Cette peur primaire attisée par Donald Trump

« Blagues, mèmes, chansons satiriques ont inondé Internet » dès la fin du débat entre Donald Trump et Kamala Harris, le 10 septembre. « L’absurdité peut parfois devenir une arme redoutable » s’amuse Le nouvel Européen, à Londres. Comment répondre autrement aux affirmations du candidat républicain selon lesquelles les immigrants haïtiens de Springfield, dans l’Ohio, mangent les animaux de compagnie des résidents ? « Trump dit : votez pour moi ou ils mangeront votre chien » résume, caustiquement, l’hebdomadaire de centre-gauche en première page de son édition du 19 septembre.

Curieusement, à première vue, les équipes de campagne républicaines continuent d’insister sur ce « ils » et leurs supposées cibles gastronomiques : « Les communicants diffusent sur les réseaux sociaux des montages de Trump protégeant des chats, des chiens et parfois des canards », note le journaliste Matthew d’Ancona.

Renforcer un préjugé

Et qu’importe si ce coup de projecteur sur Springfield et sa communauté haïtienne (dont la plupart sont légalement présents dans le pays) produit des effets bien réels, entre menaces à la bombe, vandalisme de maisons et mobilisation de suprémacistes blancs. « Ce qui compte, c’est de renforcer un préjugé existant » au sein de l’électorat, analyse le Britannique. « Au cœur de la culture Maga (« Rendre sa grandeur à l’Amérique » « Au milieu du slogan utilisé en 2016 par Trump, il y a un sentiment de siège, dramatiquement amplifié par les deux tentatives d’assassinat contre l’ancien président. » Et cette ancienne figure de la presse conservatrice britannique de poursuivre :

« Il y a l’idée que la nation est envahie par les immigrants, que les valeurs américaines disparaissent, que les écoles et les universités se transforment en usines de propagande de gauche, que les maisons familiales sont entourées de danger. »

Pour l’ancien homme d’affaires de 78 ans et son colistier, JD Vance, « Tout cela est un jeu dont le but est le pouvoir » quitte à tout mélanger, y compris l’accident mortel survenu l’an dernier entre un autobus scolaire et le véhicule d’un ressortissant haïtien. « Cette séquence a tout à voir avec la stimulation d’une émotion primaire, à savoir le réflexe de protection, et rien à voir avec la vérité. (…) Ce qui est en jeu dans cette élection, c’est aussi la capacité à maintenir un certain degré de décence. »