Crise à l’Hôpital Maisonneuve-Rosemont | Un exécutif bondé, des ambulances détournées et un conciliateur désigné

La moitié des infirmières sont toujours portées disparues pour le quart de soir à l’HMR mardi, selon la présidente du syndicat du CIUSSS de l’Est-de-l’Île-de-Montréal.




(Montréal et Québec) Le ministre de la Santé, Christian Dubé, a nommé un conciliateur pour régler la crise qui secoue l’urgence de l’Hôpital Maisonneuve-Rosemont (HMR), où une centaine d’infirmières menacent de démissionner. Dans l’espoir d’apaiser le mécontentement, le chef des urgences va être réaffecté dans un autre service et les ambulances, détournées pour réduire le volume.

Pour faire face à la crise dans sa salle d’urgence, l’HMR veut réduire le volume d’ambulances et de patients pour tenter de donner un répit aux infirmières essoufflées, a indiqué le PDG du CIUSSS de l’Est-de-l’Île. -de-Montréal lors d’un point de presse mardi.

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PHOTO PATRICK SANFAÇON, LA PRESSE

La veille, les infirmières de l’équipe du soir ont refusé un plan d’urgence imposé par la direction de l’hôpital, qui voulait qu’elles travaillent en équipe réduite. Ce plan, selon eux, met en danger la santé et la sécurité des patients.

«La première chose, c’est qu’on aura le soutien du réseau de la santé pour réduire le nombre d’ambulances reçues à l’HMR à l’urgence, a indiqué Jean-François Fortin en point de presse mardi midi. -Verreault, président-directeur général du CIUSSS de l’Est-de-l’Île-de-Montréal. Ça va donner de l’air aux équipes, espère-t-il, et c’est la première étape. Il faut commencer à avoir un peu moins de volume, avoir un équilibre travail-famille. »

Un conciliateur externe a également été nommé pour tenter de dénouer l’impasse entre les employés des urgences de l’HMR et la direction, a rapporté le ministre de la Santé Christian Dubé lors d’un autre point de presse. « Nous sommes conscients d’une situation très difficile, mais je suis heureux d’apprendre qu’il y a des solutions sur la table », a déclaré M. Dubé. Pour soutenir M. Fortin et les employés, nous avons convenu d’amener quelqu’un de l’extérieur de la situation pour continuer à essayer de trouver des solutions. »

La question du grand volume de patients traités à l’urgence de l’HMR a également été discutée avec messieurs Dubé et Fortin Verreault. «Il faut juste rappeler qu’à l’HMR, historiquement, par rapport à la position géographique de l’hôpital, on recevait une plus grande proportion d’ambulances», a illustré le PDG. Par exemple, l’HMR recevrait 45 ambulances par jour, comparativement à 35 à l’Hôpital général juif, qui compte 100 lits de plus.

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Jean-François Fortin-Verreault, directeur général du CIUSSS de l’Est-de-l’Île-de-Montréal.

Rappelons que lundi, les infirmières de l’équipe du soir ont refusé un plan d’urgence imposé par la direction de l’hôpital qui voulait qu’elles travaillent en équipe réduite. Ce plan, selon eux, met en danger la santé et la sécurité des patients. Ils ont fait ce qu’on appelle dans le jargon syndical un s’asseoir, qui se tient habituellement entre deux quarts de travail pour manifester contre les conditions imposées.

Les infirmières du quart de jour devaient continuer leur travail jusqu’à minuit, alors que le CIUSSS de l’Est-de-l’Île-de-Montréal demandait à la population d’éviter l’urgence de 23 h à 8 h, en plus de détournant les ambulances vers d’autres hôpitaux.

En fin d’après-midi mardi, 12 infirmières sur 24 sont toujours portées disparues pour travailler le quart de soir, selon Denis Cloutier, président du Syndicat des professionnelles en soins de l’Est-de-l’Île-de Montréal.

Le gestionnaire problématique emballé

Une centaine d’infirmières urgentistes menacent également de démissionner mercredi si le chef de leur unité n’est pas remplacé.

A ce sujet, le PDG a affirmé mardi que ce responsable ne travaillerait plus directement avec les équipes d’urgence, tout en maintenant qu’il ne souhaitait pas « personnaliser le débat ».

« La personne en question n’est pas responsable du fait que nous recevions plus de patients que notre capacité, a fait valoir M. Fortin-Verreault. Mais c’est certain que la relation avec l’équipe n’est pas là, donc on va réutiliser la personne, mais pas en relation directe avec l’équipe. »

Le PDG a également déclaré qu’il avait parlé avec les infirmières pendant environ une heure et demie lundi soir et que d’autres réunions étaient à l’ordre du jour plus tard mardi.

Quant à la situation vécue lundi soir, où les infirmières ont été placées devant un plan de contingence qu’elles ont jugé inacceptable pour éviter les heures supplémentaires obligatoires, M. Fortin-Verreault reconnaît qu’elles seront désormais consultées à ce sujet. « Ce que nous allons faire, ils conviennent qu’une réorganisation doit être appliquée avant les GRT, et ils conviennent qu’elle doit être co-construite. C’est ce que nous allons faire dans quelques minutes. »

Une fermeture « prévisible »

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Christian Dubé

« C’était très prévisible ! L’Hôpital Maisonneuve-Rosemont est un volcan actif et on voit de la fumée depuis des années. Si Christian Dubé ne l’a pas vu, c’est parce qu’il ne voulait pas le voir », a illustré Vincent Marissal, porte-parole de Québec solidaire en matière de santé et député de circonscription, dans un point de presse devant l’hôpital mardi. « La question n’était pas de savoir s’il allait y avoir une éruption, mais quand ».

