découverte entre alliés de circonstance

Un “nouveau gouvernement”, pas un “remaniement” : pour sa première rencontre avec les députés macronistes, Michel Barnier a esquissé mardi les contours de la “coexistence exigeante” vantée à l’Élysée avec ce Premier ministre de droite qui a promis de respecter “toutes les sensibilités” du parti présidentiel.

Les 97 députés du groupe “Ensemble pour la République” (ex-Renaissance), dont leur nouveau président Gabriel Attal, ont accueilli Michel Barnier lors de leur journée de rentrée parlementaire à Rosny-sur-Seine (Yvelines).

Invitée dans la journée, la presse a été priée de quitter les lieux avant l’arrivée du nouveau Premier ministre, cinq jours après son arrivée à Matignon où il a succédé à Gabriel Attal.

Les députés de la mouvance présidentielle venaient de débattre pendant plusieurs heures des conditions de soutien et de participation au gouvernement. Placés dans une situation inédite et improbable : battus aux législatives, minoritaires même avec leurs alliés MoDem et Horizons, contraints de renoncer à Matignon, ils constituent pourtant le premier contingent de soutien au Premier ministre choisi par Emmanuel Macron.

“J’ai besoin de vous et le président de la République a besoin de vous”, a résumé Michel Barnier, selon les participants à la réunion.

L’ancien commissaire européen de 73 ans, choisi après des semaines de négociations et le refus de M. Macron de nommer la candidate de gauche Lucie Castets à Matignon, a promis de respecter “toutes les sensibilités” du parti présidentiel.

Mais ce nouveau glissement à droite met en évidence les divisions au sein de Renaissance : d’un côté, une aile gauche et quelques “historiques” inquiets, notamment quant à la politique migratoire que M. Barnier, auteur de propositions radicales en 2021, entend mener.

Et, de l’autre, une droite enthousiaste, désireuse de participer au gouvernement. Et donc, pour certains, d’y rester.

– “Droit de demande” –

A Rosny, M. Barnier a également pu rencontrer plusieurs anciens membres de son parti politique ayant rejoint la Macronie : Gérald Darmanin, Franck Riester, Fabienne Keller, Aurore Bergé…

Mais “il s’agit d’un nouveau gouvernement et non d’un remaniement”, a-t-il prévenu, suggérant un vaste renouvellement des ministres.

Lundi, le président du Sénat Gérard Larcher a ouvert la porte à une participation de LR au gouvernement Barnier. Une nouveauté pour le parti de droite, initialement fondé sur un refus de toute coalition ou participation prônée par Laurent Wauquiez.

A Renaissance, « notre premier devoir » est de « tout faire pour que ça marche », a déclaré Gabriel Attal dans la matinée. Tout en réaffirmant « un droit d’exiger » car, a-t-il dit, « aucune majorité ne peut s’écrire sans nous. Aucun vote ne peut se gagner sans nous ».

Lors de la réunion, le ministre démissionnaire de l’Intérieur Gérald Darmanin a laissé entendre que d’éventuels ministres issus du camp présidentiel pourraient quitter le gouvernement en masse si des “lignes rouges” étaient franchies.

L’ancienne Première ministre Élisabeth Borne a évoqué une “participation sans accompagnement”, selon la ministre démissionnaire Olivia Grégoire.

– “Compromis” –

Une manière, sans doute, de rassurer les députés macronistes les plus réticents à soutenir un gouvernement dirigé par LR et placé “sous surveillance” par le Rassemblement national.

« Si vous mettez (Bruno) Retailleau ou (Laurent) Wauquiez au gouvernement, je ne les soutiens pas. Ils ont défendu des valeurs qui ne sont pas les miennes. Ce n’est pas aller au-delà de ce qu’ils sont censés faire, c’est faire des compromis avec eux », prévient un cadre de Renaissance.

Devant ses troupes, Gabriel Attal a insisté, selon son entourage, sur “l’unité” du groupe sur la question européenne, sur la place de l’économie dans la société, le refus d’augmenter les impôts ou encore la laïcité.

Mais des désaccords émergent. Alors que le député Charles Rodwell évoque dans Le Figaro une « insécurité culturelle » des Français, liée notamment à l’immigration, son collègue Ludovic Mendes y voit « une théorie d’extrême droite ».

De vifs débats sont attendus notamment sur la question récurrente de l’aide médicale d’État (AME) pour les sans-papiers. D’autant que LR pourrait être tenté de ramener dans l’atmosphère ses revendications sur l’immigration qui avaient déjà fissuré l’unité du camp macroniste l’an dernier.

M. Barnier a de nouveau tenu des consultations pour former son gouvernement, mardi à Matignon, en recevant Marc Fesneau (MoDem), Stéphane Séjourné (Renaissance) et Hervé Marseille (UDI).

Il se rendra mercredi à Reims pour rencontrer les 33 députés du groupe Horizons, le parti d’Édouard Philippe, puis en Seine-et-Marne avec les 36 du MoDem. Il pourrait ensuite se rendre aux journées parlementaires de sa famille politique en fin de semaine à Aix-les-Bains.

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