Manger des éléphants ? « Pour moi, ça n’a aucun sens. Personnellement, je n’en ai jamais mangé et je n’en ai jamais entendu parler. Ce serait comme manger un lion… » Bekezela Maplanka, leader de l’opposition dans le district de Bulilima, est en première ligne face à l’impact de la sécheresse qui touche cette région rurale du sud-ouest du Zimbabwe.
Ici, les récoltes de cette saison ont été anéanties par le manque de pluie et le bétail tombe comme des mouches alors que le phénomène El Niño, qui touche certaines régions d’Afrique australe, exacerbe les effets du changement climatique. « Les gens ont faim »poursuit la candidate malheureuse aux élections de 2023. Elle ne cache cependant pas son étonnement face à la solution avancée par le gouvernement pour répondre à la situation : abattre 200 éléphants et distribuer leur viande aux populations les plus vulnérables.
Car le Zimbabwe ne sait plus quoi faire de ses pachydermes. Alors que la population d’éléphants de savane a diminué de 60 % au cours des cinquante dernières années sur le continent africain, celle du Zimbabwe a pratiquement doublé depuis les années 1980, passant de 50 000 à près de 100 000 individus, selon ZimParks, l’autorité zimbabwéenne de protection et de gestion de la faune sauvage. Loué pour ses efforts en matière de protection de l’espèce, le pays martèle depuis des années qu’il n’a plus la capacité d’accueillir toutes ces bêtes.
« Le Zimbabwe compte plus d’éléphants que nos forêts ne peuvent en supporter »“C’est ce qu’a répété Sithembiso Nyoni, le ministre de l’Environnement, devant le Parlement le 11 septembre, avant d’évoquer l’idée de suivre l’exemple de la Namibie, qui a récemment annoncé l’abattage de 700 animaux sauvages, dont 83 éléphants, pour soulager la population confrontée à une sécheresse sans précédent depuis un siècle.
Une orientation rapidement confirmée par ZimParks, ce qui a provoqué la consternation de nombreuses associations de protection de la faune sauvage. « Cette décision risque de relancer le braconnage et le commerce illégal de l’ivoire, compromettant ainsi les progrès remarquables réalisés en matière de conservation de la faune sauvage. »Tennyson Williams, le directeur Afrique de l’ONG World Animal Protection, s’est particulièrement indigné dans un communiqué.
« C’est une fausse solution, nous avons 6 à 7 millions de personnes qui ont besoin d’aide alimentaire, 200 éléphants ne changeront rien. Il faut être honnête, cette décision n’a rien à voir avec la population »ajoute Farai Maguwu, directeur du Centre pour la gouvernance des ressources naturelles, une association zimbabwéenne défendant une gestion responsable des ressources naturelles, qui s’interroge sur les motivations du gouvernement.
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