France : les médecins étrangers dans les hôpitaux publics attendent toujours le décret censé régulariser leur situation

Alors que les négociations pour la formation d’un gouvernement ont débuté en France, les dossiers brûlants s’accumulent sur les bureaux des ministères. La situation de l’hôpital public est particulièrement préoccupante.

Début septembre, les hôpitaux publics ont lancé des alertes sur leur situation financière : selon la Fédération hospitalière de France leur déficit continue de s’aggraver et devrait dépasser les 2 milliards d’euros en 2024. Dans le même temps, le manque de personnel de santé continue de provoquer des fermetures de litsSelon les dernières estimations, 15 000 postes de praticiens hospitaliers sont toujours vacants et autant d’infirmières. Deux chiffres apparemment sans rapport, mais qui pourraient expliquer l’incertitude dans laquelle se trouvent les médecins étrangers.

Dans les hôpitaux, près d’un médecin sur trois a été formé hors de France et la moitié d’entre eux dans un pays hors Union européenne (UE) : ​​dans le jargon, on les appelle « Padue », pour les praticiens diplômés hors Union européenne. Dans de nombreux hôpitaux, ils sont devenus indispensables. Dans mon service d’oncologie, nous sommes trois pour tout le service où je travaille. “, explique Zaïneb*, radiothérapeute et diplômée de la Faculté de médecine de Casablanca au Maroc. J’ai mes propres patients, j’encadre même un stagiaire. » Cependant, les Padhue ne sont pas reconnus comme médecins à part entière.

Une compétition qui ne dit pas son nom

Pour ce faire, ils doivent passer un « examen de validation des compétences “, censé garantir la qualité de leur formation. Un examen mal nommé puisqu’en réalité, il s’agit d’un concours avec un nombre limité de candidats admis à chaque fois. Chaque année, des médecins en poste qui exercent parfois depuis des années en France échouent.” J’ai eu 13,5 à mon examen l’année dernière. La note limite pour l’oncologie était de 13,95, donc je n’ai pas été admis à cause d’une virgule. “, précise Zaïneb. Dans certaines spécialités, le recrutement est encore plus sévère. L’année dernière, ils ont annoncé 37 postes en ophtalmologie et ils n’ont retenu que 17 candidats. Je connais des gens qui ont eu 15 sur 20 et qui n’ont pas réussi le concours. Des médecins qui exercent depuis plusieurs années, au service de la population et à qui on refuse le droit d’appartenir au corps médical français alors qu’ils ont eu une excellente note, je ne comprends pas. »

Sous la pression des hôpitaux, le gouvernement d’Elisabeth Borne avait promis de ne pas laisser les Padhue ayant échoué à l’examen sans solution. la loi a été votée fin 2023 prolonger leur permis de travail pour 13 mois renouvelables. Sauf que le décret d’application n’a jamais été publié. Nous sommes dans une impasse avec un certain nombre de médecins qui ont quitté leur poste, ce qui entraîne des fermetures de consultations et des fermetures de lits. Certains sont même retournés dans leur pays d’origine.prévient Christophe Prudhomme, porte-parole des médecins urgentistes en France et responsable du syndicat CGT santé. Un collègue est rentré au Rwanda car il n’a pas été autorisé à rester en France alors qu’il avait été responsable d’une unité de réanimation en Auvergne pendant toute la période du Covid-19. C’est toujours un problème ! »

Les médecins sont bien moins payés que leurs collègues français

L’explication se trouve peut-être dans les finances publiques. Si tous les Padhue faisaient reconnaître leurs diplômes, il faudrait les payer comme les médecins français. Or aujourd’hui, un Padhue à son arrivée en France est payé 1 700 euros brut, soit bien moins qu’un médecin français et même moins qu’un interne. Même lorsqu’ils bénéficient d’un droit d’exercice temporaire, ils restent largement sous-payés : Zaïneb gagne cinq fois moins que ses collègues français.

Et cela reste un statut précaire. Que deviendrons-nous dans deux ans ?elle s’inquiète. L’idée n’est pas de créer un vide et de dépouiller les pays qui forment ces médecins qui viennent ensuite exercer en Europe. “, souligne Christophe Prudhomme. ” “Mais ceux qui sont là et veulent rester, ils travaillent ici, ils restent ici”, tel est le slogan de la CGT. D’autant qu’ils sont des travailleurs indispensables au maintien à flot de l’hôpital public. “.

Le médecin urgentiste a une explication encore plus cynique pour expliquer la réticence de l’exécutif à régulariser la situation des médecins étrangers. Les Padhue fournissent leurs services dans de petits hôpitaux que le gouvernement veut fermer, il accuse. Ainsi, en chassant les Padhue, sans médecin pour les remplacer, cela contribue à accélérer la fermeture des services locaux et des hôpitaux. « Il va sans dire que la position du nouveau gouvernement sur cette question sensible est attendue avec impatience.

*A sa demande, son nom de famille a été omis.

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Elise

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