À Echirolles, le désarroi des habitants évacués d’un immeuble utilisé comme lieu de trafic de drogue

Dans l’immeuble dégradé qui sert de lieu de trafic de drogue, à Echirolles, la police municipale frappe aux portes des appartements. Les habitants doivent être recensés, sommés de quitter les lieux d’ici vendredi, pour un immeuble “resécurisé”.

Les feuilles A4 sur lesquelles est imprimé l’arrêté municipal s’affichent impeccablement sur les murs décolorés de l’immeuble “Le Carrare”. L’évacuation de cette ancienne résidence étudiante transformée en logements a commencé mardi.

La mairie de cette commune limitrophe de Grenoble a déclaré les lieux “temporairement inhabitables” : des rapports d’expertise font état d’un “risque incendie et électrique” qui ne garantit plus la sécurité des riverains.

Aux différents étages, plus aucune armoire électrique n’a ses portes en bois. Les trafiquants de drogue qui utilisent les lieux comme point de vente les brûlent dans des braseros pour se chauffer, a expliqué la police lors d’une visite jeudi avec des journalistes.

Les trafiquants se branchent directement sur le tableau électrique pour obtenir de l’électricité. Souvent, les fils sont laissés à découvert.

La cage d’escalier est couverte de graffitis. Par une porte ouverte, on aperçoit un amas d’affaires, matelas, linge, sacs de courses… La veille, la police y avait trouvé un “squatteur”, “peut-être un guetteur, hébergé gratuitement en échange”.

Certaines portes de logements vides ont été scellées par la copropriété. La mairie “a recensé une vingtaine d’appartements occupés”, sur 82 logements, et 12 à 15 personnes qui devront être relogées.

– “Confession d’échec” –

Depuis mardi, la police municipale vient « s’assurer que tout le monde a été informé de l’arrêté » qui leur donne 72 heures pour repartir.

“Je n’ai aucune idée de ce qui va se passer, de comment je vais m’en sortir”, s’inquiète Saïd, un ouvrier de 40 ans qui vit là depuis cinq ans. Il a emballé quelques cartons pendant la nuit, notamment ses livres.

Il se dit soulagé de partir : le loyer est bas, mais il préfère ne pas laisser la porte ouverte. Il est aussi très inquiet quant aux possibilités de relogement.

“J’en ai parlé à des voisins, je ne vois pas pourquoi c’est à nous de déménager”, confie-t-il. Pour lui, c’est “un aveu d’échec” face à des trafiquants “qui ont gagné depuis longtemps”.

La remise en sécurité devrait prendre trois semaines. Les locaux seront scellés et sécurisés pendant les travaux, qui seront à la charge de la copropriété, qui devra également aider les locataires à trouver un nouveau logement.

Rachid, 24 ans, tire une petite valise à roulettes. « Trois jours, ce n’est pas suffisant » pour se préparer, regrette-t-il. Un autre locataire du même âge, Abdel, se plaint également. « Avant de procéder à une évacuation, il faut une solution. » Il aimerait déménager.

« Nous ne sommes pas responsables de cela », souligne également Kadriye, 65 ans, locataire depuis 4 mois. Elle a rempli une demande à la mairie, elle devrait savoir vendredi où elle pourra déposer ses affaires.

“Personne ne sera laissé dehors à la fermeture de l’immeuble”, insiste la maire communiste Amandine Demore. La mairie reçoit les habitants et “les accompagnera vers leur logement d’urgence pour les prochains jours”, assure l’édile.

– “Harceler les dealers” –

Elle-même a constaté les dégâts sur le bâtiment qu’elle fréquente régulièrement. Et pour cause : il est situé de l’autre côté de la rue, quasiment en face de la mairie et d’un commissariat de police.

Mme Demore réclame « un commissariat de police à part entière » pour Echirolles, ainsi que la poursuite de la mise à disposition de moyens pour lutter contre le trafic de drogue.

Depuis le début de l’année, à Echirolles et dans l’agglomération grenobloise, une vingtaine d’épisodes de violences par armes à feu liées à des trafics ont été recensés.

Un copropriétaire, qui a requis l’anonymat, regrette l’intervention tardive des pouvoirs publics, alors que le point de deal existe “depuis 2020” selon lui.

“On va harceler les dealers, c’est le but. Ils restent là comme si de rien n’était”, explique Gilles Bonaventura, directeur de la police municipale.

La veille, quatre hommes âgés de 16 à 48 ans avaient été interpellés dans l’un des appartements pour “infraction à la législation sur les stupéfiants”, selon une source policière.

« Nous reviendrons pour faire pression sur les concessionnaires, pour leur faire comprendre qu’ils ne sont pas chez eux », assure M. Bonaventura.

mla/epe/cbn

Anna

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