Des milliers de manifestants de gauche ont défilé en France samedi 7 septembre contre “le coup de force” par Emmanuel Macron. Avec quelque 150 mobilisations prévues dans tout le pays, la gauche, La France insoumise (LFI) en tête, a choisi la rue comme échauffement avant un automne politique qui s’annonce chaud.
La cheffe de file des députés « insoumis », Mathilde Panot, a revendiqué 160 000 manifestants à Paris et 300 000 en France. La préfecture n’a pas encore communiqué ses chiffres.
L’initiative, lancée fin août par deux syndicats étudiants et lycéens puis reprise par les « insoumis », s’inscrit dans une stratégie de contestation plus large des troupes de Jean-Luc Mélenchon, qui ont également déposé une procédure de destitution du président de la République à l’Assemblée nationale. Une initiative qui peine à faire des émules à gauche : comme les grandes centrales syndicales, le Parti socialiste (PS) n’a pas relayé l’appel à manifester samedi ; et seuls six élus écologistes et trois représentants des Outre-mer ont paraphé, outre les députés LFI, la proposition de destitution.
« Déni de démocratie », « Les Français n’ont pas voté pour ça », “que(et Macron) démissionner “ : dans les cortèges, les mêmes mots, souvent, pour dire l’indignation et la colère face à la nomination de Michel Barnier (Les Républicains, LR) au poste de Premier ministre – un poste que le chef de l’Etat a refusé à Lucie Castets, la candidate du Nouveau Front populaire (NFP), arrivée en tête des législatives anticipées de juillet.
« Une bataille de longue haleine »
A Paris, la manifestation est partie de la place de la Bastille vers 14h30 « La démocratie n’est pas seulement l’art d’accepter d’avoir gagné, c’est aussi l’humilité d’accepter d’avoir perdu. »a déclaré Jean-Luc Mélenchon, juché sur un camion dans le cortège, s’adressant à Emmanuel Macron. « Il n’y aura pas de pause, je vous appelle à une bataille de longue haleine »a déclaré le leader « rebelle » à la foule.
Le choix de Michel Barnier a renforcé la détermination des manifestants, même si la police n’anticipait qu’une participation limitée (entre 4.000 et 8.000 personnes à Paris). « On voit qu’un pacte est scellé entre la Macronie, la droite et l’extrême droite »s’est indignée la députée (Seine-Saint-Denis) Aurélie Trouvé devant la presse, alors que des cris résonnaient dans la foule « Macron démissionne ». Si Michel Barnier a assuré vendredi qu’il était prêt à travailler avec la gauche, « personne n’est dupe »a ajouté l’élu « rebelle ».
Michel Barnier a bénéficié, pour accéder à Matignon, de la bienveillance du Rassemblement national (RN), qui a décidé de lui donner sa chance. Le nouveau Premier ministre « semble répondre au moins au premier critère que nous avions demandé, c’est-à-dire quelqu’un qui soit respectueux des différentes forces politiques »a réagi Marine Le Pen, après l’annonce de l’Elysée. « C’est un homme qui n’a jamais été excessif dans sa façon de parler du Rassemblement national, qui n’a jamais ostracisé le RN, c’est un homme de discussion »a encore souligné le chef des députés d’extrême droite.
« Je pense que de toute façon, exprimer son vote ne servira à rien tant que Macron sera au pouvoir. »fustige Manon Bonijol, 21 ans, venue manifester à Paris. Place de la Bastille, Abel Couaillier, 20 ans, étudiant, a avoué avoir été “étourdi” par nomination de Michel Barnier : « Un vieil éléphant politique qui n’a rien à voir avec les aspirations affichées par les Français. » « Je veux croire que nous pouvons changer les choses et je continuerai à voter, c’est la seule façon dont nous pouvons faire changer les choses »Alexandra Germain, 44 ans, chef de projet, est beaucoup plus amère : « C’est une dictature qui s’installe. Cela fait un moment qu’on ne nous écoute plus dans la rue, maintenant on ne nous écoute plus dans les urnes. »
Les jeunes sont venus en grand nombre
Cindy Rondineau, photographe de 40 ans, et son compagnon Aubin Gouraud, agriculteur de 42 ans, ont le cœur à gauche mais ne sont pas habitués à manifester. Samedi matin, ils ont pourtant fait le trajet de Chaumes-en-Retz à Nantes – une trentaine de kilomètres – pour participer à la mobilisation. « Nous avons vraiment l’impression de ne pas être écoutés en tant qu’électeurs »ont-ils dit. Leur fille de 8 ans portait une pancarte « Macron, t’es foutu, les CE2 sont dans la rue » au milieu d’un cortège familial et bon enfant qui défilait derrière une banderole « Une seule solution : la destitution »La manifestation a rassemblé entre 2.500 personnes, selon la préfecture, et 8.000 personnes, selon les organisateurs.
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La participation a été moindre à Nice. Dans un département où le RN, LR et les listes d’union Eric Ciotti-RN se partagent les neuf circonscriptions, entre 900 et 1.000 personnes, selon les sources, ont défilé derrière la banderole. «Défendons notre démocratie».
A Marseille, la manifestation a rassemblé entre 3.500 personnes (selon la police) et 12.000 personnes (selon les organisateurs). « On a l’impression d’avoir été volés »“Nous avons été très nombreux à nous rendre dans les rues de Paris”, a déclaré Aurélie Malfant, 24 ans, étudiante. Comme elle, les jeunes sont venus nombreux aux cortèges. « Il semble qu’il n’y aura jamais de moyen de mettre la gauche au pouvoir »a regretté Louise, 30 ans, dans le cortège lyonnais. « On s’est beaucoup déplacé pendant les élections pour aller voter, pour être présent et avoir cet engagement citoyen et ça ne servait à rien. »