Les agences de notation Moody’s et Fitch ont rendu vendredi 26 avril au soir leurs verdicts respectifs du printemps sur la dette souveraine française : toutes deux maintiennent cette note inchangĂ©e.
Moody’s a maintenu cette note au niveau « Aa2 » avec une perspective stable, jugeant le risque de dĂ©faut très faible malgrĂ© la rĂ©cente dĂ©tĂ©rioration des finances publiques du pays. De son cĂ´tĂ©, Fitch, qui avait abaissĂ© la note l’annĂ©e dernière, l’a laissĂ©e au niveau « AA- » avec une perspective stable.
Le ministre français de l’Economie et des Finances, Bruno Le Maire, a dĂ©clarĂ© qu’il ” note ” des verdicts des deux agences. « Cette dĂ©cision doit nous inviter Ă redoubler de dĂ©termination pour assainir nos finances publiques et atteindre l’objectif fixĂ© par le PrĂ©sident de la RĂ©publique : ĂŞtre sous la barre des 3% de dĂ©ficit en 2027 »a dĂ©clarĂ© le ministre dans un communiquĂ©.
La notation des agences intervient après une succession de dĂ©ceptions dans les prĂ©visions de Bercy. En fĂ©vrier, le gouvernement a dĂ» abaisser la croissance attendue cette annĂ©e de 1,4% Ă 1% et annoncer qu’il devait trouver de toute urgence 10 milliards d’Ă©conomies dans le budget de l’État. Fin mars, c’est l’Institut national de la statistique (Insee) qui annonçait que le dĂ©ficit public avait glissĂ© Ă 5,5 % du produit intĂ©rieur brut (PIB) en 2023, au lieu des 4,9 % attendus. Enfin, le dĂ©ficit public pour 2024, prĂ©vu Ă 4,4%, a Ă©tĂ© portĂ© Ă 5,1% du PIB par Bercy, qui a promis un nouvel effort de 10 milliards d’euros jusqu’Ă la fin de l’annĂ©e.
Ces Ă©carts dans les prĂ©visions macroĂ©conomiques proviennent, selon les Ă©conomistes de La Banque Postale, de “des revenus infĂ©rieurs de 21 milliards d’euros aux attentes” en 2023, plus que des dĂ©penses qui, de leur cĂ´tĂ©, « ont Ă©tĂ© maĂ®trisĂ©s, » et augmenter de 3,7% contre 4% en 2022.
Les agences de notation s’inquiètent Ă©galement du montant de la dette, qui dĂ©passe les 3 000 milliards d’euros et atteint dĂ©sormais 110,6% du PIB français. « La dette française est supĂ©rieure de 22 points de PIB Ă la moyenne de la zone euro »observent les Ă©conomistes dans leur dernière note de dĂ©cryptage « Rebond » : « Il s’agit du troisième ratio le plus Ă©levĂ© de l’Union europĂ©enne, après la Grèce et l’Italie. »
Des objectifs jugés « hors d’atteinte »
En avril 2023, Fitch a abaissĂ© la note souveraine de la France, l’abaissant d’un cran Ă AA-, avec perspective ” Ă©curie “. Ce mois-ci, en jugeant « peu ambitieux et de plus en plus hors de portĂ©e » des objectifs de rĂ©duction du dĂ©ficit proposĂ©s par le gouvernement d’ici 2027, l’agence avait indiquĂ© qu’elle n’abaisserait pas Ă nouveau la note, sauf si “peu probable” une nouvelle aggravation significative de la dette.
Quant Ă Moody’s, qui place la France Ă Aa2 – un cran au-dessus de Fitch – avec du recul ” Ă©curie “elle juge aussi “peu probable”, comme le FMI ou le Haut Conseil des finances publiques (HCFP), l’hypothèse d’un redressement du dĂ©ficit public en dessous de 3% du PIB en 2027, annoncĂ©e par le gouvernement pour se conformer aux obligations bruxelloises. Elle l’avait dĂ©jĂ soulignĂ© fin mars ” les risques “ liĂ© à « des hypothèses optimistes en matière d’économie et de revenus, ainsi que des rĂ©ductions de dĂ©penses sans prĂ©cĂ©dent ».
MalgrĂ© leurs critiques rĂ©currentes, les agences ont fait preuve d’une certaine “magnanimitĂ©” vers la France ces dernières annĂ©es, la maintenant parmi les meilleures au monde, grâce Ă la “liquiditĂ©” de sa dette ou de la soliditĂ© des banques françaises, note Eric Dor, directeur des Ă©tudes Ă©conomiques Ă l’IESEG School of management.
Bruno Le Maire veut rester “serein” dans la tempĂŞte : « Les agences font leur travail, je fais mon travail de ministre des Finances qui consiste Ă rĂ©tablir les comptes publics », a-t-il encore dit mercredi sur BFM Business. Le ministre devra encore faire face au verdict de la troisième agence, et la plus regardĂ©e, le 31 mai, Ă neuf jours des Ă©lections europĂ©ennes. S&P note actuellement la France AA, mais sa perspective est nĂ©gative.