Alors qu’en est-il de la sculpture hyperréaliste cette année en France, même si cette forme d’art y a jusqu’à présent été très peu exposée ? Trois expositions se sont succédées depuis début 2023 : après « Hyperréalisme. Ceci n’est pas un corps », qui se terminait début mars au musée Maillol, à Paris, « Hypersensible. Regard sur la sculpture hyperréaliste » s’est ouverte début avril au musée des Arts de Nantes, tandis que la Fondation Cartier à Paris consacrera son exposition estivale au sculpteur britannique Ron Mueck, spécialiste du genre, à partir du 8 juin. .
« Lorsque nous avons lancé l’idée d’une exposition sur ce sujet, il y a plus de deux ans, nous savions qu’une exposition était en préparation en Belgique, mais nous ne savions pas qu’elle allait aussi voyager en France », explique Sophie Lévy, conservatrice du musée des Arts de Nantes, en référence à l’exposition au musée Maillol. Côté nantais, l’un des déclics a été le fait que l’institution possède, dans ses collections, quelque chose d’unique en France, une installation de l’Américain Duane Hanson (1925-1996), le pionnier du genre : Dame du marché aux puces (1990), une femme assise vendant un bric-à-brac de peintures à même le sol, échelle 1.
En 2018, l’œuvre voyage au Metropolitan Museum of Art de New York pour une exposition sur des sculptures imitant la réalité depuis l’Antiquité. A cette occasion, le réalisateur avait été frappé par le silence et la fascination des visiteurs. Là aussi, l’exposition, qui déploie une quarantaine de pièces d’une grande variété technique (résine, fibre de verre, silicone, bronze, porcelaine ou grès peint, etc.) dans le vaste patio central du musée, se visite dans une ambiance spontanément feutrée, malgré le grand nombre de visiteurs.
Étrangeté du mimétisme
« Avec Katell Jaffrès, la commissaire, nous nous sommes demandé pourquoi, entre l’apparition de l’hyperréalisme dans les années 1960, aux États-Unis, dans un contexte de transformation et de crise sociales et politiques, et une résurgence au tournant du XXIe siècle, il y avait eu un trou des années 1970 jusqu’aux années 1990, dit Sophie Lévy. Elle réapparaît après des décennies dominées par l’abstraction, avec un retour sans concession à la représentation des femmes, des hommes et des objets du quotidien. »
Quand l’exposition présentée à Maillol détaille les grandes typologies du genre (nus, messages politiques, etc.), l’exposition nantaise se fait plus philosophique, comme pour faire écho à l’hypersensibilité exprimée par les œuvres. Loin d’être exhaustive, les productions de seulement onze artistes internationaux (dont deux français, Gilles Barbier et Daniel Firman) issus des deux générations d’artistes, dont la pratique est exclusivement hyperréaliste, sont présentées. L’accent est mis sur le corps humain, à l’exception des plantes sauvages de Tony Matelli, qui semblent pousser dans des interstices imaginaires, et apportent un petit contrechamp à cette foule de corps vaguement oppressante.
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Lemonde Arts