« Tant que ce mot – « antifascisme » – ne sera pas prononcé par ceux qui nous gouvernent, le spectre du fascisme continuera de hanter la maison de la démocratie italienne. » C’est la conclusion du discours que l’écrivain Antonio Scurati a été invité à prononcer à la télévision publique italienne à l’approche des célébrations du 25 avril, anniversaire de la libération du nazisme et du fascisme. L’intervention de l’auteur de la série de romans M, consacré à la vie de Benito Mussolini, a été annulé. S’en est suivi un scandale autour d’un acte apparent de censure qui a réveillé un débat persistant sur la mémoire historique italienne.
Depuis l’arrivée à une position dominante – celle de la présidence du conseil, de Giorgia Meloni – d’une famille politique dont les racines remontent à l’histoire du régime fasciste, cette vieille blessure est devenue plus douloureuse. Son retour résulte de la collision entre une culture politique antifasciste, fondement de la République italienne, et la tradition d’une droite radicale longtemps reléguée en marge de la vie démocratique.
L’antifascisme tel que célébré par Antonio Scurati est l’héritage d’une victoire remportée avec les Alliés par les résistants italiens contre les fascistes de la République sociale italienne, un régime fantoche placé sous la férule de l’occupant allemand. Communistes, socialistes, catholiques ou libéraux, les vainqueurs de cette guerre civile menée dans le nord de l’Italie entre 1943 et 1945 furent aussi les architectes du compromis politique qui aboutit à la Constitution républicaine de l’Italie. Force dominante de la résistance, les communistes italiens sont alors exclus du pouvoir en raison de l’alignement atlantique de l’Italie.
Événements contemporains
Ils ont pourtant réussi à s’approprier l’histoire de l’antifascisme et à construire autour de sa mémoire une culture politique puissante qui leur a survécu. La gauche radicale des années 1970 et ses extensions terroristes l’ont revendiqué. Ses manifestations contemporaines vont de Bella Ciao chanté avec ferveur lors des rassemblements de gauche aux œuvres commémoratives des intellectuels, y compris l’action de l’Association nationale des partisans d’Italie, qui célèbre cette année le 25 avril avec le slogan « Vive la République antifasciste ».
Les vaincus de la guerre, constitués en parti politique avec le Mouvement Social Italien (MSI) en 1946, ont construit une autre mémoire, imprégnée d’un certain romantisme de la défaite. « Les néofascistes ont développé l’idée qu’ils représentaient le camp de la loyauté, celle due au régime de Mussolini et à l’allié allemand dans une Italie qui s’était donnée à l’ennemi », explique Giovanni Orsina, historien de la droite italienne à l’université Luiss Guido-Carli de Rome. Exclus de « l’arc constitutionnel », ils deviennent les porte-drapeaux de l’anticommunisme sans parvenir à peser sur le jeu politique.
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« Tant que ce mot – « antifascisme » – ne sera pas prononcé par ceux qui nous gouvernent, le spectre du fascisme continuera de hanter la maison de la démocratie italienne. » C’est la conclusion du discours que l’écrivain Antonio Scurati a été invité à prononcer à la télévision publique italienne à l’approche des célébrations du 25 avril, anniversaire de la libération du nazisme et du fascisme. L’intervention de l’auteur de la série de romans M, consacré à la vie de Benito Mussolini, a été annulé. S’en est suivi un scandale autour d’un acte apparent de censure qui a réveillé un débat persistant sur la mémoire historique italienne.
Depuis l’arrivée à une position dominante – celle de la présidence du conseil, de Giorgia Meloni – d’une famille politique dont les racines remontent à l’histoire du régime fasciste, cette vieille blessure est devenue plus douloureuse. Son retour résulte de la collision entre une culture politique antifasciste, fondement de la République italienne, et la tradition d’une droite radicale longtemps reléguée en marge de la vie démocratique.
L’antifascisme tel que célébré par Antonio Scurati est l’héritage d’une victoire remportée avec les Alliés par les résistants italiens contre les fascistes de la République sociale italienne, un régime fantoche placé sous la férule de l’occupant allemand. Communistes, socialistes, catholiques ou libéraux, les vainqueurs de cette guerre civile menée dans le nord de l’Italie entre 1943 et 1945 furent aussi les architectes du compromis politique qui aboutit à la Constitution républicaine de l’Italie. Force dominante de la résistance, les communistes italiens sont alors exclus du pouvoir en raison de l’alignement atlantique de l’Italie.
Événements contemporains
Ils ont pourtant réussi à s’approprier l’histoire de l’antifascisme et à construire autour de sa mémoire une culture politique puissante qui leur a survécu. La gauche radicale des années 1970 et ses extensions terroristes l’ont revendiqué. Ses manifestations contemporaines vont de Bella Ciao chanté avec ferveur lors des rassemblements de gauche aux œuvres commémoratives des intellectuels, y compris l’action de l’Association nationale des partisans d’Italie, qui célèbre cette année le 25 avril avec le slogan « Vive la République antifasciste ».
Les vaincus de la guerre, constitués en parti politique avec le Mouvement Social Italien (MSI) en 1946, ont construit une autre mémoire, imprégnée d’un certain romantisme de la défaite. « Les néofascistes ont développé l’idée qu’ils représentaient le camp de la loyauté, celle due au régime de Mussolini et à l’allié allemand dans une Italie qui s’était donnée à l’ennemi », explique Giovanni Orsina, historien de la droite italienne à l’université Luiss Guido-Carli de Rome. Exclus de « l’arc constitutionnel », ils deviennent les porte-drapeaux de l’anticommunisme sans parvenir à peser sur le jeu politique.
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