et-Loire), au Domaine de la Tonnellerie, crĂ©Ă© en 1850 et aujourd’hui en conversion bio, son propriĂ©taire, Vincent PĂ©quin, est amer : « Le mildiou est arrivĂ© tĂ´t, a touchĂ© le pĂ©doncule et a provoquĂ© la chute de la grappe. Nous prĂ©voyons 10 hectolitres par hectare, contre 66 en 2023. »
Selon les estimations du 23 aoĂ»t du ministère de l’Agriculture, la rĂ©colte 2024 en France mĂ©tropolitaine « devrait diminuer dans presque toutes les rĂ©gions viticoles. » Il anticipe une rĂ©colte de 40 Ă 43 millions d’hectolitres, contre 47,9 millions d’hectolitres en 2023. En effet, si certaines rĂ©gions souffrent d’une pĂ©nurie chronique de travailleurs saisonniers pour leurs vendanges manuelles, d’autres, oĂą le volume de raisin rĂ©coltĂ© sera moindre, ne seront pas touchĂ©es.
« Réactif et présent »
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