LLa mousse de bière relève de la physique et de la chimie. La physique d’abord, car il s’agit d’un état bien particulier de la matière, constitué de bulles de gaz dispersées dans un liquide ; la chimie aussi, car pour que ces bulles « tiennent », elles ont besoin d’un allié, que l’on appelle « tensioactif » et qui peut être de nature chimique très variée. En cuisine, on croisera souvent des lécithines et des protéines qui feront très bien l’affaire pour créer les traditionnels soufflés, les meringues, ou encore les fameuses mousses récemment à la mode dans nos assiettes.
Car pour qu’il y ait de la mousse, il faut non seulement qu’il y ait des bulles mais aussi et surtout qu’elles soient suffisamment stables pour se tasser les unes contre les autres sans éclater. Ainsi, les sodas gazeux, comme les vins dits « pétillants », révèlent leur effervescence dès l’ouverture de la bouteille, libérant du dioxyde de carbone (CO) sous forme de bulles.2) qui y était dissoute : elle « mousse » alors effectivement… et encore quand on verse la boisson dans le verre… mais cette mousse disparaît presque instantanément !
Plus le liquide est agité, plus le volume de gaz libéré sera important.
Alors, qu’est-ce que la bière a de « plus » que ces boissons pour permettre à ses bulles de rester longtemps à la surface, formant ce fameux col blanc qui fait le bonheur des fans ? Des tensioactifs ! En effet, les protéines du malt d’orge ainsi que l’isohumulone (molécule issue de la dégradation, lors de la fermentation, de la lupuline apportée par le houblon) entourent les bulles lors de leur montée, formant une couche protectrice qui leur permet de se tasser les unes contre les autres… avant de finalement éclater au bout de plusieurs minutes.
Maintenant que nous comprenons la chimie, comment pouvons-nous « contrôler » le volume de mousse ? Revenons à la physique : car plus le liquide est agité, plus le volume de gaz libéré sera important.
C’est pourquoi une bière servie haut dans le verre produira beaucoup de mousse, alors qu’en la laissant couler très doucement (et donc sans choc) le long du verre, la mousse restera fine. Cependant, est-ce une bonne idée de faire cela ? Pas forcément, car tous les gaz qui ne se dégagent pas lors du service le seront… par l’agitation de votre estomac ! C’est pour la même raison qu’il est déconseillé de boire directement à la bouteille. Dans les deux cas, ballonnements garantis lors de la digestion !
* Christophe Lavelle, chercheur en biophysique moléculaire, épigénétique et nutrition au CNRS, à l’Inserm au Muséum national d’histoire naturelle (MNHN).