Le porte-parole affirme également que le ministre Dubé parle « des deux côtés de la bouche » en disant vouloir revitaliser le réseau de la santé, tout en annonçant des investissements dans les cliniques privées et les mini-hôpitaux. « Évidemment, si vous avez le choix entre travailler ici ou dans une clinique neuve, neuve et privée, évidemment vous irez vers le secteur privé », a-t-il dénoncé.

Le Parti libéral du Québec reproche également à M. Dubé de ne pas avoir agi avant dans le cas des urgences à Maisonneuve-Rosemont.

« La fermeture de l’urgence de Maisonneuve-Rosemont était prévisible depuis des mois et est une autre démonstration de l’inefficacité de la CAQ. Pourtant, le ministre Dubé a refusé d’entendre l’appel à l’aide des infirmières et d’agir avant que la crise n’éclate. Le résultat de toute cette incompétence est, selon les infirmières elles-mêmes, la mise en danger de la vie des patients », a déploré le libéral André Fortin.

La presse rapportait en décembre le cri du cœur de neuf infirmiers et aides-soignants qui dénonçaient ouvertement divers « stratagèmes » des managers pour les contraindre à rester au travail et l’augmentation du recours aux heures supplémentaires obligatoires (OTS).

Un peu plus tôt la semaine dernière, le syndicat affirmait également qu’un « triste record » de TSO avait été franchi aux urgences.

Une situation « rouge sang »

« La situation n’est pas rose partout, mais il y a des endroits où la situation est rouge sang », a déclaré Pierre-David Gagné, infirmier au bloc opératoire du même hôpital. Et c’est le cas à l’HMR, poursuit-il. Il faut arrêter de penser qu’on peut obliger les infirmières à faire tout ce qu’on ne veut pas faire. »

Des infirmières réunies devant l’hôpital mardi matin soutiennent que la situation à l’urgence de l’HMR est « invivable ».

« Quand j’ai été embauché à l’hôpital en 2007, on me disait déjà : ne jamais aller aux urgences, car il y a TSO », raconte l’un d’eux, qui a préféré ne pas nommer. « Les gens aux urgences voient que la situation s’aggrave », ajoute son collègue. C’est un cercle vicieux. »

« Je suis très content que les infirmières aient tenu parce que défendre la qualité des soins, c’est important, ajoute M. Gagné, parce que les conditions qu’on voulait leur imposer étaient inhumaines »

Les infirmières sont responsables de la qualité des soins qu’elles prodiguent, a ajouté M. Gagné. « Quand il va y avoir un décès, la personne qui est facile à dénoncer, c’est l’infirmière. La personne qui va quitter son quart de travail, il aura l’impression d’avoir mis des vies en danger, et c’est ce que les infirmières de Maisonneuve-Rosemont ont défendu. »

Pas une situation isolée, selon les syndicats

Cette crise survient en même temps que des infirmières de l’urgence de l’hôpital Jonquière, à Saguenay, refusent de travailler pendant une quinzaine de minutes pour manifester contre leurs conditions de travail. Selon Radio-Canada, ils exigent qu’un inspecteur de la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité au travail (CNESST) visite les lieux.

« C’est devenu tellement banal, le manque de personnel et la s’asseoir gauche et droite, que je ne sais même pas si on les compte », rétorque pour sa part la présidente de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ) de la Montérégie-Ouest, Mélanie Gignac. Son territoire couvre notamment les hôpitaux Anna-Laberge et Suroît.

Du s’asseoir a eu lieu le 26 décembre à Anna-Laberge et le 6 janvier au Suroît. En Montérégie-Ouest, la FIQ soutient que le recours au temps supplémentaire obligatoire (TSO), qui fait l’objet de discorde à l’HMR, est également fréquent. « Le TSO, il faut faire attention, c’est déguisé. Si les gens décidaient de ne pas prendre plus de temps pour aider, cela se terminerait par un TSO. […] Les nombres réels sont cachés par le [temps supplémentaire] « , elle dit.

A noter que lorsqu’un accord est trouvé entre un salarié et un supérieur, il ne s’agit plus de TSO, mais plutôt d’heures supplémentaires volontaires (TS).

Les infirmières de l’hôpital Cité-de-la-Santé de Laval ont également envoyé une lettre à celles de l’HMR pour les soutenir, et que La presse a pu consulter. » [Nous] Nous tenons à vous témoigner notre respect et notre soutien dans l’épreuve que vous traversez depuis plusieurs mois déjà, peut-on y lire. Il est essentiel que nous soyons solidaires face à l’adversité et c’est pourquoi nous sommes de tout cœur avec vous. »

« Il y a une culture de gestion qui est malsaine partout au Québec dans le système de santé. Une culture autoritaire, une culture, franchement, du mépris, souvent pour les soignants sur le carreau», a déploré dans un entretien à La presse le chef parlementaire de Québec solidaire, Gabriel Nadeau-Dubois. Ce dernier presse le ministre Christian Dubé d’agir rapidement dans Maisonneuve-Rosemont.

« C’est insupportable, la situation est critique. Les slogans motivants de Christian Dubé ne suffisent plus. Il agit de son côté pour corriger la situation car c’est un hôpital important pour tout l’est de Montréal. Nous ne pouvons pas nous permettre que cela devienne incontrôlable comme ça », a-t-il soutenu.

Avec Hugo Pilon-Larose, La presse


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