Le portrait
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Bavard et travailleur, le journaliste est un perfectionniste anxieux, nourri par l’exercice des émissions en direct.
Pile. Sonia Devillers est rayonnante, vive et impériale. Elle parle avec un vocabulaire choisi, sa prononciation parfaite fait son charme. Pile. Elle se dit écrasée par un surmoi tel que malgré dix ans d’analyse, elle se refuse beaucoup de choses, à commencer par le plaisir. « Cela viendra plus tard », dit-elle, sans y croire. Pile. Elle n’est pas une mondaine, garde les mêmes amis depuis quarante ans malgré sa célébrité, se couche à 22 heures et travaille comme une folle. Pile. Terrifiée par ce portrait en Libération qu’elle avait pourtant désiré, elle nous appelle le lendemain de l’entretien, insistant point par point sur des sujets déjà abordés la veille, en utilisant exactement les mêmes mots. Pile. Attachant. Pile. Exigeant.
Sonia Devillers, sous tous ces aspects, en impose. Bien qu’expérimentée dans l’exercice de l’interview, se retrouver de l’autre côté du micro, clairement, la flatte et la gêne. Pour contourner le malaise, elle ne nous en laisse pas entrer. Pourtant, les failles sont partout et elle les revendique, comme une invitation à fendre l’armure : « Je n’ai aucune mémoire des dates. J’ai une mauvaise orthographe et je n’ai aucune notion des espaces. Je n’arrive pas à situer les pays d’Europe de l’Est. Même la Roumanie n’est pas facile pour moi. » Que ces échecs soient dus à son école primaire alternative, Decroly, à Saint-Mandé, où elle « J’ai beaucoup appris sur la façon de m’exprimer, mais je n’ai pas beaucoup étudié la grammaire » ou à une histoire