Le Venezuela a révoqué samedi “immédiatement” l’autorisation donnée au Brésil de représenter l’Argentine dans le pays, et notamment de gérer la résidence de l’ambassade où se réfugient depuis mars six dirigeants de l’opposition.
Le ministère brésilien des Affaires étrangères a immédiatement rappelé à Caracas « l’inviolabilité des installations de la mission diplomatique argentine ».
Les tensions sont montées d’un cran entre Brasilia et Caracas alors que les forces de police ont pris position autour de la résidence de l’ambassade d’Argentine, gérée et gardée par le Brésil depuis début août, ont constaté des journalistes de l’AFP.
Dans un communiqué publié ce matin, le Venezuela « a pris la décision de révoquer immédiatement l’autorisation donnée au Brésil d’exercer la représentation des intérêts de l’Argentine » ainsi que de gérer « la mission diplomatique ».
Le texte assure que Caracas dispose de « preuves » de « l’utilisation de la mission pour la planification d’actions terroristes » et de tentatives d’assassinat du président Nicolas Maduro.
Le Venezuela a rompu le 29 juillet ses relations diplomatiques avec sept pays d’Amérique latine, dont l’Argentine, qui n’a pas reconnu la réélection contestée de M. Maduro face au candidat de l’opposition Edmundo Gonzalez Urrutia, qui revendique la victoire.
En mars, l’Argentine a accueilli à l’ambassade six responsables de l’opposition, dont des responsables de campagne accusés de « complot » et qui voulaient échapper à leur arrestation.
– “Inviolabilité” –
Le Brésil a immédiatement réagi samedi en assurant qu’il « continuera à défendre les intérêts argentins jusqu’à ce que le gouvernement argentin désigne un autre État acceptable par le gouvernement vénézuélien pour exercer ces fonctions ».
Le président brésilien de gauche Luiz Inacio Lula da Silva tente de jouer un rôle de médiateur dans la crise post-électorale depuis la réélection contestée de M. Maduro fin juillet, qui n’a pas été reconnue par une grande partie de la communauté internationale, y compris les États-Unis et l’Europe.
Lula a notamment proposé en vain de nouvelles élections.
L’Argentine a « exprimé sa gratitude » au Brésil et a déclaré qu’elle appréciait « son engagement et sa responsabilité pour assurer la garde des avoirs argentins » au Venezuela.
Dans un communiqué, le ministère argentin des Affaires étrangères « avertit le gouvernement vénézuélien qu’il doit respecter la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques, qui établit l’inviolabilité des locaux des missions » et souligne que « toute tentative d’ingérence ou d’enlèvement de demandeurs d’asile » qui s’y trouvent « sera fermement condamnée par la communauté internationale ».
« De telles actions renforcent la conviction que le Venezuela de Maduro ne respecte pas les droits fondamentaux des êtres humains », conclut-il.
Les deux présidents idéologiquement opposés, l’Argentin Javier Milei et le Vénézuélien Nicolas Maduro, se critiquent régulièrement et s’insultent même à distance.
L’Uruguay considère que cette « situation constitue une violation du droit international et une nouvelle violation des droits des citoyens vénézuéliens bénéficiant de l’asile », tandis que le Chili a exprimé sa « préoccupation », a démontré son « rejet de cette décision » et a exprimé sa « solidarité avec les gouvernements argentin et brésilien dans la situation qu’ils traversent ».
– Siège –
L’opposition vénézuélienne a dénoncé samedi matin le “siège” par la police de la résidence de l’ambassade d’Argentine à Caracas, où selon elle l’électricité a été coupée. Depuis vendredi soir, elle est encerclée par des véhicules des forces de sécurité.
La cheffe de l’opposition, Maria Corina Machado, qui vit cachée comme le candidat Edmundo Gonzalez Urrutia, a qualifié d’absurdes les “accusations présumées” contre les six leaders de l’opposition, insistant sur les “conventions internationales sur l’asile diplomatique et l’immunité des missions diplomatiques”.
« Nous exigeons que des mesures soient prises pour délivrer des sauf-conduits à nos camarades (réfugiés dans la résidence) », a conclu Mme Machado sur X.
Le président socialiste Maduro, dont la victoire a été validée par la Cour suprême vénézuélienne le 22 août, a été déclaré vainqueur avec 52% des voix par le Conseil national électoral (CNE), qui n’a cependant pas rendu publics les procès-verbaux des bureaux de vote.
Selon l’opposition, qui a publié les procès-verbaux fournis par ses scrutateurs, M. Gonzalez Urrutia a obtenu plus de 60% des voix.
Après l’annonce de la réélection de M. Maduro, des manifestations spontanées ont fait 27 morts et 192 blessés. Quelque 2.400 personnes ont été arrêtées, selon des sources officielles.
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