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« Bruno Retailleau est totalement en phase avec les attentes du public »


LLe chef des Républicains au Sénat, nommé ministre de l’Intérieur le 21 septembre, incarne une ligne ferme sur l’immigration et la sécurité au sein du gouvernement. Mais ses positions sur l’immigration inquiètent la gauche. Michel Barnier a fixé la feuille de route : « Garantir la sécurité, maîtriser l’immigration et faire progresser l’intégration ». Mais Bruno Retailleau aura-t-il les moyens de répondre ?

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Oui, répond Guillaume Larrivé, proche du nouveau ministre et président de l’institut La France demain, le think tank de la droite républicaine. L’auteur deImmigration, l’heure des choix (éditions de l’Observatoire) lui donne quelques idées.

Le point : Bruno Retailleau, au ministère de l’Intérieur, est déjà contesté au sein même du gouvernement. A-t-il la garantie de pouvoir mener une politique ferme, avec l’aval du Premier ministre ?

Guillaume Larrivé : Le nouveau ministre de l’Intérieur n’a pas été nommé pour commenter l’actualité ni pour inaugurer des chrysanthèmes. Il ne cherchera pas non plus à se faire applaudir par une gauche pseudo-progressiste, ayant depuis longtemps oublié que l’ordre républicain est nécessaire à la paix civile, c’est-à-dire à l’exercice de nos libertés. Pour réussir, il a en main trois atouts décisifs.

D’abord, il a la confiance personnelle et politique du Premier ministre, car Michel Barnier l’a choisi pour maintenir une ligne claire et droite sous son autorité. Les décisions de Matignon compteront. Son deuxième atout est la solidité de son tempérament. Bruno Retailleau conçoit la politique comme une exigence éthique. Avec le soutien des parlementaires, des préfets fidèles et de solides collaborateurs, il saura manœuvrer tactiquement sans jamais perdre de vue son objectif stratégique. Troisième atout, enfin : le ministre de l’Intérieur est totalement en phase avec les attentes de l’opinion publique. Une très large majorité de Français, bien au-delà de ceux qui ont voté pour les partis membres de la coalition gouvernementale, réclament que la République rétablisse l’ordre et réduise l’immigration.

Une réforme de la Constitution est exclue, compte tenu de la configuration du Parlement. Que peut-elle faire ?

La configuration du Parlement est plus nuancée que vous ne le dites : si l’Assemblée nationale est un champ de mines, le Sénat est un pôle de stabilité. Mais vous avez raison sur un point : il n’y a pas aujourd’hui une majorité des trois cinquièmes au Congrès pour adopter une révision constitutionnelle qui redéfinirait le cadre juridique de la politique d’immigration. Ce sera un sujet déterminant pour l’après-élection présidentielle.

A court terme, pour obtenir des résultats, mon conseil est de privilégier les actions opérationnelles, par la voie réglementaire, la gestion administrative et la négociation diplomatique. Je vous donne quelques exemples. Plutôt que de s’enliser dans une discussion législative sur l’aide médicale d’Etat, nous pouvons prendre des mesures d’urgence par décret, dès octobre, pour durcir les critères d’accès à l’AME et réduire son coût budgétaire. De même, pour commencer à réduire sensiblement les flux d’immigration, le ministre a tout intérêt à fixer des objectifs qualitatifs et quantitatifs aux préfets et aux consuls, placés sous son autorité, qui sont suivis précisément. Nous ne sommes évidemment pas obligés de délivrer autant de titres de séjour et de visas que le gouvernement précédent, qui avait battu un record historique ! La manière dont les services évaluent les conditions d’accès à la nationalité française mérite également d’être revue, en termes de maîtrise de notre langue et, plus encore, de respect de nos principes républicains, comme la laïcité.

