Nouveau jour, nouvelles règles au Complexe Guy-Favreau où des centaines de personnes attendent — dehors — pour obtenir un passeport. Jeudi, au lieu d’attribuer des coupons de rendez-vous, les employés ont privilégié les voyageurs partant dans moins de 24 heures. Or, ceux qui ont un départ prévu samedi ou dimanche se retrouvent mal en point à la veille du jour férié.
Publié à 17h51
La nouvelle stratégie a fait monter la tension à l’extérieur de l’édifice du centre-ville de Montréal : des personnes qui attendaient depuis trois jours ont été dépassées par d’autres qui étaient arrivées quelques heures plus tôt.
« Je suis ici depuis deux nuits et il y a des gens qui arrivent six heures avant leur vol et ils passent vite. Je comprends, je suis vraiment contente pour eux, mais j’aurais aimé ça aussi, arriver juste 24 heures avant mon vol », raconte Melissa Matta, qui a fait sa demande de passeport en personne en mars dernier. On lui a alors dit que son document de voyage serait prêt le 1euh juin, à temps pour son départ pour le Pérou dimanche.
Melissa Matta, comme les gens qui l’entourent, se demande quoi faire de leurs billets d’avion (les conserver, les reporter, les annuler) d’autant plus qu’Ottawa a annoncé plus tôt cette semaine que les fonctionnaires de Service Canada devront travailler les jours fériés du 24 juin et du 1euh Juillet. Cependant, les bureaux seront fermés au grand public.
Nous sommes dans l’incertitude depuis le début. Nous ne savons pas ce qui va se passer. On entend des rumeurs qu’ils seront ouverts demain, qu’ils donneront des rendez-vous, mais on ne sait pas si c’est vrai […] J’aimerais qu’ils soient transparents, qu’ils nous disent à quoi s’attendre à ce stade de la file d’attente, si oui ou non nous sommes susceptibles de pouvoir partir le week-end.
Mélissa Matta
Un peu plus loin dans la lignée qui fait trois faces de l’imposante bâtisse, Marie-Christine Henssen accompagne sa soeur Cristel. Cette dernière doit renouveler le passeport de son fils qui doit s’envoler pour son tout premier voyage, en Belgique, dimanche.
« Je n’allais pas laisser ma sœur seule ici le soir, s’exclame Marie-Christine Henssen. Ce n’est pas amusant la nuit. Tout le monde est super gentil, mais quand même, je ne voulais pas la laisser seule là-dedans. »
Lors des orages nocturnes, les deux femmes se sont abritées sous une bâche en plastique et un grand parasol qu’elles avaient apportés. Plusieurs « campeurs » ont également installé des bâches qu’ils ont fixées aux arbres et au mobilier urbain. Des toilettes chimiques ont également été installées sur le trottoir pour permettre aux gens de se soulager ailleurs que dans une ruelle.
«Je me demande si tout le monde reste, cela les obligera-t-il à ouvrir vendredi? Je comprends qu’ils soient débordés, mais il y a un manque de respect pour les gens qui attendent dans ces conditions », note Marie-Christine Henssen.
Même si le bureau des passeports reste fermé pendant trois jours, Cristel Henssen est catégorique. Elle dormira à l’extérieur du complexe jusqu’à ce qu’elle obtienne le passeport de son fils. « C’est certain ! On va dormir ici le temps qu’il faudra », dit-elle, encore déçue de la tournure des événements.
» Nous l’avons ! »
De l’autre côté du Complexe Guy-Favreau, Mélanie Dubuc est sortie triomphante, les bras en l’air, et très émue. « Nous l’avons ! », a-t-elle déclaré en tombant dans les bras de son conjoint actuel et de son ex, le père de sa fille.
Le voyage en famille à Walt Disney, initialement prévu en avril 2020, a été reporté aux vacances de printemps. Mais, la fille de Mélanie Dubuc a été testée positive au COVID-19 avant leur départ. La mère de famille a redemandé un passeport pour son enfant en mars, car celui-ci aurait expiré avant leur nouveau départ, prévu le 24 juin.
Le trio a contacté leur député fédéral pour s’assurer qu’ils avaient le passeport à temps pour la fin des cours. C’est lui qui leur a confirmé que le document serait prêt le 23 juin.
« C’est le député qui nous a envoyés ici, mais nous n’avions aucune preuve officielle, raconte Mmoi Dubuc, les yeux encore humides. Ils ont vérifié et ils nous ont laissé entrer. »
En dernier recours, le père de la jeune fille envisageait de traverser la frontière par voie terrestre puisque les enfants de 15 ans et moins peuvent présenter un certificat de naissance au lieu d’un passeport pour se rendre aux États-Unis… et revenir au Canada.
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