Des fleurs d’un orange éclatant, presque incandescentes, envahissent la Une du dernier numéro du mensuel indien La caravane. Leurs ramifications, en forme de ronces, semblent renfermer une copie de la Constitution indienne. Le titre est affirmatif, explicite, catégorique : “La tyrannie va empirer.”
Car les fleurs en question sont des lotus, généralement associés à des idées de résilience et de pureté sous nos latitudes. Mais, dans l’Inde contemporaine, le lotus est devenu le symbole du Bharatiya Janata Party (BJP), du Premier ministre Narendra Modi, qui brigue un troisième mandat à l’issue des grandes élections législatives qui se déroulent en Inde jusqu’au 1er juin. .
« La consolidation de l’autocratie de Varna par lehindutva (L’idéologie nationaliste hindoue) détruit la République », précise l’éditorialiste Hartosh Singh Bal en page intérieure du magazine La caravane. LE Varna correspondent à quatre grandes castes liées à la tradition hindoue.
Officiellement aboli dans la république laïque indienne héritée de Gandhi, le système de Varna n’a jamais vraiment disparu. Pire, il a été en grande partie réhabilité, précisément par lehindoutva, l’idéologie du suprémacisme hindou, qui sert de doctrine au BJP, et de boussole pour la consolidation du pouvoir de Narendra Modi.
« Modi est le plus souvent attaqué sur son bilan en matière de gouvernance. En d’autres temps, ces échecs auraient suffi à renverser un gouvernement en place. Mais pourquoi aujourd’hui, presque personne ne croit que Modi va perdre le pouvoir ?
Une partie de la réponse, explique La Caravane, réside dans le braquage mené par le BJP au cours des dix dernières années pour contrôler les institutions qui font fonctionner la démocratie indienne. Cour suprême, commission électorale, agences antiterroristes… Ces éminents gardiens de la Constitution se sont transformés en chiens de garde du pouvoir en place.
Ainsi, explique le journal, toute critique du gouvernement Modi et de sa politique nationaliste hindoue, particulièrement discriminatoire à l’égard des minorités religieuses, est désormais assimilée à des critiques contre l’hindouisme, contre la nation, contre l’Inde.
En tant que tel, La Caravane, majoritairement lu par une élite éclairée en Inde, constitue une exception dans un paysage médiatique qui, par l’intermédiaire de propriétaires de médias affiliés au Premier ministre, est largement gagné à Narendra Modi. « Lorsqu’il s’agit de faire un choix dans l’isoloir, déplore le magazine, il semble que la question de l’identité, en particulier l’identité hindoue omniprésente, l’emportera sur toutes les autres considérations.
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