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A l’hôpital, le secteur des greffes également en danger

La crise du secteur hospitalier en France a également un impact sur les greffes de rein avec donneur vivant, où l’attente peut durer plusieurs années. Ce type d’opération, qui doit être planifiée et réalisée dans un centre hospitalier universitaire, prend parfois du retard.

Ils sont assis tout près l’un de l’autre dans la salle de consultation du CHU (centre hospitalier universitaire) de Poitiers. Jacky, 75 ans, a un cathéter au bras pour faciliter les prélèvements sanguins à effectuer le matin ; il fera don d’un rein dans quelques mois à sa femme, Nadia, 73 ans, qui souffre d’insuffisance rénale chronique en phase terminale. ” C’est arrivé tout de suite, dès que nous avons su que nous pouvions le faire ! », explique-t-il, modestement. ” Après 54 ans de mariage, il m’offre encore un beau cadeau ! », plaisante Nadia. ” C’est un beau cadeau d’amour. Nous sommes deux dans cette lutte contre la maladie », ajoute-t-elle avec gratitude.

La récolte et le repiquage devraient avoir lieu en juin, pas avant. Leur parcours a été freiné par les difficultés du système de santé. ” Notre seul regret dans cette aventure est le temps d’attente pour réaliser les examens à cause du désert médical : plus de six mois ! C’est énorme. La dernière, une scintigraphie rénale : deux mois et demi pour avoir ce rendez-vous, en ville cependant… “, elle explique. Et ces examens sont fondamentaux.

Notre priorité est de ne pas nuire au donneur », nous raconte Nathalie Charge, l’infirmière coordonnatrice des transplantations rénales. ” Si on prélève un rein sur un donneur vivant, c’est qu’il est en parfaite santé et on est sûr qu’en lui retirant un rein, on ne le mettra pas en danger pour sa vie future. C’est tout l’objet des examens, qui peuvent s’étaler sur plusieurs mois, faute de moyens humains, que ce soit à l’hôpital ou en ville. »

Accès au bloc compliqué

Autre difficulté parfois : trouver un créneau de salle d’opération pour programmer le prélèvement et la greffe le même jour. Selon le professeur Antoine Thierry, néphrologue et chef du programme de transplantation rénale au CHU de Poitiers, « La crise hospitalière se manifeste par des difficultés concernant le personnel hospitalier, notamment dans les domaines des infirmières d’anesthésie et de bloc opératoire. Le manque de ce personnel complique l’accès au bloc opératoire et retarde les délais de programmation de nos greffes avec donneurs vivants. »

Cependant, retarder la greffe peut présenter un risque pour le patient, même lorsqu’il est sous dialyse, un traitement lourd destiné à compléter la fonction rénale. ” La principale conséquence est le risque que, si le délai de prise en charge avec un donneur vivant s’allonge, l’état de santé du receveur se détériore, même s’il est sous dialyse. Cependant, vous pouvez être exposé à un certain nombre de complications lors de la dialyse et donc, a fortioriune perte de chances : on peut avoir un accident cardiovasculaire, des problèmes infectieux qui vont compliquer, retarder, rendre plus risquée cette transplantation”, rappelle le professeur Thierry.

Les problèmes du système de santé pèsent aussi parfois sur le suivi des patients greffés. Il y a près de vingt ans, et après plusieurs années éprouvantes en dialyse, Éric, aujourd’hui âgé de 57 ans, recevait un rein d’un donneur décédé. Puis, lorsque le greffon a cessé de fonctionner, en 2017, son frère lui a donné un rein. ” Chaque année, nous devons faire le point sur nous-mêmes. » il explique. ” On fait un bilan dermatologique, dentaire, cardiologique, on fait une échographie Doppler du greffon, c’est à dire une échographie pour voir si le greffon est bien irrigué, pour voir s’il est en bon état, etc. On fait aussi un x -rayon des poumons. ” Selon lui, ” pour tous ces examens, c’est de plus en plus difficile d’obtenir un rendez-vous ! »

Alain, quatre ans son aîné, nous explique sa démarche : « Eric, je lui avais déjà proposé la première fois, car voir son frère dialysé et pas en forme, c’est dur. Et là, je ne voulais pas qu’il reparte en dialyse. C’est aussi une opportunité, d’une certaine manière, de pouvoir donner parce qu’on est en bonne santé et qu’on répond aux critères… Comme on ne peut vivre qu’avec un seul rein, ce n’est pas un problème. » « J’avoue que c’est un merveilleux cadeau… En plus, comme c’était bientôt Noël, il est devenu mon Père Noël maintenant ! C’était le 14 décembre 2017 ! C’est une des dates dont on se souvient, c’est une nouvelle naissance ! », ajoute, ému, son jeune frère.

La transplantation est le meilleur traitement de l’insuffisance rénale terminale pour le patient. Et le moins cher pour la communauté.

Anna

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