La revue des magazines. 2024 est une année électorale unique. Les citoyens de soixante-seize pays sont appelés à voter. Si certaines élections sont particulièrement scrutées, comme la présidentielle aux Etats-Unis, ce phénomène est néanmoins devenu monnaie courante. Parce que « il n’y a plus de distinction nette entre la phase de campagne électorale et celle de gouvernement »note l’écrivain Giuliano da Empoli, qui dirige le nouvel opus papier du magazine en ligne Le grand continent.
Dans le passé, le réalisme gouvernemental a succédé au lyrisme de la conquête électorale. « On fait campagne en poésie mais on gouverne en prose », a résumé d’un seul coup le sénateur démocrate américain Mario Cuomo (1932-2015). Aujourd’hui, nous sommes entrés dans une logique de campagne permanente, observe Giuliano da Empoli. La poésie – même politique – n’est cependant pas devenue la règle de la vie démocratique puisque les médias numériques entretiennent l’espace public dans un climat agonisant lancinant.
Il faut dire que le monde est fracturé. Partagée entre partisans de la transition écologique et climato-sceptiques, l’Europe voit s’opposer deux « modes de vie »entre « d’un côté les multiculturalistes et les progressistes, de l’autre les conservateurs et les identitaires »analyse le politologue Jean-Yves Dormagen.
Le conflit en Ukraine a renforcé l’appartenance européenne de cette nation dirigée par Zelensky, ce « Churchill avec un iPhone »mais l’Europe doit apporter davantage d’aide, estime l’historien britannique Timothy Garton Ash : « L’Ukraine a fait son choix européen. L’Europe doit désormais faire son choix ukrainien de manière cohérente. »
Le conflit à Gaza accroît les divisions au sein de l’Union européenne (UE). « La concomitance de ces deux conflits nous pose des problèmes de cohérence (…) vers le reste du monde », reconnaît Josep Borrell, chef de la diplomatie européenne. En résumé, écrit ce partisan d’un cessez-le-feu à Gaza et d’une solution à deux États, «notre manque d’unité» sur le conflit israélo-palestinien « affaibli notre crédibilité dans la défense du droit international ».
Une impression particulièrement forte de « deux poids, deux mesures » dans les pays du Sud, une notion critiquée par le politologue Bruno Tertrais. Il voit un « Piège intellectuel et politique » OMS « valorise l’idée d’une confrontation politique avec l’Occident »tandis que la chercheuse Aude Darnal défend au contraire la« l’expression la plus polysémique et la plus neutre qui soit » pour désigner les États du Sud, malgré leur hétérogénéité.
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