Chef d’entreprise-apiculteur, fonctionnaire ou instructeur hors de l’eau, Marine, Emmanuel et Arthur, apnĂ©istes sĂ©curitĂ©, sont les anges gardiens des compĂ©titeurs des Championnats du Monde d’apnĂ©e d’Ajaccio, pour sĂ©curiser leurs plongĂ©es dans les profondeurs. Une mission vitale choisie par “passion et vocation”.
Pour le grand public, l’apnĂ©e profonde se rĂ©sume souvent à « Le Grand Bleu », le film de Luc Besson.
Mais, diffĂ©rence notable, il n’y a plus de plongeurs sous-marins, incapables de remonter des apnĂ©istes en difficultĂ© Ă cause des paliers Ă effectuer. La sĂ©curitĂ© des compĂ©titeurs est dĂ©sormais assurĂ©e par des apnĂ©istes de sĂ©curitĂ©, ou “safeties” en anglais.
Pour les premiers Championnats du monde organisĂ©s en Corse par l’Association internationale pour le dĂ©veloppement de l’apnĂ©e (AIDA), rĂ©unissant jusqu’Ă dimanche 120 concurrents de 50 nationalitĂ©s, 15 “sĂ©curitĂ©s” venues elles aussi du monde entier, de l’Uruguay Ă TaĂŻwan, sous la direction du Chypriote Savvas Savva, sont prĂŞtes Ă secourir les plongeurs risquant l’Ă©vanouissement, principalement lors de leur remontĂ©e.
“C’est une passion et une vocation. J’aime ĂŞtre dans cette position, voir les athlètes se dĂ©passer car ils savent qu’ils nous font confiance”, confie Ă l’AFP Marine Russo, 35 ans, l’un de ces anges gardiens. Au quotidien, elle est Ă la tĂŞte d’une sociĂ©tĂ© de conseil Ă Porticcio et apicultrice en herbe Ă Coti-Chiavari (Corse du Sud).
« J’ai franchi les 50 mètres mais je ne recherche pas les grandes profondeurs », ajoute cet apnĂ©iste, qui aime particulièrement ĂŞtre « pour et avec les sportifs au moment oĂą ils donnent le meilleur d’eux-mĂŞmes ».
Même plaisir pour Emmanuel Zuccarelli, agent associatif corse de 43 ans, qui vit ses premiers Championnats du Monde en apnée de sécurité.
« J’aime beaucoup le partage. On est là l’un pour l’autre, pour sa sécurité. Un apnéiste est centré sur lui-même, sur ses sensations, sa détente, son dynamisme. Une sécurité doit être centrée sur l’athlète mais aussi sur lui-même, pour ne pas se mettre en danger. »
– Ambiance de confiance –
“Il n’y a pas d’athlète sans sĂ©curitĂ©”, a confirmĂ© Ă l’AFP Abdelatif Alouach, 48 ans, six fois champion de France et cinq fois champion du monde d’apnĂ©e.
“Ce n’est pas seulement quelqu’un qui veille sur nous. C’est quelqu’un qui sait se positionner, descendre Ă la bonne profondeur, faire l’effort nĂ©cessaire pour nous remonter si nous avons besoin d’aide, nous secourir si nous sommes inconscients, dĂ©clencher la chaĂ®ne de secours… C’est notre vie qui tient Ă la sĂ©curitĂ©”, dit-il, se remĂ©morant un malaise vĂ©cu il y a trois ans.
Pour chaque plongĂ©e, quatre apnĂ©istes de sĂ©curitĂ© se prĂ©parent en surface. Sous la surveillance d’une sonde qui donne sa profondeur en temps rĂ©el, l’athlète descend seul, filmĂ© par le “dive-eye”, une camĂ©ra sous-marine.
Lors de sa remontĂ©e, un premier « sĂ©curitĂ© » le rejoint avec un scooter sous-marin, Ă 40 mètres, puis un deuxième le retrouve, Ă l’aide de ses palmes, Ă 25-30 mètres, avant un troisième Ă 20 mètres. Un quatrième veille en surface et un système de contrepoids est prĂ©vu en cas d’incident plus en profondeur.
Il faut donc que chacun s’y mette au bon moment et connaisse son rôle.
« On lance des chronomètres au dĂ©but d’une plongĂ©e et ils nous donnent la profondeur au fur et Ă mesure, ce qui nous indique la vitesse de l’athlète. On sait que pour descendre Ă 25 mètres, il faudra 30-35 secondes », explique Marine.
“Si le plongeur fait une syncope (perte de connaissance), un premier sĂ©curitĂ© va lui bloquer les voies respiratoires avec la main, pour qu’il n’avale pas ou n’inhale pas d’eau s’il reprend connaissance pendant la remontĂ©e. Le deuxième va faciliter cette remontĂ©e en le poussant sur les hanches et le troisième va maintenir sa tĂŞte hors de l’eau, Ă la surface, pendant que nous effectuons les gestes de rĂ©animation”, explique Ă l’AFP Arthur Voisin, 36 ans, responsable d’une des deux lignes de plongĂ©e des Championnats du monde d’Ajaccio, chacune dotĂ©e de son Ă©quipe de sĂ©curitĂ© dĂ©diĂ©e.
“Beaucoup de gens pensent qu’on sauve des gens, qu’on fait des choses extrĂŞmes, mais l’essentiel est de faire en sorte que les athlètes mais aussi les autres autour d’eux se sentent bien. C’est cette atmosphère de confiance qui permet la performance”, explique cet ancien compĂ©titeur, aujourd’hui instructeur d’apnĂ©e et surtout de “sĂ©curitĂ©”, officiant aux Championnats du monde depuis 2019.
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