La dette publique du Royaume-Uni a atteint en août un niveau jamais vu depuis les années 1960 : 100 % du produit intérieur brut (PIB), mettant sous pression le gouvernement travailliste à quelques semaines de la présentation de son premier budget, qu’il promet difficile.
Le parti travailliste est arrivé au pouvoir début juillet après une campagne axée sur la « discipline budgétaire de fer », alors que les finances publiques étaient alourdies par le Covid et la crise énergétique.
Alors que l’exécutif impute à 14 années de gouvernements conservateurs la responsabilité d’un « trou noir » de 22 milliards de livres, le Premier ministre Keir Starmer a déjà prévenu que son premier budget, attendu le 30 octobre, sera « douloureux », avec probablement des coupes dans les dépenses publiques et des hausses d’impôts.
Le parti travailliste a déjà décidé de mettre fin au chèque énergie pour quelque dix millions de retraités, une décision qui a été fortement critiquée.
Mais après avoir “hérité d’une économie qui ne fonctionnait pas”, le gouvernement est contraint de prendre “des décisions difficiles pour réparer les fondations”, a résumé vendredi Darren Jones, secrétaire en chef du Trésor britannique.
À l’approche du redoutable budget, le moral des Britanniques a connu une forte baisse en septembre, selon l’indice de confiance des consommateurs de référence de l’institut GfK.
« Les consommateurs attendent avec nervosité les choix budgétaires du 30 octobre », résumait vendredi Neil Bellamy, directeur des études de marché chez GfK.
– Trajectoire « insoutenable » –
La dette publique britannique, qui s’élève à 2.546 milliards de livres (un peu plus de 3.000 milliards d’euros) selon les chiffres publiés vendredi, avait déjà dépassé 100% du PIB selon les chiffres provisoires publiés l’an dernier, mais avait depuis été revue à la baisse.
Alors que la dette publique flirte depuis des mois avec ce seuil symbolique, le chiffre publié vendredi est également “une estimation très provisoire”, a prévenu vendredi l’Office national des statistiques (ONS) dans un communiqué.
D’autres pays sont confrontés à une dette qui s’envole. En France, elle a augmenté massivement depuis la crise sanitaire et a grimpé à plus de 110% du PIB à la fin du premier trimestre, un taux dépassé dans l’UE uniquement par l’Italie (près de 138% du PIB) et la Grèce (près de 160%).
La dette du Royaume-Uni est sur une trajectoire qui risque de devenir « insoutenable », a averti la semaine dernière le prévisionniste budgétaire du gouvernement (OBR), affirmant que si le pays continue dans la direction actuelle, elle « triplera presque » dans les décennies à venir.
Le déficit britannique a continué de diminuer en août, selon les chiffres publiés vendredi par l’ONS. Au total, depuis le début de l’année budgétaire britannique début avril, le Royaume-Uni a emprunté 6,2 milliards de livres (7,4 milliards d’euros) de plus que ce que l’OBR avait prévu.
– Rebond de la croissance –
Ce nouveau dérapage s’explique par des “dépenses plus élevées” dues à “la revalorisation des prestations sociales et à l’augmentation des coûts de fonctionnement et des salaires” dans les services publics, a résumé Grant Fitzner, économiste en chef de l’ONS, sur le réseau social X.
Depuis son arrivée au pouvoir, le nouveau gouvernement travailliste a conclu des accords d’augmentation des salaires dans plusieurs secteurs, mettant fin aux grèves qui se poursuivaient depuis quelques années, du rail à la santé.
Si les chiffres de vendredi “mettent en évidence le contexte budgétaire difficile” auquel est confronté le gouvernement, ce dernier pourra compter sur “l’amélioration du contexte économique”, note Alex Kerr, analyste chez Capital Economics.
Le PIB, par exemple, a rebondi au début de l’année après une légère récession fin 2023 – même si la croissance a tendance à ralentir depuis le début de l’été.
Le volume des ventes au détail au Royaume-Uni a augmenté de 1 % en août par rapport au mois précédent, dépassant les attentes grâce notamment à un temps plus doux, selon des chiffres distincts publiés vendredi par l’ONS.
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