LL’augmentation des dépenses des collectivités locales pourrait aggraver le déficit de 2024 de 16 milliards d’euros, a déclaré Bruno Le Maire, le ministre démissionnaire de l’Economie. Mais on craint que ces dépenses soient en réalité bien plus élevées. Même si les territoires sont le premier investisseur public de France, devant l’Etat, leurs comptes sont en fait approximatifs et peu fiables.
Dans la plupart des pays comparables, anglo-saxons, scandinaves mais aussi en Italie par exemple, les comptes des collectivités locales sont certifiés. Autrement dit, leur sincérité et leur fiabilité sont vérifiées chaque année par des organismes extérieurs compétents. Ce n’est pas le cas en France, et cette situation contrevient à la fois à la Constitution (article 47.2) et à la directive européenne du 8 novembre 2011 sur les exigences applicables aux cadres budgétaires des États membres.
Certes, les chambres régionales des comptes (CRC) ont des missions de contrôle, mais pas de certification, et les quelques centaines de commissaires aux comptes français n’ont pas la possibilité d’analyser les comptes des quelque 35 000 communes avec une fréquence raisonnable. Les comptes des grandes collectivités sont audités en moyenne tous les quatre ans, ceux des collectivités moyennes tous les six ans et ceux des petites collectivités font l’objet d’une remise en cause au mieux tous les vingt ans.
Aberrations
Des études menées par la Cour des comptes ou les services du ministère des Finances ont pu montrer la fréquence des aberrations comptables.
Lorsque, par manque d’organisation ou par choix, une infrastructure était refaite avant sa « fin de vie », les normes comptables n’exigeaient pas, jusqu’à cette année, que la dépense soit comptabilisée comme une perte financière, comme c’est le cas pour une entreprise privée ou une association.
Un trottoir prévu pour durer dix ans peut être construit et reconstruit trois fois dans ce laps de temps sans problème. Il s’agit simplement d’un « investissement » supplémentaire qui passe inaperçu. Heureusement, ces normes viennent d’être partiellement modifiées, mais il reste encore beaucoup à faire.
Ce n’est pas le seul écart. Certaines collectivités n’indiquent pas dans leurs comptes l’intégralité des stocks dont elles disposent – de fioul par exemple ou de pièces détachées pour les travaux – ce qui leur permet de paraître plus démunies qu’elles ne le sont.
D’autres, au contraire, donnent une fausse impression de prospérité. Alors qu’ils sont tenus de le faire, ils ne mettent pas de côté suffisamment d’argent (provisions) pour faire face à de lourds travaux d’entretien qui risquent fort d’être nécessaires, ou à d’éventuels litiges avec des agents ou des sociétés concessionnaires, prenant ainsi des risques inconsidérés.
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