Faustine Bas-Defossez traite des questions liées à la nature, à la santé et à l’environnement au sein du Bureau européen de l’environnement, une fédération regroupant près de 200 ONG. Lors de la dernière législature du Parlement européen, elle a pu constater le travail des lobbys industriels pour affaiblir le Green Deal européen.
Depuis les dernières élections européennes de 2019, l’activité des lobbys industriels a-t-elle été plus importante que d’habitude ?
Oui, leur activité était intense parce qu’ils sentaient l’importance du moment. Le Green Deal est un projet ambitieux et systémique destiné à mettre l’Union européenne sur la voie nécessaire vers la neutralité carbone en 2050. Et il nécessite une action dans tous les secteurs. Avec l’apparition du Covid-19, certains lobbies, comme Business Europe, qui regroupe de nombreux industriels, ont tenté de torpiller l’ensemble du pacte en affirmant que la priorité serait désormais de soutenir les entreprises pendant des années. Cela a échoué et la crise a au contraire permis de verdir les économies avec les différents plans de relance.
De nombreuses entreprises se sont également engagées dans cette voie, car elles connaissent les risques économiques que les problèmes climatiques et environnementaux font peser sur elles à long terme. Il y a eu une seconde offensive contre le Green Deal, plus agressive, après le déclenchement de la guerre en Ukraine, en 2022, défendant à nouveau l’idée que l’urgence était ailleurs, puis s’effritant après la crise agricole et la perspective des prochaines élections européennes, à partir du 6 juin. à 9.
Sur quels textes l’action des lobbys a-t-elle semblé la plus efficace ?
Le volet climatique du pacte vert, le « Fit for 55 », a été adopté sans trop de problèmes. La dynamique des élections de 2019, qui se sont déroulées au milieu de grandes marches de jeunes pour le climat, et le profil d’Ursula von der Leyen (le président de la Commission européenne) a évoqué ce sujet. Par la suite, lorsqu’on est entré dans des mesures sectorielles ou sur des thèmes précis, les choses se sont compliquées, les progrès étant parfois tués dans l’œuf.
La révision du règlement Reach (évaluation des risques des substances chimiques) n’a même pas été présenté après un intense travail de lobbying de la part des fabricants de produits chimiques allemands. Idem pour la loi-cadre sur les systèmes alimentaires durables, qui aurait aussi été bénéfique aux agriculteurs, notamment sur la question des prix… Sur les emballages plastiques, sur la stratégie globale « De la ferme à l’assiette », sur le texte de restauration de la nature, Des lobbies se sont déployés en contactant des députés d’extrême droite, du Parti populaire européen (PPE, centre et droite) et d’autres formations. Plus nous nous rapprochions des prochaines élections, plus d’autres événements prenaient de l’importance, plus les arguments des lobbies sur la nécessité d’un statu quo se répandaient au sein de la Commission ou du Parlement.
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