Emmanuel Macron confirme son orientation à droite

On ne l’espérait plus… Cinquante et un jours après la démission de Gabriel Attal, la France a enfin un Premier ministre, le cinquième en sept ans pour Emmanuel Macron. Après avoir longuement “testé” en début de semaine l’ex-socialiste Bernard Cazeneuve et le LR Xavier Bertrand, pensé à Laurent Berger (ancien patron de la CFDT), Thierry Beaudet (président du Conseil économique, social et environnemental) et David Lisnard (maire de Cannes), le choix du chef de l’Etat s’est finalement porté sur le LR Michel Barnier. Une idée originale d’Alexis Kohler, le secrétaire général de la présidence de la République. Le trio s’est réuni mercredi après-midi et soir. Une dernière réunion a eu lieu jeudi matin avant la nomination officielle vers 13 heures

Immigration, insécurité…

A 73 ans, le Savoyard devient le plus vieux locataire de Matignon au V^et République. Il succède au benjamin (et très populaire). Homme d’expérience, il a été député et sénateur, président de département, ministre (Environnement, Affaires européennes, Affaires étrangères, Agriculture et Pêche), commissaire européen et négociateur du Brexit. Hasard du calendrier : alors que la période olympique touche à sa fin à Paris, il a aussi été le patron des Jeux d’hiver de 1992 à Albertville, aux côtés du skieur Jean-Claude Killy. Ce n’est évidemment pas ce passé sportif qui a poussé Emmanuel Macron à le nommer rue de Varenne, mais plutôt sa personnalité sobre et tempérée, son profond ancrage territorial et sa crédibilité européenne. Le président sait aussi qu’il ne détricotera pas tout son bilan.

Le chef de l’Etat a aussi – et surtout – obtenu du Rassemblement national l’engagement de ne pas censurer le futur exécutif, du moins pas dans l’immédiat. Le RN dit aussi attendre le discours de politique générale du Premier ministre devant le Parlement pour se prononcer. «Michel Barnier semble répondre au premier critère que nous avons formulé : pouvoir s’adresser au Rassemblement national de manière respectueuse», “Nous sommes très inquiets de la situation actuelle”, a déclaré Marine Le Pen. Laquelle réclame également l’instauration d’une représentation proportionnelle en vue des prochaines élections législatives. Elle exige aussi que le pouvoir d’achat, la lutte contre l’immigration et l’insécurité soient les priorités du gouvernement. Autant d’impératifs également mis en avant par la droite LR, qui attend du président qu’il laisse l’exécutif déterminer et conduire la politique de la Nation.

Pieds et poings liés ?

Le Premier ministre devra faire preuve d’apaisement. Mais ne se retrouvera-t-il pas pieds et poings liés avec le RN et Les Républicains ? Pour la gauche, cela ne fait aucun doute. Le Nouveau Front populaire, qui a déjà décidé de censurer Michel Barnier, n’a pas de mots assez durs pour critiquer le choix d’Emmanuel Macron. « Nous entrons dans une crise de régime », estime le socialiste Olivier Faure. «Le chef de l’État a volé les élections»dénonce LFI Jean-Luc Mélenchon, appelant les Français à descendre dans la rue samedi « pour le respect de la démocratie. »

Lors de sa (longue) passation de pouvoir avec Gabriel Attal jeudi soir, le nouveau Premier ministre, “en forme olympique”, a décrit le cours de sa politique. Il a déclaré « Déterminée à être utile aux Français, à répondre à la colère, à la souffrance, au sentiment d’abandon et d’injustice. L’école restera ma priorité, tout comme la sécurité, le contrôle de l’immigration, le travail et le niveau de vie des Français. » Il y aura des changements et des ruptures, promet-il, « Du respect et beaucoup d’écoute ». Il lui appartient désormais de s’atteler à la constitution de son équipe gouvernementale, qui sera technique et de coalition (droite et bloc central). Un chantier qui lui prendra du temps. Mais pas cinquante jours. Le budget 2025 est une urgence vitale.