comprendre le débat sur la fin des voitures à moteur thermique en 2035

Au garage, la voiture thermique ? Lors de la campagne pour les élections européennes de juin 2024, l’interdiction de vente de véhicules sur le marché du neuf en 2035 est apparue comme l’une des divisions les plus concrètes. Non sans caricature.

Ce que prévoit la législation

Le règlement européen du 19 avril 2023 interdit la vente de véhicules thermiques neufs à partir de 2035. L’objectif est d’inciter les constructeurs à augmenter leur offre de véhicules électriques, afin de réduire l’impact carbone du transport routier, qui représente un sixième du transport routier. l’empreinte totale de l’Union européenne (UE).

Les véhicules concernés par cette interdiction sont les voitures et camionnettes fonctionnant, totalement ou partiellement, à l’essence ou au diesel, des carburants émetteurs de gaz à effet de serre – ce qui inclut donc les motorisations hybrides. Par exception, les constructeurs de voitures de collection bénéficient d’un délai d’un an.

La législation concerne la vente de véhicules thermiques neufs, mais laisse la possibilité aux consommateurs de continuer à les acheter sur le marché de l’occasion. Cette législation n’interdira donc pas la circulation des véhicules thermiques sur les routes européennes – même si d’autres législations nationales restreignent également la circulation des véhicules les plus polluants, comme la France avec des zones à faibles émissions.

Quels sont les différents postes ?

Ce texte emblématique du mandat d’Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, a été adopté lors d’un vote final du Parlement en février 2023. Il a été voté à l’unanimité par les députés socialistes et verts, et soutenu à une écrasante majorité par les députés libéraux ( MoDem et Renaissance). Les délégations des Républicains (LR) et du Rassemblement national (RN) ont voté contre.

Un an après son adoption, ce règlement continue de susciter des débats. Plusieurs candidats européens ont inscrit la question de l’avenir des véhicules thermiques parmi leurs thèmes de campagne, adoptant des positions très contrastées selon leur camp politique.

  • Ils veulent aller plus loin

Raphaël Glucksmann (Parti socialiste-Place publique) souhaite des investissements massifs et la création de “plus d’usines” Pour « Développer des voitures (électrique) produits d’entrée de gamme fabriqués en Europe.

Marie Toussaint (Les Ecologistes) défend une politique industrielle commune et des financements européens favorisant la transition vers l’électricité.

Valérie Hayer (Renaissance) vœux ” Bien sûr “ maintenir cette régulation, qui est à ses yeux un pas vers le tout électrique.

  • Ils veulent l’arranger

Manon Aubry (La France insoumise) estime qu’il faut ” présumer “ cette décision, mais “différemment”l’accompagner d’aides financières aux ménages pauvres et de développer le rail.

Léon Deffontaines (Parti communiste) estime que les consommateurs, le secteur et le réseau en France ne seront pas prêts en 2035.

François-Xavier Bellamy (Les Républicains), Jordan Bardella (Rassemblement national) et Marion Maréchal (Reconquête) proposent l’abrogation pure et simple du règlement.

Les arguments pour et contre

Ces divisions reposent sur plusieurs points de désaccord.

  • Impact environnemental

Les opposants à la voiture électrique soulignent que son impact environnemental est loin d’être nul, entre l’extraction de terres rares et la production de batteries, souvent dans des usines chinoises fonctionnant au charbon. Elle émet même plus de gaz à effet de serre qu’une voiture thermique lors de sa construction, mais moins de CO2 sur l’ensemble de son cycle de vie, comme le rappelait récemment l’énergéticien Cédric Philibert dans une tribune à Monde.

  • Les conséquences économiques

Les « pro » et les « anti » prohibitionnistes sont en désaccord sur plusieurs points.

Le premier concerne l’état de maturité de l’électricité. D’ici 2035, pour réussir la transition vers un parc automobile largement électrifié, les États membres devront développer les infrastructures d’usage (bornes de recharge) ainsi que les filières d’approvisionnement industriel (notamment en matières premières et batteries). Le Parti communiste s’inquiète du fait que l’échéance soit trop proche ; d’autres considèrent la date comme pertinente. “Certains voulaient 2030, mais nous n’aurions pas été prêts sur le plan industriel, à sourcer les matières premières, à déployer des terminaux, etc. Pour moi c’est un bon texte, qui arrive à point nommé”estime l’eurodéputée Marie-Pierre Vedrenne (MoDem).

