Les urnes n’ont pas encore parlé, mais plusieurs parlementaires se tournent déjà vers l’avenir et fourmillent d’idées pour faire évoluer le vote européen en France. Deux projets de loi sont sur la table au Sénat pour encadrer le nombre de listes à ce scrutin. Avec 38 listes de candidats sur la liste de départ, 2024 a battu le record de 2019, où 34 étaient en lice pour le vote des électeurs.
Deux sénateurs souhaitent modifier la loi, pour lutter contre l’inflation du nombre de listes. Olivier Paccaud (lié à LR) est le dernier en date, avec un projet de loi visant à encadrer le nombre de listes aux élections européennes, déposé le 4 juin. « Le débat européen ne peut pas devenir un café commercial, une cacophonie où sont brandies toutes les bannières imaginables, de la défense des abeilles à celle des teckels ! Avec 38 listes, dont les trois quarts sont farfelues, on ne frise plus le ridicule, on s’y vautre», dénonce le sénateur de l’Oise dans un communiqué. Et de dénoncer des « candidats à des témoignages ou à des initiatives individuelles » qui pourraient « diluer l’expression des principaux courants politiques ».
Deux textes sur la table au Sénat pour exiger un seuil minimum de soutien
Le sénateur propose un système de parrainage, en partie similaire à celui qui existe pour l’élection présidentielle. Elle pose ainsi l’idée d’un minimum de 250 signatures de maires (provenant d’au moins la moitié des départements) ainsi qu’un nombre de signatures de citoyens, “afin de garantir un soutien populaire suffisant”. La définition du seuil fait l’objet d’un décret en Conseil d’État.
Début mai, un autre de ses collègues a déposé un projet de loi instaurant également un « filtre » pour éviter une envolée du nombre de listes. Le sénateur (Les Indépendants) de l’Aisne imagine, quant à lui, une condition de « 10 000 parrainages citoyens » pour pouvoir présenter une liste aux élections européennes. L’ancien maire de Crécy-sur-Serre motive sa proposition principalement par les difficultés logistiques rencontrées par les petites communes, notamment l’installation de plusieurs dizaines de listes.
Une proposition de circonscriptions locales pour l’élection des députés européens
Dans un autre registre, une troisième initiative parlementaire propose de réformer le mode de vote des députés européens en France. Pour le sénateur Philippe Folliot (Union centriste), la « désaffection » et la « méfiance » des électeurs envers les institutions européennes « sont en grande partie dues à un manque d’incarnation et à un éloignement des préoccupations concrètes et quotidiennes des Français ».
Le sénateur tarnais imagine un double système : 10 députés seraient élus sur une liste nationale, au prorata, et 71 seraient élus au niveau de 71 circonscriptions territoriales, lors d’un scrutin majoritaire uninominal. Les communautés d’outre-mer auraient la garantie d’être représentées chacune par un député européen, au même titre que les Français établis hors d’Europe. En France, un député européen représenterait un à trois départements, selon la population. Les députés européens ainsi élus seraient « le porte-parole de l’Union européenne dans les territoires, mais aussi le relais simplifié du département, de la paire ou du trinôme de départements », explique le parlementaire. « Nous l’assumons. On dit que les élus doivent représenter la population et un territoire», justifie le sénateur.
L’idée est née de ses rencontres avec des maires lors de son tour de France à vélo avec le maire de Neuilly-sur-Seine Jean-Christophe Fromantin (centre-droit). « De nombreux élus nous disent que s’ils n’ont pas la chance d’avoir un député européen de leur département, ils ne le voient jamais. Cela explique peut-être la probable très faible participation que nous risquons d’avoir dimanche.»
Rappelons que le découpage en circonscriptions pour les élections européennes est une prérogative de chaque État membre. De 2004 à 2024, la France a élu ses députés européens au sein de 8 grandes circonscriptions interrégionales. Cette évolution n’a eu aucun effet sur la participation, les trois ont été marquées par une abstention supérieure à 57%. « Ces grandes circonscriptions n’avaient aucun élément d’identification, ce n’était pas une proximité », souligne Philippe Folliot.