Plusieurs études récentes le démontrent : les lianes envahissent les jungles du Panama, du Pérou, de la Bolivie, de la Guyane, du Brésil, de l’Australie, du Nigeria, du Ghana, de la Chine et de l’Inde. Ces plantes s’accrochent aux troncs pour grimper vers la lumière ont vu leur nombre augmenter par endroits de 30 % en une décennie. La cause? Le réchauffement.
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Hervé Poirier, rédacteur en chef de la revue scientifique Epsilon, nous explique aujourd’hui que le réchauffement climatique donne des ailes aux lianes qui prolifèrent pour chercher la lumière dans les arbres…
franceinfo : Les lianes envahissent les jungles du monde entier. Ce qui se passe ?
Hervé Poirier : C’est l’attaque des vignes ! Des études réalisées dans de nombreuses forêts tropicales d’Afrique, d’Amérique et d’Asie mettent en évidence la prolifération de ces plantes qui s’accrochent aux troncs pour grimper vers la lumière.
Leur nombre a augmenté de 29 % en 10 ans au Panama ; 90% des arbres infestés dans la forêt des Nouragues, en Guyane ; et leur biomasse croît globalement 60 % plus vite que les arbres qui les soutiennent.
Et à quoi est-ce dû ?
Principalement le changement climatique. Des analyses et expérimentations récentes suggèrent que les lianes s’adaptent bien mieux que les arbres aux périodes de sécheresse, qui se multiplient sous l’effet du réchauffement. Car, s’ils sont plus efficaces pour capter la lumière en hauteur, au niveau de la canopée, ils sont également plus efficaces pour extraire l’eau du sol.
Les vignes peuvent prospèrent dans des conditions plus chaudes et plus sèches, qui sont de plus en plus courantes. Sachant qu’ils exploitent aussi plus efficacement les lacunes de lumière créées par l’exploitation forestière, par l’exploitation minière, par la fragmentation, liées aux voies de communication, par les tempêtes, les incendies, etc.
Et est-ce inquiétant ?
En fait, ce n’est pas une bonne nouvelle. Les lianes ralentissent la croissance des arbres, réduisent leur reproduction et augmentent leur mortalité. Au bout de 10 ans, la canopée d’une forêt infestée de lianes est 2 mètres plus basse que celle des zones qui n’en ont pas. Un arbre envahi par les lianes voit ses branches raccourcir de 45 %, et stocke 20 % de carbone en moins.
Les modèles de végétation utilisés dans les évaluations du GIEC n’ont pas encore intégré cet effet significatif sur le puits de carbone que représentent les forêts tropicales. De nombreux chercheurs, parmi ceux que nous avons interrogés, souhaitent agir au plus vite, à coups de machette.
Dans des forêts gérées durablement, couper des lianes sur 5 arbres par hectare ne coûterait qu’un dollar. C’est tout à fait réalisable, et cela aurait de réels bénéfices en termes de production de bois et de captage de CO2, sans impacter la biodiversité. Les vignes attaquent. Reste à organiser la défense.
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