Après des semaines de vives tensions et d’atermoiements au sein du gouvernement de Benyamin Netanyahou – dues notamment à la poursuite d’une guerre dévastatrice sans aucun plan ni vision pour le « lendemain » – l’ancien commandant en chef de l’armée et du cabinet de guerre Le ministre centriste Benny Gantz a annoncé dimanche 9 juin sa démission, ainsi que celle de deux ministres de son parti.
Le Premier ministre Benjamin Netanyahou « nous empêche d’avancer vers une vraie victoire » dans la guerre qui oppose depuis neuf mois l’Etat hébreu au Hamas, a-t-il déploré. “C’est pourquoi nous quittons aujourd’hui le gouvernement d’urgence le cœur lourd mais sans regrets »a-t-il ajouté, faisant référence aux deux autres ministres qui ont démissionné de son parti, Gadi Eizenkot et Chili Tropper.
Quelques minutes après cette annonce, le Premier ministre a tenté, en vain, de convaincre son rival de revenir sur sa décision. « Israël est engagé dans une guerre existentielle sur plusieurs frontsil a écrit sur X. Benny, ce n’est pas le moment d’abandonner la bataille, c’est le moment d’unir nos forces.
מדינת ישראל כולה ליוותה בכאב ובהצדעה את גיבור ישרא ל ארנון זמורה ל.
ישראל נמצאת במלחמה קיומית בכמה חזיתות. Eh bien, vous êtes en train de vous occuper d’eux – vous êtes en train de vous occuper de vous.
N’hésitez pas à nous contacter.
דלתי…
— Benjamin Netanyahu – בנימין נתניהו (@netanyahu) 9 juin 2024
« Virage serré à droite »
Le départ des trois ministres « ne fera pas tomber la coalition » au pouvoir mais pourrait faire de Netanyahu “plus dépendant de ses alliés d’extrême droite”, considère, pour sa part, Poste de Jérusalem.
En effet, le gouvernement conserve toujours une majorité de 64 sièges sur les 120 membres de la Knesset, ce qui garantit sa stabilité. Mais, comme le souligne le quotidien de droite israélien, cela ne fera que renforcer la position des ministres d’extrême droite Itamar Ben Gvir et Bezalel Smotrich lors des négociations sur un échange d’otages et un éventuel cessez-le-feu à Gaza. Ils “Ils utiliseront probablement également leur influence pour pousser à des actions agressives contre l’Autorité palestinienne en Cisjordanie et exiger une voix au sein du cabinet de guerre”, ajoute Avant, publication de référence de l’intelligentsia juive américaine.
Il faut s’attendre à ce que le gouvernement “prendre un virage serré à droite” dans un futur proche, craint Noga Tarnopolsky, une journaliste vivant en Israël citée par En avant. « Nous entrons dans une phase encore plus instable »assure-t-elle.
Mais pour le journaliste de Ha’Aretz Yossi Verter, cela n’a rien de surprenant ni d’inquiétant. L’apparent “unité nationale” a toujours été une fiction, écrit-il dans le quotidien israélien de centre-gauche. Même lorsque Gantz et Eisenkot faisaient partie du cabinet d’urgence national, le véritable pouvoir restait entre les mains de Ben Gvir et Smotrich.
“Il était temps. Gantz et Eisenkot n’avaient aucun poids pour contrer l’empiètement de Tsahal
dans le bourbier de Gaza, l’absence de stratégie concrète pour “le lendemain” (…) le report sine die de la normalisation avec l’Arabie Saoudite et, enfin, l’anarchie qui règne en Cisjordanie (…), analyse Yossi Verter. Désormais, le gouvernement Netanyahu a retrouvé sa taille initiale (64 députés sur 120) et ne peut plus se cacher derrière la feuille de vigne que lui propose le camp étatique.»
Vers un isolement interne et international ?
Selon AvantLe départ de Gantz risque néanmoins d’accroître la pression américaine et internationale sur Netanyahu.
« Le gouvernement perd le bouclier protecteur offert par Gantz »déclare Dan Arbell, chercheur au Centre d’études israéliennes de l’Université américaine. « Cela le mettra en position d’être scruté de près pour détecter les faux pas et les erreurs de calcul et augmentera la possibilité d’une action internationale. »
Cette démission risque aussi d’accroître la pression de l’intérieur et d’affaiblir encore davantage la coalition au pouvoir, estime Nahum Barnea dans le quotidien. Yediot Aharanot : “Les fissures qui ont commencé à apparaître dans les forces de réserve, ainsi que dans l’armée d’active, vont se creuser (…) Notre gouvernement de droite et d’extrême droite devra faire face seul à la colère des familles et peut-être qu’il a gagné.” Nous ne survivrons pas si Ben Gvir et Smotrich continuent à diriger.»