Économiste spécialisé dans les questions de commerce international, Vincent Vicard est directeur adjoint du Centre français de recherche et d’expertise en économie internationale, rattaché aux services de Matignon. Il est l’auteur de Faut-il réindustrialiser la France ? (PUF, 176 pages, 12 euros).
La réindustrialisation résoudrait-elle une grande partie des problèmes de la France ?
C’est trop prêter à une industrie dont plusieurs caractéristiques sont un peu survendues, par exemple en matière d’emploi. L’industrie manufacturière représente actuellement 11% de l’emploi en France. Il ne faut pas rêver : même avec une politique de réindustrialisation très ambitieuse, on n’augmentera pas forcément le taux d’emploi en France – quelques dizaines ou centaines de milliers d’emplois peuvent au mieux être créés.
Mais une projection de la direction d’animation de la recherche, des études et des statistiques et de France Stratégie montre que, d’ici 2030, le taux d’emploi restera stable, car si l’on réindustrialise certains secteurs, les gains de productivité continueront de réduire l’emploi industriel dans d’autres. L’industrie ne suffira pas à fournir de bons emplois à la classe moyenne. Elle joue cependant un rôle majeur dans certaines zones d’emploi éloignées des zones métropolitaines.
La France est-elle vraiment en train de se réindustrialiser ?
Les indicateurs sont ambigus. Nous avons connu une période de déclin très significatif de l’emploi industriel et de la part de l’industrie dans le PIB depuis les années 1980 jusqu’à la première décennie du 21e siècle.e siècle. Depuis une dizaine d’années, nous vivons une stabilisation plutôt qu’une réindustrialisation, même si 130 000 emplois ont été créés dans l’industrie depuis 2017, notamment dans le secteur agroalimentaire. Mais la production industrielle reste inférieure à son niveau de 2019, avant la crise du Covid-19, et la productivité de l’industrie française est en baisse, ce qui s’explique par le type d’emplois qui ont été créés et qui ne sont pas forcément dans des secteurs industriels à forte valeur ajoutée. Avant de parler de réindustrialisation, il faut se demander de quelle industrie nous avons besoin en France, alors que la géopolitique mondiale et la crise climatique changent toutes les grilles de lecture.
La réindustrialisation suit-elle une stratégie ?
La lutte contre la désindustrialisation a commencé sous la présidence de François Hollande avec le pacte de compétitivité des entreprises. Le premier quinquennat d’Emmanuel Macron a poursuivi cette dynamique avec la baisse de l’impôt sur les sociétés et des taxes de production. Les coûts de production ont baissé, sans faire de différence entre les secteurs et les entreprises.
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Économiste spécialisé dans les questions de commerce international, Vincent Vicard est directeur adjoint du Centre français de recherche et d’expertise en économie internationale, rattaché aux services de Matignon. Il est l’auteur de Faut-il réindustrialiser la France ? (PUF, 176 pages, 12 euros).
La réindustrialisation résoudrait-elle une grande partie des problèmes de la France ?
C’est trop prêter à une industrie dont plusieurs caractéristiques sont un peu survendues, par exemple en matière d’emploi. L’industrie manufacturière représente actuellement 11% de l’emploi en France. Il ne faut pas rêver : même avec une politique de réindustrialisation très ambitieuse, on n’augmentera pas forcément le taux d’emploi en France – quelques dizaines ou centaines de milliers d’emplois peuvent au mieux être créés.
Mais une projection de la direction d’animation de la recherche, des études et des statistiques et de France Stratégie montre que, d’ici 2030, le taux d’emploi restera stable, car si l’on réindustrialise certains secteurs, les gains de productivité continueront de réduire l’emploi industriel dans d’autres. L’industrie ne suffira pas à fournir de bons emplois à la classe moyenne. Elle joue cependant un rôle majeur dans certaines zones d’emploi éloignées des zones métropolitaines.
La France est-elle vraiment en train de se réindustrialiser ?
Les indicateurs sont ambigus. Nous avons connu une période de déclin très significatif de l’emploi industriel et de la part de l’industrie dans le PIB depuis les années 1980 jusqu’à la première décennie du 21e siècle.e siècle. Depuis une dizaine d’années, nous vivons une stabilisation plutôt qu’une réindustrialisation, même si 130 000 emplois ont été créés dans l’industrie depuis 2017, notamment dans le secteur agroalimentaire. Mais la production industrielle reste inférieure à son niveau de 2019, avant la crise du Covid-19, et la productivité de l’industrie française est en baisse, ce qui s’explique par le type d’emplois qui ont été créés et qui ne sont pas forcément dans des secteurs industriels à forte valeur ajoutée. Avant de parler de réindustrialisation, il faut se demander de quelle industrie nous avons besoin en France, alors que la géopolitique mondiale et la crise climatique changent toutes les grilles de lecture.
La réindustrialisation suit-elle une stratégie ?
La lutte contre la désindustrialisation a commencé sous la présidence de François Hollande avec le pacte de compétitivité des entreprises. Le premier quinquennat d’Emmanuel Macron a poursuivi cette dynamique avec la baisse de l’impôt sur les sociétés et des taxes de production. Les coûts de production ont baissé, sans faire de différence entre les secteurs et les entreprises.
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