Anne-Sophie Ravistre, directrice de l’enfance et des familles au Conseil départemental des Côtes-d’Armor, revient sur la situation de plus en plus difficile des assistantes familiales du département.
En 10 ans, le recours aux familles d’accueil pour le placement des jeunes s’est effondré de 15 % en France, faute d’assistantes familiales. La pénurie peut-elle être résolue ?
Nous avons de plus en plus de jeunes pris en charge et de moins en moins d’assistants familiaux. Chaque année, nous perdons des profils traditionnels d’assistants familiaux qui pouvaient accueillir deux enfants ou plus. Dans les Côtes-d’Armor, nous avons recruté 38 assistants familiaux en 2023, mais ils ne couvrent pas à eux seuls les 37 départs en retraite ou fins de contrat.
Alors, face à cette pénurie, nous faisons tout ce que nous pouvons pour faciliter les conditions de travail et être attractifs. Car ce type de mesure éducative permet d’offrir à l’enfant pris en charge une vie familiale plus « normale » avec une forme de stabilité et d’attachement. Mais ce n’est pas un travail comme un autre. La pratique se fait quotidiennement, y compris le week-end, et à la maison avec sa famille.
Et les assistantes familiales dénoncent des temps de repos insuffisants…
Dans certains secteurs, et c’est vrai dans tous les départements, les week-ends de répit ne sont pas systématiques. Le manque de places impacte directement l’organisation des relais. Mais, lorsque c’est possible, les assistantes familiales travaillent au maximum entre elles pour permettre aux enfants d’être accueillis dans les mêmes lieux. Et nous étudions les demandes avec intention car nous savons que garantir des conditions de travail satisfaisantes préserve l’équilibre des professionnels et évite les ruptures d’accueil, néfastes pour les assistantes familiales et les enfants. Dans les Côtes-d’Armor, le budget alloué à la protection de l’enfance a augmenté de 50 % depuis 2021.
Certains professionnels évoquent leur désarroi face à des profils de plus en plus « abîmés » et porteurs de « pathologies graves ». Le service peut-il mettre en place un accompagnement spécifique ?
La protection de l’enfance ne peut agir seule. Les services doivent travailler sur des partenariats avec la pédopsychiatrie, le secteur médico-social ou encore l’Éducation nationale. Car, du fait de leur histoire et des événements traumatisants qu’ils ont pu vivre, les jeunes placés ont besoin d’un accompagnement plus important. La loi Taquet, en 2022, précise également que la protection de l’enfance est une responsabilité ministérielle mais aussi une responsabilité partagée avec d’autres acteurs.