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Les opposants à l’interdiction évoquent également le risque de dépendance à l’égard de la Chine pour les matières premières. En effet, le géant asiatique concentre actuellement 93 % de la production mondiale d’aimants à base de terres rares et 89 % de la production de magnésium, indispensables à la construction de véhicules électriques, et est l’unique fournisseur de l’UE.

Les véhicules chinois constituent eux-mêmes une menace, car ils sont beaucoup moins chers, produits en grande quantité, et risquent de détruire un secteur européen encore jeune. Marion Maréchal a ainsi dénoncé une décision qui “sabotage” le secteur français et menacent « 100 000 emplois ». Ce texte est “le plus beau cadeau que nous puissions faire (au président chinois) Xi Jinping “est d’accord avec François-Xavier Bellamy, car « La Chine a des années d’avance sur nous ». En réponse, Raphaël Glucksmann propose une législation « acheter européen » promouvoir l’industrie continentale.

L’interdiction de vente de véhicules thermiques neufs en 2035 va alourdir le porte-monnaie des Français, estiment ses opposants. Jordan Bardella estime ainsi que cette mesure “pose un problème de pouvoir d’achat”car les réparations coûtent plus cher en électrique qu’en thermique (le prix moyen est en effet 30% plus élevé pour les réparations, notamment sur les Tesla, même si l’électrique demande moins d’entretien).

D’autres s’inquiètent surtout de leur prix d’achat, actuellement deux fois plus élevé qu’un équivalent thermique – de 20 000 à 100 000 euros pour une citadine contre 10 000 à 45 000 euros pour un modèle essence, selon le magazine. Que choisir ?. Les Français devront « gardent leurs voitures d’occasion pour toujours car ils ne pourront pas acheter de nouvelles voitures »argumente François-Xavier Bellamy.

Mais à long terme, dans l’état actuel des prix de l’énergie et des carburants, le différentiel de coûts est plutôt favorable aux véhicules électriques. Ainsi, selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), un véhicule électrique de taille moyenne acheté en 2022 en Allemagne coûterait 10 à 20 % plus cher que son équivalent thermique, mais serait rentabilisé en cinq ans grâce aux économies d’entretien et de carburant. .

De plus, le marché actuel des voitures électriques ne donne guère un aperçu pertinent de ce qu’il devrait être dans onze ans. Le marché de l’électrique d’occasion, qui a déjà augmenté de 180 % en France en 2023, devrait connaître une croissance croissante, tandis que la massification du secteur devrait générer des économies d’échelle dans la construction neuve. “À mesure que le marché mûrit, l’industrie entre dans une phase de concurrence et de consolidation sur les prix”, note l’AIE. Une guerre des prix qui devrait, à long terme, profiter aux consommateurs, même si les prix tendent à rester stables pour le moment.

La voiture décarbonée, objectif 2035

Le passage du moteur thermique au moteur électrique prévu par l’Europe suscite autant d’espoir que de scepticisme parmi les experts de la mobilité et de l’énergie.

  • « Il n’y aura pas de miracle de décarbonation avec les véhicules électriques », par Yves Crozet, professeur émérite à Sciences-Po Lyon, chercheur au Laboratoire de développement de l’économie des transports (LAET/CNRS)
  • « Le bilan climatique des véhicules électriques serait médiocre, mais que valent ces plaintes ? », par Cédric Philibert, expert au Centre Énergie & Climat
  • « Le « système automobile », un modèle occidental problématique qui a colonisé l’espace public », par Sylvie Landriève, directrice du Forum Vies mobiles, un groupe de réflexion sur la mobilité soutenu par la SNCF
  • « L’accompagnement des ménages et l’encadrement du secteur restent incomplets », par Marie-Amandine Stévenin, présidente de l’UFC-Que Choisir
  • « La transition vers les voitures électriques doit s’inscrire dans une stratégie systémique et cohérente de transformation de notre mobilité », par Laurent Perron et Jacques Portalier, chargés de projet « Industrie automobile » au Projet Shift
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Elise

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