Quatre-vingt-quatre millions d’euros investis pour construire un méthaniseur géant. Une échelle industrielle rarement vue en Haute-Marne. Les dirigeants du programme Nature Energie Chamarandes-Choignes (NECC) ont vu grand : leur installation engloutirait 129 500 tonnes de biomasse agricole chaque année, dont 100 000 tonnes de cultures énergétiques intermédiaires (Cives) et produirait 148 gigawattheures de biogaz, injectés dans le réseau national.
Et voilà, surprise, une semaine avant la fin de l’enquête publique, le projet de méthaniseur est annulé. « Nous, les treize agriculteurs porteurs du projet de méthanisation, avons pris la décision d’abandonner le projet NECC en raison de contraintes financières excessives »a déclaré vendredi 19 avril dans un communiqué le groupe d’agriculteurs impliqués.
L’affaire semblait pourtant bien engagée. Le lieu avait été choisi : un terrain de 12 hectares situé sur les hauteurs de Chamarandes-Choignes, commune résidentielle d’un millier d’habitants, enchâssée dans la vallée de la Marne. Quant au montage industriel et financier, il s’est appuyé sur la filiale française de la société danoise Nature Energy (NE), détenue à 100% par le pétrolier Shell. Cette dernière a impliqué plus d’une cinquantaine d’agriculteurs locaux et deux coopératives. Parmi ces « agriculteurs », des agro-entrepreneurs de la région qui ont investi en Ukraine en 2006 pour créer une mégaferme de 20 000 hectares sur les vestiges d’un ancien kolkhoze.
Climat d’hostilité
Tout cela a conduit à la création, début 2020, de NECC, dont le capital devait être détenu à 51% par les agriculteurs et à 49% par NE. «Il le fallait», car l’incapacité de réunir les fonds nécessaires pour détenir une participation majoritaire dans NECC les a fait abandonner. Il est vrai qu’entre le lancement du projet et aujourd’hui, les taux d’intérêt ont quadruplé. Selon NE, c’est cette augmentation soudaine du coût de l’argent qui a rendu presque impossible pour les agriculteurs de trouver du financement.
Mais, au-delà de cette explication financière, le climat d’hostilité au projet qui s’est progressivement installé a pesé lourdement dans la balance. D’abord, de nombreux riverains ont découvert l’existence du dossier méthaniseur quelques semaines seulement avant l’ouverture de l’enquête publique, le 11 mars, alors même que le projet avait été lancé en 2019. Le commissaire enquêteur, – lui-même, avait déploré ce manque de connaissances. communication et organisé une réunion d’information de rattrapage.
Il vous reste 49,66% de cet article à lire. Le reste est réservé aux abonnés.