M.Mais où sont passées les douceurs printanières ? 3°C à Paris, 4°C à Bordeaux, 3°C à Lyon, -1°C à Aurillac et jusqu’à -4°C en plaine, les températures ce lundi matin étaient dignes de fin février. Une “fraîcheur (…) remarquable”, note la chaîne Météo. La Bretagne, le Limousin, les plaines du sud-ouest, ainsi qu’un couloir allant de l’Auvergne aux Ardennes étaient en proie aux gelées ce lundi matin. De quoi inquiéter les viticulteurs et producteurs de fruits de ces régions.
Pour Jérôme Volle, vice-président de la FNSEA et vigneron en Ardèche, le pire est attendu pour les nuits à venir, jusqu’à jeudi, avec la crainte de voir dans plusieurs régions la perte de « la totalité de la récolte ». « En tant que vigneron, les prochains jours sont extrêmement stressants : il y va de la perte potentielle de la totalité de notre récolte. » « Nous sommes en alerte, car il faut absolument pouvoir sauver nos récoltes », Françoise Roch, présidente de la Fédération nationale des producteurs de fruits (FNPF) et arboriculteur à Moissac, dans le Tarn-et-Garonne.
Des parcelles déjà détruites dans le Var, le Vaucluse et Gaillac
Plusieurs régions ont déjà été durement touchées par la baisse des températures. Selon Jérôme Volle, dans le Var, le Vaucluse et Gaillac, certains producteurs ont déjà perdu la totalité de leur récolte suite aux gelées du week-end dernier. Une catastrophe pour ces agriculteurs, qui voient leur chiffre d’affaires prévisionnel fondre comme neige au soleil. D’autant qu’il est parfois compliqué et coûteux de lutter contre le gel. « Malheureusement, dans ma région, nous disposons de peu de tours antigel ou d’autres moyens de lutter contre le grand froid. On espère que le vent restera présent», souffle Jérôme Volle. Ce matin, l’Ardéchois a enregistré -1°C sur sa parcelle la plus exposée au gel.
LIRE AUSSI « Une crise sans précédent » : le SOS des viticulteurs du SudD’autres agriculteurs ont investi massivement dans des tours antigel, des éoliennes qui permettent de gagner quelques degrés, dans des bougies antigel ou enfin dans des systèmes d’irrigation qui permettent de mettre les bourgeons sous abri. Or, selon Françoise Roch, les aides accordées pour l’achat de ces appareils relativement coûteux « sont extrêmement faibles » et « insuffisantes ».
« Il suffit d’une demi-heure pour perdre un an de récolte »
Les conséquences des gelées de fin avril risquent d’être catastrophiques pour le secteur, d’autant que les bourgeons et les fleurs se développaient déjà tôt. Si la France connaît chaque année des gelées durant cette période, “ce qui rend cet épisode plus exceptionnel, c’est qu’avant cette baisse des températures, nous avons connu une période de températures douces, voire chaudes, ce qui pose forcément un problème dans l’agriculture”, a confié à le Indiquer Météo France.
« Nous étions dans une période où, malheureusement, il faisait très chaud en mars, ce qui faisait que les pousses se développaient très rapidement. Avec une floraison plutôt précoce, nous pensions que la récolte de cette année serait positive. Mais c’était avant l’annonce du gel», explique Jérôme Volle. En effet, une fois le bourgeon ou la fleur noircis par le gel, le raisin ou le fruit ne peuvent pas, ou difficilement, se développer. « Il suffit d’une demi-heure pour perdre un an de récolte », souligne le vigneron.
LIRE AUSSI “Pourquoi je vais bloquer l’A9” : Anthony, vigneron, rejoint le mouvement paysanPour l’instant, difficile de connaître l’ampleur des dégâts sur les vignes et les cultures fruitières, d’autant que les deux prochaines nuits s’annoncent tout aussi froides. “Il faudra attendre vendredi pour avoir une vision économique plus précise du marché”, précise Jérôme Volle. Pour mémoire, en 2021, d’importantes gelées à la même période avaient réduit à zéro les récoltes de certains producteurs, affectant 80 % du vignoble français. Un scénario cauchemardesque que les vignerons veulent éviter à tout prix. « A ce stade, il reste un peu de raisin et on espère vraiment qu’il en restera après ces gelées », précise le vigneron ardéchois. D’autant que la perte de la récolte entraînera à la fois une baisse du chiffre d’affaires des producteurs, mais pourrait aussi relancer l’inflation de certains produits.
Selon Météo-France, les températures devraient se rapprocher des normales saisonnières ce week-end. Mais les producteurs continueront de vivre avec une épée de Damoclès au-dessus de la tête à l’approche des traditionnelles nuits froides des Saints de Glace, qui auront lieu les 11, 12 et 13 mai.