Des centaines de logements Airbnb illégaux dans le Vieux-Montréal
Dans tout le Vieux-Montréal, il est interdit de louer des appartements aux touristes. Pourtant, il existe des centaines de ces logements illégaux sur Airbnb. La Ville n’effectue pas d’inspections pour faire respecter sa réglementation sur les résidences de tourisme, s’en remettant au gouvernement du Québec, dont les inspecteurs n’ont pas le mandat d’appliquer la réglementation municipale.
Que ce soit un lit dans un dortoir d’une pseudo « auberge de jeunesse » à 34$ la nuit ou un loft avec un mur de pierre rénové au goût du jour à 2 000$ la nuit, les offres ne manquent pas pour le Vieux-Montréal, sur Airbnb et autres locations touristiques en ligne plates-formes.
Parmi les victimes de l’incendie qui a ravagé jeudi dernier un édifice patrimonial de la Place D’Youville, il y avait des touristes qui y avaient loué une chambre ou un appartement pour quelques jours, selon le Service des incendies de Montréal.
Sur Airbnb, il y a plus de 1 000 annonces d’hébergements ou de chambres dans le Vieux-Montréal.
Comment est-ce possible, alors que de telles résidences de tourisme en location de courte durée sont interdites par le zonage municipal ? Que fait la Ville pour faire respecter ses règlements?
10 établissements agréés
Officiellement, il n’y a que « 10 établissements ayant l’usage de ‘résidence de tourisme’ dans le secteur historique du Vieux-Montréal », indique une porte-parole de l’arrondissement de Ville-Marie, Kim Nantais, qui a répondu par écrit la semaine dernière. aux questions de La presse.
Ces établissements bénéficient de droits acquis et étaient déjà en opération lorsque l’arrondissement a adopté, en 2018, son règlement limitant les locations touristiques au secteur de la rue Sainte-Catherine, entre les rues Atateken et Saint-Mathieu.
« Aucun nouvel établissement n’a obtenu de certificat d’occupation pour cet usage depuis 2018 », ajoute Mme.moi Nantes.
Il y a 45 certificats d’occupation à usage « résidence de tourisme » actuellement sur le territoire de l’arrondissement de Ville-Marie, alors qu’il y a 4 155 annonces de logements sur Airbnb, selon le site Inside Airbnb.
Y a-t-il des inspecteurs municipaux pour faire appliquer le règlement? Non, répond M.moi Nantes.
« La location à court terme (hébergement touristique) est sous la responsabilité du gouvernement du Québec, qui doit délivrer une attestation de classification et un numéro d’établissement », explique-t-elle. Lorsqu’une plainte est déposée à l’arrondissement de Ville-Marie, elle est acheminée à Revenu Québec qui a pour mandat d’effectuer des inspections, des enquêtes et de délivrer des constats d’infraction relatifs à l’application de la Loi sur l’hébergement touristique. »
Vérification faite auprès de Revenu Québec, on nous a dit que leurs inspecteurs « n’ont pas le mandat d’appliquer la réglementation municipale, mais plutôt le Loi sur l’hébergement touristique », indique la porte-parole, Mylène Gagnon, dans une réponse écrite transmise à La presse mardi dernier.
« Une municipalité veille au respect de sa réglementation, notamment par l’intermédiaire de ses inspecteurs de l’urbanisme qui peuvent constater les infractions. Elle peut demander la cessation des usages prohibés et, le cas échéant, engager des poursuites judiciaires à cette fin », précise Jean-Manuel Téotonio, porte-parole du ministère du Tourisme, dans un courriel envoyé jeudi.
L’application de la loi
Là Loi sur l’hébergement touristique exige que les hébergements loués à court terme aux touristes soient immatriculés auprès de la Corporation de l’industrie touristique du Québec (CITQ) et que leur numéro d’immatriculation soit affiché à leur entrée et sur leur annonce, publiée en ligne ou ailleurs. Les propriétaires qui ne possèdent pas ce numéro d’inscription peuvent être pénalisés par Revenu Québec.
En effet, une minorité d’annonces en ligne sur le site Airbnb d’hébergement au Québec affichent un numéro CITQ.
Dans la plupart des arrondissements de Montréal, il faut d’abord avoir obtenu un permis d’occupation pour activité commerciale afin de s’inscrire à la CITQ. Ailleurs, vous devez obtenir un avis de conformité de votre municipalité.
Pourquoi ne pas demander à Airbnb d’exiger le numéro CITQ avant de publier des annonces ?
« Les dispositions législatives et réglementaires relatives à l’affichage du numéro d’immatriculation […] s’appliquent à l’exploitant d’un établissement d’hébergement touristique et non à ceux qui distribuent l’offre d’hébergement », répond M. Téotonio.
Plusieurs arrondissements montréalais, comme Ville-Marie, Le Plateau-Mont-Royal, Rosemont–La Petite-Patrie et Mercier–Hochelaga-Maisonneuve, limitent l’hébergement touristique à quelques secteurs commerciaux; Verdun interdit carrément la location commerciale de logements à court terme.
Au bureau de la mairesse Valérie Plante, on nie être laxiste quant aux mesures prises pour faire respecter ces interdictions.
« Depuis 2018, nos arrondissements travaillent à encadrer et encadrer la pratique de la location à court terme à Montréal. Les règles de zonage ont été modifiées dans plusieurs arrondissements pour limiter la pratique à des secteurs précis. Pour sa part, le gouvernement du Québec a donné les pouvoirs nécessaires aux inspecteurs de Revenu Québec pour faire respecter la Loi sur l’hébergement touristique », souligne l’attachée de presse, Marikym Gaudrault, dans une réponse écrite transmise samedi soir.
« Depuis des années, la Ville tire la sonnette d’alarme afin d’obtenir de Revenu Québec les ressources nécessaires pour agir contre les contrevenants. Avec l’arrivée d’une nouvelle réglementation du gouvernement du Québec le 25 mars dernier, nous réitérons l’urgence d’aller encore plus loin pour contrôler les pratiques d’hébergement touristique illégales. »
La Corporation des propriétaires fonciers du Québec (CORPIQ) a également réclamé par le passé une application plus stricte de la loi régissant la location touristique à court terme. Selon un sondage réalisé l’an dernier auprès de 1.200 de ses membres, 4,78% ont déclaré s’être retrouvés dans des situations où des locataires, sans l’autorisation du propriétaire, avaient illégalement sous-loué un logement sur un Airbnb.
De leur côté, les représentants d’Airbnb n’ont pas répondu à la demande d’entretien avec La presse.
Données du ministère du Revenu sur l’application de la Loi sur l’hébergement touristiquedepuis le 1euh Avril 2022 :
- Contrôles : 2342
- Contrôles non conformes : 1261
- Constats d’infraction signifiés : 1481
- Condamnations : 1205
- Montant des amendes : 4.9 million
Nombre d’inscriptions à Montréal selon le site Inside Airbnb : 14 000
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