Après des mois de difficultés et une baisse historique des ventes en 2023, la plupart des observateurs du marché immobilier sont avides de bonnes nouvelles. Et comme ce début de printemps en a apporté plusieurs simultanément, on a vu apparaître dans la presse des annonces triomphales expliquant que la crise immobilière était désormais derrière nous, que les acheteurs étaient de retour et que les prix étaient presque prêts à remonter.
Ce qui est incontestable, c’est que les taux des crédits immobiliers baissent à nouveau et que les banques sont aujourd’hui bien mieux placées pour accorder des crédits. C’est ainsi que le récent observatoire du Crédit Logement a annoncé que les taux moyens étaient passés de 4,18% au dernier trimestre 2023 à 3,99% au premier trimestre 2024. L’étude note que la baisse est à l’œuvre partout, même sur des durées longues et que le la durée moyenne des crédits accordés a recommencé à diminuer lentement. Et côté volumes, preuve que le robinet du crédit s’ouvre à nouveau, la production de crédit, qui était tombée à son plus bas niveau, a augmenté de 51,8% entre décembre 2023 et mars 2024.
Un tournant”
« Le tournant du marché du crédit immobilier a été atteint en février-mars »souligne l’étude qui estime que cela annonce «un rebond au cours de l’année 2024”. Il n’y a pas de triomphalisme pour autant, car la reprise s’annonce lente et l’accès au crédit reste compliqué pour une grande partie de la population. Et si certains annoncent déjà un printemps immobilier, d’autres spécialistes se montrent plus prudents.
« Le marché immobilier va mieux mais le logement reste malade, estime Yann Jéhanno, président du réseau Laforêt. La secousse actuelle est conjoncturelle, elle résulte de la baisse des taux et des prix et du retour du crédit pour les meilleurs profils. Mais l’essentiel : le manque de production de nouveaux logements, l’aménagement du territoire ou le retour à l’adhésion des ménages à faibles revenus… tout cela n’est pas abordé.» Cela ne l’empêche pas de saluer une autre évolution récente : le grand retour des négociations sur les prix. « En 2023, 60 % des transactions faisaient l’objet de discussions sur les prix alors qu’aujourd’hui nous en sommes à 81 %. C’est significatif : vendeurs et acheteurs s’accordent désormais pour jouer le jeu et cela devrait apporter de la fluidité. Les prix, qui ont baissé ici de 3,9% l’année dernière, ont déjà baissé de 1,2% au premier trimestre.»
Une hirondelle plutôt qu’un printemps
De son côté, Henry Buzy-Cazaux, président de l’Institut de gestion des services immobiliers, estime également que les messages trop optimistes ne sont pas de mise. “Il y a de bonnes nouvelles et nous devrions nous réjouir mais ce n’est qu’une hirondelle, pas le printemps », résume-t-il. Lui, qui a toujours cru qu’une baisse nette et nette des prix interviendrait après la crise sanitaire, constate que la baisse des prix reste limitée et que la situation des primo-accédants continue de se dégrader. Les dernières baisses de taux ont permis de regagner quelques points de solvabilité mais la hausse avait réduit le pouvoir d’achat immobilier de près de 25 %. « Par ailleurs, le moral des ménages, qui est un facteur essentiel de la solidité du marché, n’est pas bon. La situation s’est même aggravée avec les tensions internationales et les menaces de guerre. » Comme Yann Jéhanno, il rappelle que les grands problèmes fondamentaux ne sont pas résolus : “J’ai une maladie grave, mais aujourd’hui je me sens mieux.” Il y a encore du travail à faire pour remettre l’immobilier sur les rails.