Le hashtag #Kafka compte déjà plus d’un milliard de clics sur le réseau social chinois. Les jeunes internautes vouent un véritable culte à l’écrivain austro-hongrois.
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Nous sommes le 3 juin 1924. Il y a 100 ans jour pour jour, Franz Kafka mourait à seulement 41 ans, après des années de lutte acharnée contre la tuberculose. Un siècle passé, sans doute serait-il assez surpris de découvrir aujourd’hui l’existence des réseaux sociaux, et encore plus surpris d’apprendre qu’ils sont devenus un phénomène viral, au point que le hashtag #Kafka enregistre déjà plus d’un milliard de clics. sur TikTok, et certains parlent désormais de « génération K ».
Les jeunes internautes vénèrent Kafka, lisant à haute voix dans des vidéos des extraits de ses romans, de ses nouvelles, de sa correspondance ou de son journal. Quel paradoxe que ces millions de jeunes, glissant de citation en citation kafkaïenne, au gré des algorithmes quand on sait que l’auteur de Procès, du Château et de la Métamorphose avait exprimé le souhait que tous ses écrits inachevés soient détruits, brûlés après sa mort sans jamais être lus…Un vœu que son cher ami Max Brod n’a pas eu le cœur de réaliser, sauvant son œuvre de sa soif d’autodafé mais aussi de la fureur nazie, Max Btige ayant sauté dans le dernier train pour pouvoir traverser la frontière tchèque avant l’arrivée de cette dernière, avec seulement des milliers de documents écrits de la main de Kafka, dont les manuscrits originaux de Procès et Château.
Ce qui fascine les jeunes, c’est autant la vie que l’œuvre de Kafka. Ssa vie d’abord, celle d’un Tanguy de la fin du XIXème siècle puisque Franz Kafka a vécu avec ses parents jusqu’à l’âge de 30 ans. Kafka qui a eu de nombreuses maîtresses et qui s’est fiancé deux fois avec la même femme, mais ne s’est jamais marié. Fan de polyamour, diraient aujourd’hui les TikTokers.
Sa passion la plus célèbre fut celle qu’il éprouva avec la traductrice Milena Jesenska, une femme mariée qu’il implorait dans une lettre de L‘aimer “éhonté”, “comme si la fin du monde était demain”. CONTREest-ce qu’il a écrit “Peut-être qu’on n’aime pas déraisonnablement parce qu’on pense qu’on a le temps ou qu’il faut compter avec le temps”. Un amour fou mais surtout épistolaire puisque malgré une correspondance intense, près de 150 lettres échangées, on raconte que Milena et Kafka ne se sont vus que deux fois !
C’est ainsi que Kafka a vécu sa vie, sans vraiment la vivre, ou à distance. Pour ne jamais s’éloigner de sa passion, de son roc, la littérature. Ne rien connaître des choses du monde, renoncer à la vie pour écrire sur la vie, ou plutôt sur son absurdité, sur les raisons qui poussent un homme qui se réveille transformé en une créature immonde à avoir surtout peur d’être en retard au travail, sur le sentiment de étrangeté aux autres et à soi que l’on ressent parfois au sein de sa propre famille.
Bref, à la réflexion, il n’est peut-être pas si étrange que le Kafka universel soit devenu viral sur les réseaux sociaux puisque, comme le confie New York Times Margarita Mouka, 25 ans, alias TikToker @verseaucat444 : « Notre génération est constamment en ligne et connectée, mais au fond, nous nous sentons toujours déconnectés. » Comme Kafka qui affirmait ne pas avoir «presque rien à voir» avec lui-même. Franz Kafka qui a connu de nombreuses métamorphoses tout au long de sa vie, tout en restant fermement attaché à son rocher…