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entre « résignation » et « colère », le cortège a défilé en ordre dispersé à Paris

Dans la capitale, entre 18 000 et 50 000 manifestants ont défilé entre la République et la Nation. Avec des slogans disparates, les organisations syndicales et les partis de gauche n’ont pas réussi à se mobiliser autant qu’en 2023.

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“Je trouve que c’est devenu très compliqué de mobiliser les gens”, regrette Farida, 66 ans, membre de la CGT de Seine-Saint-Denis. Sous un ciel gris, parsemé de quelques gouttes de pluie, le cortège parisien de la manifestation du 1er-Mai n’a pas fait le plein cette année de la place de la République à la place de la Nation. Entre 18 000, selon la préfecture de police, et 50 000 manifestants, selon la CGT, ont défilé mercredi dans la capitale, soit environ dix fois moins qu’en 2023, lorsque la fête du Travail s’était transformée en mobilisation contre la réforme du travail. retraites. « Nous avons conquis beaucoup de militants avec la mobilisation contre les retraites, mais nous devons reconnaître que nous n’avons pas gagné » constate Val, un jeune militant du syndicat Solidaires.

Pour l’édition 2024, les syndicats ne se sont pas réunis autour d’un appel commun. Les délégations se sont donc retrouvées autour de slogans épars : contre les politiques d’austérité du gouvernement de Gabriel Attal, pour la paix au Moyen-Orient, ou encore, à quelques semaines des élections européennes, pour une Europe “plus protecteur”. Entre les ballons des différentes organisations syndicales et les chars des partis politiques de gauche, on retrouve pêle-mêle quelques “gilets jaunes”, des drapeaux palestiniens, mais aussi des drapeaux kanak, des revendications contre l’organisation des Jeux olympiques de Paris ou voire pour la libération par la Turquie d’Abdullah Ocalan, le leader historique des Kurdes du PKK.

« Il est temps d’agir de manière générale » Et “pour sensibiliser”, » a déclaré le leader de La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon, au début de la manifestation. Mais dans le cortège, de nombreuses voix se laissent gagner par le pessimisme. « Nous sommes dans une manifestation de gens convaincus, mais ça ne rassemble pas au-delà de ça. Il y a une colère qui s’additionne, mais qui ne forme pas une grande mobilisation”note Maxime, 25 ans, surveillant dans un collège. “On ressent une certaine résignation. L’année dernière, le bilan de la réforme des retraites a été un peu une douche froide. Et il est plus facile de se mobiliser sur un slogan concret que sur toute une série de revendications diverses”» ajoute un trentenaire un peu plus loin.

« De nombreux travailleurs sont battus »

Plusieurs mentionnent également “répression policière” comme facteur de démobilisation. « Je pense qu’il y a une certaine résignation, car à chaque fois, soit on affronte les CRS dans la rue, soit on est confronté au mépris du gouvernement au Parlement. Notre système politique est à bout de souffle. haleine”, juge Maëva. Victor, solidaire de 27 ans, raconte avoir déserté les cortèges pendant plusieurs années après avoir été traumatisé par le lancement d’une grenade de désencerclement tout près de lui lors d’une mobilisation des “gilets jaunes”. “J’avais très peur, mais je reviens aujourd’hui en me disant que le 1er mai est globalement moins violent”il confie.

« Les personnes concernées par les dernières réformes, que ce soit la loi sur l’immigration ou le projet RSA, c’est compliqué de les mobiliser »estime Anna, 25 ans. « En ce moment, il y a beaucoup de travailleurs qui subissent des coups et qui ne se sentent pas capables de riposter »explique Eric, militant Lutte ouvrière de Seine-Saint-Denis. « Les gens n’ont plus les moyens de faire grève. La fonction publique est de plus en plus fragilisée et, dans le privé, il est impossible de s’exprimer »estime Julie, 42 ans, qui dit manifester pour la deuxième fois de sa vie.

«Je sens que les gens sont partagés entre la résignation et la colère.»

Julie, manifestante

sur franceinfo

Sur les trottoirs parisiens, au milieu de slogans hostiles au gouvernement, nombreux sont ceux qui témoignent de cette précarité, dans le contexte de forte inflation qui a marqué ces deux dernières années. « Nous avons du mal à payer le loyer, les factures d’électricité, les courses alimentaires… Et pourtant, je n’ai pas d’enfants »témoigne Maxime, le surveillant du collège. « J’ai reçu cette semaine une lettre de la CAF écrite en majuscules réclamant 800 euros de trop-payé. C’est violent. Je suis dans le secteur associatif et je reçois 1 300 euros par mois”renchérit Sabine, 42 ans, qui dénonce “la chasse aux précaires” dirigé par le gouvernement.

Emmanuel Macron est l’une des principales cibles de la colère des manifestants. La loi sur l’immigration et la réforme des retraites ont laissé des traces. Le futur projet de réforme de l’assurance chômage suscite également de nombreuses réactions hostiles. « Les comptes de l’assurance chômage sont au vert, nous avons déjà reçu cinq réformes en sept ans de mandat d’Emmanuel Macron »a notamment lancé la secrétaire générale de la CGT, Sophie Binet. “Il est nécessaire que (Le chef de l’Etat) arrêtez de prendre l’argent de nos cotisations comme tiroir-caisse.

“Ils essaient d’économiser de l’argent sur le dos des chômeurs”dénonce également Val, du syndicat Solidaires. « Les chômeurs ont intérêt à chercher du travail, car ils seront de plus en plus contrôlés »s’inquiète Farida, bientôt à la retraite de la fonction publique. « Il y a un peu cette obsession du chômage à 5%, pour augmenter la population active, mais le gouvernement abandonne complètement la question de la dignité au travail et de la productivité »estime Jacques, un manifestant de 27 ans.

“J’ai peur que l’extrême droite finisse par gagner”

En attendant de savoir si ce nouveau projet gouvernemental sera de nature à remobiliser les forces sociales, les manifestants s’inquiètent aussi du climat politique ambiant. “Nous restons assez combatifs, mais je crains que ce soit l’extrême droite qui finisse par gagner, car je la trouve de plus en plus présente dans les médias, dans la société, dans les projets politiques… Mais il faut garder espoir”confie Sanaa, 27 ans. « Le climat est compliqué, entre divisions à gauche et montée de l’extrême droite. Il faut réussir à impliquer les jeunes et à les faire voter”recommande Enzo, 29 ans, qui vient de rejoindre le mouvement Écologistes-EELV.

Charles Silvain, militant des Jeunes Socialistes et candidat sur la liste PS-Place publique de Raphaël Glucksmann, tente de parler« L’Europe sociale » et de se mobiliser en vue des élections européennes du 9 juin : « Il faut inciter à voter pour renforcer les listes de gauche au Parlement (Européen). Ensuite, passé ces délais, il faudra penser à rediscuter de l’union de la gauche.” Une discussion mal engagée pour l’instant, à en juger par le sort réservé à Raphaël Glucksmann, empêché de rejoindre le cortège à Saint-Etienne par des militants qui l’ont insulté et bombardé de peinture.

Celine

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