Des soldats ukrainiens exécutés après s’être rendus

EEn mars 2023, le monde découvre les derniers instants de Tymofiï Mykolaïovytch Chadoura. Ce soldat ukrainien capturé a crié une dernière fois « Gloire à l’Ukraine » avant d’être abattu. La vidéo de son exécution a suscité l’indignation, près d’un an après la découverte du massacre de Boutcha.

Malheureusement, il semble que cette pratique soit toujours d’actualité sur les lignes de front en Ukraine. Selon l’ONG Human Rights Watch, au moins une quinzaine de soldats ukrainiens capitulés ont été tués par les forces russes depuis décembre 2023. Une violation des conventions protégeant les combattants faits prisonniers et qui constituent des crimes de guerre.

Exécutions sommaires

« Human Rights Watch a enquêté sur trois cas d’exécutions sommaires apparentes d’au moins douze soldats ukrainiens en vérifiant et analysant des images de drones publiées sur les réseaux sociaux les 2 et 27 décembre ainsi que le 25 février 2024 », expliquent les ONG. Dans ces cas, les soldats ont démontré une intention claire de se rendre et, puisqu’ils ne participaient plus aux hostilités, ils étaient considérés comme hors de combat et ne pouvaient être pris pour cible en vertu du droit international humanitaire ou du droit de la guerre. » Un autre cas d’exécution sommaire montre deux soldats russes abattant trois soldats ukrainiens.

Dans la vidéo mise en ligne le 25 février sur X (anciennement Twitter) et prise depuis un drone, sept soldats ukrainiens sortent d’un abri souterrain, levant les armes, près du village d’Ivanivske, dans la région de Donetsk. Ils gisent au sol avant que plusieurs soldats russes ne leur tirent dessus à bout portant. Le 22 avril, Human Rights Watch a écrit une lettre au ministre russe de la Défense Sergueï Choïgou, lui demandant si l’ordre était donné aux forces russes de tuer au lieu de capturer les soldats ukrainiens qui se rendaient. La lettre est jusqu’à présent restée sans réponse.

“Ne faites pas de prisonniers, tirez sur tout le monde”

Toujours dans la région de Donetsk, une vidéo mise en ligne le 5 février montre un soldat donnant des ordres en russe : « Ne faites pas de prisonniers, tirez sur tout le monde. » Le rapport de Human Rights Watch n’est malheureusement pas un cas isolé, ni le premier. Un rapport de la Mission de surveillance des droits de l’homme des Nations Unies en Ukraine affirme qu’au moins quinze prisonniers de guerre ukrainiens ont été sommairement exécutés au cours de la première année de la guerre. De février à août 2023, l’ONU a dénombré six prisonniers tués. Un rapport final pour la période décembre 2023 à février 2024 avance le nombre de trente-deux soldats ukrainiens exécutés.

Le bureau du procureur général d’Ukraine a annoncé en avril dernier qu’il avait ouvert 27 enquêtes pénales sur l’exécution de 54 prisonniers de guerre ukrainiens. Des cas de torture et d’exécutions sommaires de prisonniers russes commis par des soldats ukrainiens ont également été constatés. « C’est un crime de guerre que de tuer, maltraiter ou torturer délibérément ces forces », rappelle l’ONG. L’ordre de tuer des prisonniers de guerre ou d’exécuter des soldats qui se rendent plutôt que de les capturer, appelé « aucun quartier donné », est strictement interdit par le droit international humanitaire. »

La Russie devrait donc enquêter et poursuivre en justice les auteurs de tels actes. Mais Human Rights Watch doute de la volonté de Moscou, soulignant les nombreuses violations du droit international humanitaire observées en Tchétchénie, en Géorgie, en Syrie et en Ukraine. « Bien que chacun de ces cas soit horrible, le plus accablant est peut-être la preuve dans au moins un cas que les forces russes ont explicitement ordonné que les soldats soient tués plutôt que de les laisser se rendre, approuvant ainsi les crimes de guerre », déplore Belkis Wille, directeur associé du Division Crises et conflits de Human Rights Watch.