Après des jours de nĂ©gociations parfois houleuses, le gouvernement de Michel Barnier a enfin Ă©tĂ© dĂ©voilĂ©. MarquĂ©e Ă droite, l’Ă©quipe va dĂ©sormais devoir tenir tandis que le MoDem, qui a rejoint le casting, a fait connaĂ®tre ses rĂ©serves, tout comme une partie de l’aile gauche macroniste.
Après 16 jours d’attente, le gouvernement Barnier est enfin nĂ© ce samedi 21 septembre. Au total, 39 ministres sont annoncĂ©s. Parmi les poids lourds de la droite, on retrouve le chef de file des sĂ©nateurs macronistes Bruno Retailleau Ă l’IntĂ©rieur. La Macronie est en bonne position avec Astrid Panosyan-Bouvet au Travail et Antoine Armand Ă l’Economie.
Quant au Modem, il hĂ©rite du prestigieux Quai d’Orsay, dĂ©sormais dirigĂ© par Jean-NoĂ«l Barrot, qui travaillait jusqu’ici aux Affaires europĂ©ennes et Ă la SantĂ©, oĂą atterrit Geneviève Darrieussecq. Horizons prend la tĂŞte des Affaires sociales, qui seront dirigĂ©es par Paul Christophe, le prĂ©sident de la commission des Affaires sociales Ă l’AssemblĂ©e.
Bras de fer avec Attal et Darmanin
Le casting gouvernemental, sans aucune nouveautĂ© majeure – Ă l’exception de l’ex-socialiste Didier Migaud Ă la Justice – et marquĂ© par la droite, s’est transformĂ© en casse-tĂŞte pour Michel Barnier, Ă commencer par la place donnĂ©e au camp prĂ©sidentiel.
Alors que la Macronie craignait d’ĂŞtre Ă©vincĂ©e au profit de figures LR, Gabriel Attal et GĂ©rald Darmanin ont haussĂ© le ton au cours de la semaine. S’appuyant tous deux sur une possible hausse d’impĂ´t Ă©voquĂ©e par Michel Barnier et finalement dĂ©mentie, les tĂ©nors macronistes ont chacun jouĂ© leur partition.
L’ancien locataire de Matignon a ainsi demandĂ© une “clarification” de la ligne politique pour “y voir clair” afin de “dĂ©cider de la participation” des dĂ©putĂ©s Renaissance au gouvernement. Le dĂ©sormais ex-ministre de l’IntĂ©rieur est allĂ© encore plus loin, brandissant la menace d’une motion de censure en cas d’augmentation de la fiscalitĂ©.
De quoi pousser Michel Barnier le lendemain Ă changer de mĂ©thode et Ă rĂ©unir autour de la table, lors d’une rĂ©union qui semblait celle de la dernière chance, toutes les forces politiques susceptibles de participer au gouvernement. Avec un certain succès : au passage, le casting gouvernemental commençait Ă se dĂ©rouler.
Le veto de Macron
Mais deux noms de cette première liste ont fait grand bruit Ă gauche et aussi dans le camp prĂ©sidentiel : celui du prĂ©sident des sĂ©nateurs LR Bruno Retailleau et celui d’une de ses proches, la sĂ©natrice Laurence Garnier, finalement nommĂ©e secrĂ©taire d’Etat Ă la Consommation.
Le chef des reprĂ©sentants Ă©lus de la chambre haute Ă©tait l’un des plus fervents soutiens de François Fillon il y a sept ans lors de la campagne prĂ©sidentielle et a manifestĂ© contre le mariage pour tous avec la Manif pour tous, tout comme son collègue.
L’homme passĂ© par le Mouvement pour la France de Philippe de Villiers s’Ă©tait Ă©galement opposĂ© en 2021 au projet de loi visant Ă interdire les thĂ©rapies de conversion. Plus rĂ©cemment, dĂ©but 2024, il a votĂ© contre la constitutionnalisation de l’avortement.
“J’ai mal pour ma France. Je n’ai pas signĂ© pour ça. Je vomis depuis trois heures”, s’est plaint un dĂ©putĂ© Renaissance avant la nomination du gouvernement. “Je vais essayer de croire que tout ça n’est qu’un cauchemar”, a confiĂ© un autre Ă BFMTV.
Inconfort du modem
Sentant le malaise dans son propre camp, Emmanuel Macron a demandĂ© Ă Michel Barnier d’Ă©carter Laurence Garnier du casting, l’obligeant Ă lui trouver une remplaçante.
Pour ajouter un peu de complexitĂ©, le Modem est entrĂ© dans la danse en organisant vendredi une rĂ©union collective. Son porte-parole Bruno Millienne a expliquĂ© Ă BFMTV que “le flottement de gauche n’est pas lĂ ”.
“Il n’y a aucun signe tangible que ce gouvernement ne mènera pas uniquement une politique de droite. Nous sommes d’accord avec la coalition, Ă condition que les deux flottes soient remplies”, a poursuivi le dĂ©putĂ© Modem.
Le diagnostic a cependant fait dĂ©bat : l’ancien parlementaire Jean-Louis Bourlanges, très apprĂ©ciĂ© au sein de son mouvement, a “adjurĂ©” ses anciens collègues de participer au gouvernement. “Il y a un danger devant nous. Nous ne pouvons pas nous permettre de faire le jeu de Marine Le Pen ou de Jean-Luc MĂ©lenchon”, Ă©crit-il dans un communiquĂ©.
La partie la plus difficile commence
Après près de 5 heures de rĂ©unions, le Modem a finalement acceptĂ© vendredi soir de rejoindre l’Ă©quipe de Michel Barnier, mĂŞme si certains dĂ©putĂ©s restent rĂ©servĂ©s.
Si la formation du nouveau gouvernement a pris des allures de supplice de Tantale, les prochains mois ne devraient pas ĂŞtre beaucoup plus faciles pour le Premier ministre. Il devra s’atteler Ă l’Ă©laboration d’un budget pour 2025 dans un contexte financier particulièrement tendu, constamment sous la menace d’une motion de censure.