Jeudi midi, Caroline Ethier, une résidente de Lebel-sur-Quévillon, en Jamésie, a remarqué qu’il y avait un peu de fumée. Vers 18 heures, elle s’enfuit en catastrophe au son des sirènes, avec son conjoint, ses enfants, ses chats et sa valise. A 38 semaines de grossesse, la mère de famille espère réussir à trouver refuge avant d’accoucher.
Les quelque 2 100 habitants de cette petite municipalité, située à 650 kilomètres au nord de Montréal, ont dû être évacués en catastrophe vendredi. La raison : un feu de forêt provoqué par la foudre, au nord-est de la commune. Elle a commencé en milieu de journée et « s’est développée très rapidement », explique Mélanie Morin, porte-parole de la Société de protection des forêts contre les incendies (SOPFEU).
En début de soirée, la Ville a émis une alerte d’évacuation obligatoire pour tous les habitants. Vers minuit, la ville avait été complètement vidée, à l’exception du personnel dédié aux mesures d’urgence, a expliqué au téléphone le maire Guy Lafrenière. « Même pour le centre de santé, les gens ont été évacués en ambulance et en avion », a-t-il dit.
C’est maintenant la troisième municipalité au Québec à être évacuée – en tout ou en partie – en raison d’incendies de forêt non maîtrisés.
« Parfois, il semblait que mon cœur allait me lâcher, témoigne Caroline Ethier. Là, je frissonne, car on dirait que ça tombe. »

PHOTO TIRÉE DE LA PAGE FACEBOOK DU DÉPUTÉ D’ABITIBI–BAIE-JAMES–NUNAVIK–EEYOU
La fumée causée par l’incendie a été ressentie vendredi à Lebel-sur-Quévillon.
Nous l’avons jointe au téléphone sur la route, près de Senneterre, en Abitibi-Témiscamingue. La famille espérait se rendre dans Lanaudière dans la nuit de vendredi à samedi, où elle pourrait être hébergée chez des proches. « Comme c’est pour plusieurs jours, j’ai dû me rapprocher d’un hôpital », explique la mère de famille de 27 ans.
Elle n’aurait jamais imaginé être évacuée comme ça, sur le point d’accoucher.
Je suis extrêmement anxieux. Est-ce que je vais rentrer chez moi ? Est-ce que tout cela va déclencher le travail trop rapidement ? Et quand nous reviendrons, comment retrouverons-nous le village ?
Caroline Ethier, résidente de Lebel-sur-Quévillon
Ils sont partis avec le strict minimum, dit-elle. Enfants, animaux domestiques et vêtements à changer. Le tout au son des sirènes et poussé par la police. « Le ciel était orange vif, il y avait du vent, c’était surréaliste. Comme quelque chose qu’on se dit : ça n’arrive que dans les films. Mais non. »
De plus en plus d’incendies au Québec
L’incendie qui fait rage au nord-est de Lebel-sur-Quévillon est l’un des 136 enregistrés tard vendredi soir dans la province. Un nombre qui n’a cessé d’augmenter tout au long de la journée. La majorité de ces incendies ne sont pas maîtrisés.
À Lebel-sur-Quévillon, un changement de direction du vent pourrait permettre au feu de contourner le lac et d’atteindre la municipalité, a expliqué Mme.moi Morin, de la SOPFEU.
L’usine de pâte Nordic Kraft à l’est de la ville pourrait être la première sur le chemin de l’incendie. Dans la soirée, les pompiers sont intervenus pour protéger cette infrastructure. Ce samedi matin, la SOPFEU prévoit construire un pare-feu avec de la machinerie lourde pour protéger la ville. « Si les conditions nous le permettent, nous travaillerons également avec des pétroliers tôt [samedi] matin, dit M.moi Vendredi matin.
« Je suis de tout coeur avec la population de Lebel-sur-Quévillon, celle de ma ville natale, qui est complètement évacuée par les incendies qui approchent! », a réagi sur Facebook Sylvie Bérubé, députée du Bloc Québécois d’Abitibi–Baie-James–Nunavik–Eeyou.
Le premier ministre du Québec, François Legault, a également demandé aux Quévillonais d’évacuer leurs maisons. « Merci pour votre collaboration », a-t-il écrit sur Facebook.
D’autres incendies majeurs en cours
L’un des plus grands incendies de la province se situe aux portes de la ville de Chapais, dans le Nord-du-Québec, et couvre près de 1 400 hectares, soit 14 km2. Une partie de la ville a été évacuée mercredi. Les habitants n’ont pas encore pu regagner leur domicile.
Un brasier encore plus important fait rage à une cinquantaine de kilomètres au nord de Dolbeau-Mistassini, au Lac-Saint-Jean, couvrant près de 2 000 hectares (20 km2), mais ne constitue pas une menace pour la ville.
Tout le personnel de la SOPFEU a été rapatrié à Québec, où il combat 20 feux de forêt, sur les 136 en cours : 400 pompiers sont à l’œuvre. Des centaines de pompiers des États-Unis, du Mexique, d’Afrique du Sud et du Portugal ont été appelés à l’aide.
«C’est une période effrayante pour de nombreuses personnes d’un océan à l’autre», a déclaré vendredi le premier ministre Justin Trudeau.
Au total, plus de 3,1 millions d’hectares ont déjà brûlé en 2023 au Canada, soit huit fois plus que la moyenne des 30 dernières années. Et il y a actuellement 333 feux actifs, dont 192 non maîtrisés. Près de la moitié de ces feux brûlent au Québec.
Avec l’Agence France Presse
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