Coupable ou non coupable ? Depuis des années, l’Etat et les collectivités locales se livrent une guerre d’usure autour des finances : chacun accuse l’autre d’avoir jeté des milliards par les fenêtres. La guérilla a repris début septembre, lorsque les deux ministres démissionnaires Bruno Le Maire (Economie) et Thomas Cazenave (Comptes publics) ont prévenu les parlementaires que la« augmentation extrêmement rapide des dépenses des collectivités locales » devrait peser sur les finances du pays à hauteur de 16 milliards d’euros en 2024.
Les deux ministres ne font que répéter ce qu’Emmanuel Macron a dit en mai. Qu’importe. Le tollé est immédiat. « Une opération grossière de façade »dénonce le président socialiste de Meurthe-et-Moselle, Chaynesse Khirouni, qualifiant Bruno Le Maire « Joe le confond ». « Tactique agressive et dilatoire »dénonce le président de l’Association des maires de France (AMF), David Lisnard, maire (Les Républicains) de Cannes (Alpes-Maritimes). « Mensonge populiste »“Quelle est la réalité ?”, s’interroge la présidente de Régions de France, Carole Delga, également présidente (PS) de l’Occitanie.
Les collectivités locales ne représentent que 18 % des 1 608 milliards d’euros dépensés par les administrations publiques en 2023, selon l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) : 43 % ont été dépensés par la Sécurité sociale, et 39 % par l’État. Pour les collectivités locales, cela représente 316 milliards d’euros (avant consolidation comptable) : 250 milliards d’euros de fonctionnement, 66 milliards d’investissements. Soit environ 4 700 euros par Français.
Les recettes (306 milliards) qui permettent aux collectivités locales de couvrir ces dépenses sont de deux types. La moitié d’entre elles sont celles qu’elles collectent elles-mêmes (impôts locaux, tickets d’entrée aux piscines ou repas à la cantine). L’autre moitié est versée par l’État : la dotation globale de fonctionnement (27 milliards d’euros) ou des transferts fiscaux (comme la TVA, à hauteur de 52 milliards d’euros), par exemple.
Pour les dépenses de fonctionnement (salaires des personnels, achats d’énergie, maintenance, subventions…), c’est impossible. Contrairement à l’Etat et à la Sécurité sociale, les collectivités locales n’ont pas le droit d’emprunter pour financer leur fonctionnement courant. Elles doivent donc construire, sous l’œil vigilant du préfet et de la chambre régionale des comptes, des budgets équilibrés, voire « en suréquilibre » : les élus, généralement prudents dans leur gestion, dépensent moins qu’ils ne reçoivent et mettent de l’argent de côté.
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