Ces mesures nationales doivent être complétées par des actions menées au niveau européen, comme dans les relations bilatérales avec les pays tiers. Je pense notamment à la coopération opérationnelle avec l’agence Frontex, notamment pour organiser les retours groupés d’immigrés illégaux vers leur pays d’origine. Au-delà, construisons une coalition d’États membres qui s’engagent à réduire l’immigration ! J’ai en effet observé que, sur la scène politique européenne, les lignes bougent : nous avons là une véritable fenêtre d’opportunité pour appliquer sans naïveté le pacte européen sur l’immigration et l’asile. Il me semble nécessaire de se rapprocher, à Bruxelles, du « groupe des 15 », les États membres partageant la même approche proactive. Et les choix récents de la chancelière allemande sont très intéressants. Je crois que le nouveau commissaire européen aux Affaires intérieures et à la Migration, le conservateur autrichien Magnus Brunner, peut aussi devenir un allié.

Bruno Retailleau pourra-t-il compter sur le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, pour l’application effective de l’OQTF ?

L’intérêt national impose de définir, pays par pays, une approche pleinement partagée par tous les ministères et validée au plus haut niveau de l’Etat, c’est-à-dire à Matignon mais aussi à l’Élysée. L’immigration est une dimension majeure de la relation avec les pays d’origine et de transit, mais elle n’est pas la seule. Dans de nombreux cas, nous aurions intérêt à mieux mettre en œuvre ce qu’on appelle la « conditionnalité » : moins de visas et moins d’aide au développement si le pays en question ne reprend pas ses ressortissants en situation irrégulière et ne lutte pas vigoureusement contre les filières d’immigration clandestine. Nous devons aussi utiliser le levier européen à cet égard : c’est le fameux article 25 bis du code des visas de l’UE, qui prévoit qu’en cas de refus de réadmission d’un pays tiers, des mesures de rétorsion peuvent être prises à l’échelle continentale européenne. J’ajoute que, pour la France, le cas très particulier de notre relation bilatérale avec l’Algérie devrait être traité sans délai. La situation actuelle, qui consiste à accorder des privilèges aux ressortissants algériens et à leur délivrer plus de 200.000 visas chaque année, n’a plus de sens.

De même, il ne s’agit pas seulement d’arrêter les délinquants, mais de les faire condamner. Quelles seront les relations de Bruno Retailleau avec le ministre de la Justice, Didier Migaud, qui vient du PS et n’a pas la même vision politique ?

En tant que ministre de la Sécurité publique, le ministre de l’Intérieur sait qu’il doit pouvoir compter sur la coopération active du ministre de la Justice, chacun dans son rôle. Je ne connais pas personnellement Didier Migaud et je ne me risquerai donc pas, permettez-moi de le dire, à faire un plaidoyer pour mettre en cause le nouveau ministre de la Justice. Des aménagements juridiques sont sans doute souhaitables pour que les peines encourues soient mieux appliquées et que les atteintes aux personnes soient mieux punies. Mais, sur ce sujet comme tant d’autres, les modifications législatives sont moins nécessaires que la mise en œuvre pratique de la loi. Il ne suffira donc pas de modifier une nouvelle fois le Code pénal ou le Code de procédure pénale. Les praticiens savent que c’est l’exécution qui compte le plus, c’est-à-dire l’organisation judiciaire et pénitentiaire, mais aussi la formation des magistrats et leur expérience.

Pensez-vous que ce gouvernement peut durer, une fois le test budgétaire terminé ?

A tout moment, le Rassemblement national et le Nouveau Front populaire peuvent décider de coaguler leurs oppositions et d’additionner leurs voix pour former une majorité négative. Ils peuvent ainsi, ensemble, franchir le seuil des 289 députés, faisant tomber le gouvernement. C’est une réalité politique que tout le monde a en tête. Est-ce dans l’intérêt du pays ? Je n’y crois évidemment pas, mais je ne suis pas dans la tête des mélenchonistes ni dans celle de Mme Le Pen. Il me semble que les Français jugeront très sévèrement ceux qui voudraient ajouter du désordre au désordre, en précipitant notre pays dans le chaos. Il appartient à Michel Barnier et à ses ministres de prouver qu’ils font sérieusement et sincèrement le travail de rétablissement de l’ordre qu’attend une large majorité des Français. En première ligne, Bruno Retailleau saura le démontrer.


Anna

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