C’est un peu l’inversion des bébés à la maternité, la mode immobilière. Un cauchemar auquel personne ne veut faire face mais qui a fait irruption dans le quotidien de Béatrice et Lionel Harpon, comme le raconte Le Parisien. C’est au moment où il a voulu mettre en vente sa maison de Sevran (Seine-Saint-Denis), acquise en 2015, que le couple a découvert avec stupéfaction qu’ils n’avaient jamais été propriétaires de cette maison. C’est l’agent immobilier en charge de la vente qui a découvert le problème, alors même qu’il avait trouvé des clients prêts à payer 242 000 euros pour acheter les locaux, qui a mis au jour cette incohérence qui aurait dû être signalée par les notaires.
Le couple de fonctionnaires qui envisageaient de déménager n’avait jamais prêté attention au fait qu’ils occupaient le lot 152 de la section BX du cadastre de leur ville alors que leur titre de propriété mentionne la parcelle 151, comme l’explique Le Parisien . Et malheureusement pour eux, il ne s’agit pas d’une simple faute de frappe mais plutôt d’une inversion aux conséquences bien plus graves. La faible taxe foncière (900 euros) aurait pu les alerter, mais c’était leur premier bien immobilier et ils n’avaient aucune idée des tarifs.
Violation du consentement
Il semble que l’erreur remonte à 1949, lorsque le terrain litigieux fut divisé en deux parcelles après le divorce des deux propriétaires. Et donc, s’il y a eu inversion c’est que les voisins de Béatrice et Lionel ont aussi un problème… C’est bien le cas, puisque le propriétaire du terrain attenant, un retraité habitant Roubaix, a fait raser la petite maison en bois qui était là avec l’idée de mettre le terrain en vente. Il a découvert cet imbroglio depuis 2017, l’empêchant de mettre en vente un bien dont il n’est pas propriétaire. Les deux partis sont pour l’instant bloqués en attendant une régularisation de part et d’autre. Une situation qui pourrait se prêter à un échange définitif de biens, prévu par le Code civil. De son côté, Me Gabriel Neu-Janicki, avocat spécialisé en droit immobilier à Paris, estime qu’en cas d’accord entre les propriétaires des deux parcelles adjacentes, il suffit que le géomètre vienne constater cette commune accord pour rectifier l’erreur. et faire coïncider le relevé cadastral avec la réalité. Sinon, « le recours à un géomètre par la voie légale sera nécessaire pour procéder à une nouvelle délimitation de la parcelle contestée ».
Par ailleurs, pour débloquer la situation et « stimuler toutes les parties prenantes », l’avocat estime qu’il existe de multiples pistes. Premièrement, le couple de fonctionnaires pourrait se retourner contre les vendeurs qui leur ont cédé leur maison, « en demandant la nullité de la vente pour défaut de consentement et en obtenant le remboursement du prix payé ». Me Neu-Janicki précise: « En effet, d’après l’acte il aurait été payé pour la vente du terrain 151 qui ne lui appartient pas. Pour mémoire, selon l’article 1144 du Code Civil, le délai pour l’action en nullité ne court, en cas d’erreur ou de fraude, qu’à compter du jour où elles ont été découvertes. Ainsi, à compter du jour où ils ont découvert cette situation, le couple dispose d’un délai de 5 ans pour agir.
Et au-delà de cette première solution, il rappelle qu’il existe une manière de se retourner contre les notaires qui ont assuré la vente sans l’efficacité juridique promise et de se retourner contre l’assurance des notaires. Autres voies : le couple pourrait également tenter de faire annuler son crédit et obtenir le remboursement des sommes dues ainsi que des intérêts ou encore se retourner contre le précédent agent immobilier qui lui a servi d’intermédiaire et n’a pas non plus effectué toutes les vérifications requises.