Emmanuel Macron rattrapé par la crise

Emmanuel Macron à l'aéroport Tarbes-Lourdes Pyrénées, le 7 mai 2024.

Comme il est loin ce jour de 1988 où le leader kanak Jean-Marie Tjibaou a aimablement chassé le ministre de l’Outre-mer, Louis Le Pensec, de son bureau de la rue Oudinot, à Paris, pour discuter face à face avec un maire calédonien anti-indépendantiste le choix du terrain sur lequel serait implanté le futur centre culturel kanak. « Nous aimerions en discuter entre nous »il s’est excusé auprès du ministre.

En ce printemps 2024, une telle scène semble impensable. La Nouvelle-Calédonie est aujourd’hui en proie à une explosion de violence comme elle n’en a pas connu depuis le début des années 1980. Quatre personnes, dont un policier, ont déjà perdu la vie lors des émeutes urbaines.

Face à une situation jugée « insurrectionnel » Par le Haut-Commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie, Louis Le Franc, l’état d’urgence, qui permet notamment de restreindre les libertés de circulation et de réunion, a été décrété mercredi 15 mai, tandis que quatre escadrons de gendarmerie mobile et des renforts de les unités d’intervention de la police nationale (RAID) et de la gendarmerie (GIGN) ont été dépêchées sur l’archipel, rejoignant les 1 800 policiers déjà déployés.

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Des militaires ont été dépêchés pour sécuriser le port et l’aéroport de Nouméa, un couvre-feu a été annoncé et le réseau social TikTok interdit. « Notre priorité absolue est le retour à l’ordre et au calme », a déclaré le chef du gouvernement, Gabriel Attal, mercredi soir, à l’ouverture d’une réunion interministérielle de crise place Beauvau ; il était entouré du locataire des lieux, Gérald Darmanin, du garde des Sceaux, Eric Dupond-Moretti, et du ministre des Armées, Sébastien Lecornu.

« Toute violence est intolérable et fera l’objet d’une réponse implacable pour assurer le retour de l’ordre républicain », avait promis l’Elysée en début d’après-midi, alors que le président de la République, qui a renoncé à deux déplacements en Normandie en raison de la révolte indépendantiste, venait de tenir une première défense et sécurité nationale consacrée à la situation sur l’île. Un deuxième conseil de défense est prévu jeudi matin, à l’issue duquel Emmanuel Macron a proposé aux élus calédoniens un « échange par visioconférence ».

Le gouvernement fait pression sur les indépendantistes

La crise qui a éclaté il y a trois jours à 17 000 km de Paris a pour origine une réforme du corps électoral local contestée par les indépendantistes kanak, qui craignent d’être définitivement mis en minorité. Le projet de loi constitutionnelle prévoit d’ouvrir le vote aux prochaines élections provinciales à tous les citoyens résidant en Nouvelle-Calédonie depuis dix ans (soit 25 000 électeurs supplémentaires). Il a été adopté par les députés dans la nuit de mardi à mercredi, comme il l’avait été au Sénat. Le FLNKS (Front de Libération Nationale Kanak et Socialiste) souhaite son retrait, « afin de préserver les conditions d’obtention d’un accord politique global entre les responsables calédoniens et l’État français ».

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