Véhicules incendiés, magasins pillés, heurts entre manifestants et forces de l’ordre: théâtre de violences de “grande intensité”, un couvre-feu a été décrété à Nouméa, à 17.000 kilomètres de Paris, où les députés se penchent sur une révision constitutionnelle dénoncée par les indépendantistes de Nouvelle-Calédonie.
Le Haut-commissariat de la République en Nouvelle-Calédonie a annoncé un couvre-feu pour la nuit de mardi à mercredi dans l’agglomération de Nouméa, en proie à des troubles de « grande intensité » dans la nuit de lundi à mardi.
Le couvre-feu est décrété du mardi 18h00 au mercredi 6h00, a annoncé dans un communiqué diffusé peu après 8h00 locales mardi (23h00 lundi à Paris) le représentant de l’Etat dans ce territoire du Pacifique Sud. .
Par ailleurs, tout rassemblement est interdit dans le grand Nouméa, tout comme le port d’armes et la vente d’alcool dans toute la Nouvelle-Calédonie, indique le haut-commissariat, qui invite les 270 000 habitants du territoire à rester chez eux.
“De nombreux” membres des forces de l’ordre ont été blessés lors de ces affrontements, ont indiqué les services de l’Etat, mais aucun blessé grave n’a été signalé “au sein de la population”.
En zone urbaine, les dégâts sont considérables. A l’entrée de la “capitale” calédonienne, une grande usine spécialisée dans l’embouteillage a été victime d’un incendie criminel et complètement ravagée par les flammes vers 22 heures lundi (13 heures à Paris), a constaté un journaliste de l’AFP. .
Plusieurs supermarchés ont été pillés à Nouméa, mais aussi dans les villes voisines de Dumbéa et du Mont-Dore. Au moins deux concessions automobiles ont également été ravagées par les flammes vers 23 heures, a également constaté l’AFP.
Depuis la nuit, gendarmes et policiers mobiles affrontent de jeunes manifestants masqués ou cagoulés, qui se sont emparés de plusieurs ronds-points.
Des incendies ont été allumés sur la route pour gêner la circulation tandis que des tirs de lance-balles défensifs et de grenades de désencerclement ont été entendus dans toute la ville.
– Raid et GIGN en renfort –
Les premières altercations avec la police ont débuté lundi, en marge d’une mobilisation indépendantiste contre la réforme constitutionnelle examinée lundi à l’Assemblée nationale, qui vise à élargir le corps électoral aux élections provinciales, cruciales en Nouvelle-Calédonie.
Créé en 1998 par l’accord de Nouméa, le corps électoral est en effet gelé, privant du droit de vote près d’un électeur sur cinq.
Pour le ministre de l’Intérieur et de l’Outre-mer Gérald Darmanin, qui a mené la réforme, cette disposition “n’est plus conforme aux principes de la démocratie”.
Les indépendantistes critiquent en revanche un dégel qui risque de « minimiser encore davantage le peuple indigène kanak ».
“J’ai une pensée pour les policiers (…) et particulièrement pour les gendarmes, dont nous évacuons actuellement les familles menacées de mort par des manifestants qui ne passent pas par la démocratie, mais par la violence, les tirs à balles réelles, les intimidations et menaces de mort”, a fustigé Gérald Darmanin depuis la tribune de l’Assemblée.
Trente-six arrestations ont déjà eu lieu, selon le communiqué du haut-commissariat publié mardi matin (heure de Nouméa).
De peur de s’enliser, le Raid, quatre escadrons de gendarmes mobiles et deux sections du CRS 8, unité spécialisée dans la lutte contre les violences urbaines, arriveront en renfort, a appris l’AFP de source proche du dossier. Quinze renforts du GIGN seront également envoyés à Nouméa.
A proximité de la “capitale” calédonienne, la route qui traverse la tribu de Saint-Louis, fief indépendantiste, au Mont-Dore et qui relie le sud de l’île à Nouméa, a été coupée par la police, en raison de la présence de nombreux des manifestants armés de pierres et allumé des feux sur la route.
Le quartier populaire de Montravel, à Nouméa, a également dû être coupé à plusieurs reprises à la circulation, ainsi que la voie rapide qui relie la ville au nord de l’île.
Le gouvernement de Nouvelle-Calédonie a de son côté annoncé mardi la fermeture des lycées et collèges jusqu’à nouvel ordre. Les écoles de plusieurs communes, notamment celles de Nouméa, gardent également leurs portes fermées.
L’aéroport international est fermé et la compagnie Aircalin a suspendu ses vols pour la journée de mardi.
Le projet de gouvernement sera soumis au vote solennel des députés mardi après-midi (heure de Paris). En plein couvre-feu à Nouméa.
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