En 1968, Pierre Cardin voulait habiller l’homme qui allait sur la lune, en 2024 la maison dessinait les combinaisons d’entraînement des astronautes européens

Avec cette collaboration, la maison française se tourne une nouvelle fois vers l’avenir, près de soixante ans après la collection Cosmocorps lancée en 1968 par son fondateur Pierre Cardin.

La rentrée a été chargée pour la maison Pierre Cardin, qui dévoile une collaboration avec l’Agence spatiale européenne, alors que sa collection femme printemps-été 2025 défile à la Fashion Week de Paris le 30 septembre.

Le 9 septembre dans son atelier parisien, Rodrigo Basilicati-Cardin, PDG de la maison, a dévoilé le prototype d’une tenue destinée aux astronautes européens, en présence de Matthias Maurer qui dirige la mission d’entraînement lunaire dont le centre Luna, basé à Cologne, Allemagne.

Il s’agit d’une combinaison intérieure souple et d’une combinaison extérieure, recouvrant la combinaison spatiale, utilisées dans le bâtiment de simulation de la surface lunaire du centre Luna. “Cette collaboration est née spontanément avec l’astronaute allemand Mathias Maurer et les personnes dédiées au projet Luna, le premier centre d’entraînement lunaire au monde dont Mathias Maurer est à la tête” » dit Rodrigo Basilicati-Cardin.

Ce projet est un défi pour la maison de couture qui doit répondre au besoin de l’Agence spatiale européenne de disposer de tenues les plus réalistes possibles, alliant savoir-faire design et exigences techniques. Ces combinaisons permettront en effet de simuler des opérations et des procédures liées aux futures sorties sur le sol lunaire dans des conditions proches de la réalité comme le souligne PDG de la maison Cardin “A l’intérieur du bâtiment, le sol recrée le sol lunaire avec sa poussière pour aider les futurs astronautes à travailler sur cette surface.”

Au-delà du design, cette collaboration se traduit pour la maison par le développement de textiles innovants capables de résister aux conditions extrêmes de la Lune. Cette combinaison d’entraînement devrait offrir un confort optimal et une mobilité accrue. En effet, “Les textiles spatiaux sont rigides” a expliqué, sur France Inter, Matthias Maurer “çIl faut que ce soit confortable, mais si c’est élégant, c’est encore mieux (…) Je dois travailler sur la Lune plus tard, donc si ce n’est pas confortable, je ne suis pas efficace.” Un défi que Rodrigo Basilicati-Cardin a clairement perçu ” on sait habiller un corps, ils ont l’habitude de travailler avec des ingénieurs plutôt techniques. C’est une combinaison pour s’entraîner avec presque tous les problèmes qu’on peut avoir sur la Lune… avec pression, la combinaison devient rigide. Nous avons trouvé des matières techniques pour faire respirer un peu plus le corps, du synthétique recyclé.

Des recherches qui donneront naissance à des créations pour le futur prêt-à-porter. “Depuis cette aventure post Pierre Cardin, j’ai toujours recherché les tissus de structure. Je l’ai déjà utilisé au défilé du Bourget et au défilé de Venise. L’idée est d’utiliser l’épaisseur. Demain, il sera possible d’insérer des technologies pour ajuster, par exemple, la température corporelle pour un plus grand confort personnel. J’étudie ça ! On imagine déjà que le défilé de mars 2025 s’inspirera de l’univers spatial.

En développant des textiles innovants et résistants aux conditions extrêmes aussi bien sur Terre que dans l’espace, la maison Pierre Cardin s’engage dans une démarche où le vêtement ne se contente plus de s’habiller mais devient un allié protecteur et respectueux de l’environnement. environnement.

Si cette collaboration est une première dans l’histoire des maisons de couture, elle est une suite logique pour la maison Pierre Cardin, qui s’est toujours projetée vers l’avenir. Elle fait partie de l’univers visionnaire du fondateur de la maison, qui s’inspire depuis les années 1960 de la conquête de l’espace pour ses créations. Comme l’explique Jean-Pascal Hesse dans son livre Pierre Cardin. Mode. Mythe. Modernité “trTrès vite, il sent l’évolution de la société et voit que le monde va basculer. C’est là qu’il a commencé à se démarquer des autres, à faire cette mode unisexe, futuriste, très géométrique. De son côté, Rodrigo Basilicati-Cardin précise “Je pense que c’était après les premiers vols d’astronautes. Quand Youri Gagarine a été le premier homme à aller dans l’espace, cela l’a inspiré. Il a commencé à rêver de ça, de faire des recherches sur les tissus.

La collection Cosmocorps printemps-été 1968 proposait entre autres des mini-jupes, des vêtements unisexes et surtout une pièce phare, la combinaison, le tout aux reflets métalliques futuristes, aux imprimés en damier et aux chapeaux. “Le vêtement que je préfère est celui que j’invente pour une vie qui n’existe pas encore, le monde de demain” Pierre Cardin s’est alors expliqué.

“Il a pensé au Cosmocorps bien en avance, c’était unisexe avec des combinaisons, de la géométrie, de l’architecture, des zips. Les combinaisons de sport d’aujourd’hui pour la plongée, le parachutisme et la moto sont des pièces similaires aux combinaisons spatiales. remarques Rodrigo Basilicati-Cardin ajoute que même si cette collection a été bien accueillie parce qu’innovante, elle ne s’est pas bien vendue.

Très marqué par la formidable aventure de la conquête de la Lune, Pierre Cardin, “qui aimait le risque“, n’a pas hésité au début des années 1970 à enfiler la combinaison spatiale de l’astronaute Buzz Aldrin exposée à Houston. lors d’une visite avec une délégation d’hommes politiques. “Il avait certainement prémédité la chose car il était venu avec un petit appareil photo pour immortaliser ce moment. Lors de la visite, il est revenu sur ses pas, a enfilé le costume et s’est fait photographier. Il était curieux de savoir ce que c’était à l’intérieur de lui. “.

Une collection qui a marqué les esprits puisqu’en janvier 2022 Rodrigo Basilicati-Cardin présentait à son tour la ligne Cosmocorps, cette fois version 3022 au Musée de l’Air et de l’Espace du Bourget au pied d’une fusée Ariane 5. Lors de cette exposition, des images d’un jeune Pierre Cardin et ses créations des années 60 et 70 sont projetés sur les écrans géants. Dans l’une des vidéos, on peut entendre le designer dire “La mode doit être de demain et non s’inspirer d’hier. Je conçois des modèles pour les villes de demain, du futur. C’est-à-dire non seulement celles d’aujourd’hui mais celles qui se construiront dans quelques années”.

Lors de ce défilé hommage, Rodrigo Basilicati-Cardin avait indiqué “on a voulu le faire sur le thème de l’espace pour évoquer les années 60 quand Pierre Cardin voulait habiller l’homme qui monte à bord des vaisseaux spatiaux… Il a été le premier, avec André Courrèges à oser, à faire ça, critiqué par tout le monde à l’époque. temps”.