LLe débat public connaît parfois des évolutions intrigantes. Diabolisée en France, la représentation proportionnelle ne semble plus rencontrer de nombreux opposants parmi les grands partis politiques. Il faut dire que les arguments contre sont souvent plus fantaisistes ou banals, alors qu’en Europe seuls la France et le Royaume-Uni utilisent encore le vote majoritaire.
Contrairement à une idée reçue, cela ne rend pas plus difficile la composition des majorités. L’homme politique néerlandais Arend Lijphart montre que cela conduit à une très légère augmentation du nombre de partis au Parlement. Combinée à un seuil de représentation en dessous duquel les partis n’ont pas d’élus, elle peut même en réduire le nombre. Il y a actuellement dix groupes à l’Assemblée, alors qu’il n’y en a que six au Bundestag, élus au scrutin proportionnel.
Le vote majoritaire à deux tours ne constitue pas non plus une garantie de stabilité. Il était en vigueur sous le IIIe République, mais n’a produit ni discipline majoritaire ni majorité structurée. Certes, le IVe La République pratiquait la représentation proportionnelle, mais les forces politiques qui la dominaient s’efforçaient d’en limiter les effets. Ce n’est donc pas seulement le mode de scrutin majoritaire, mais aussi une bipolarisation gauche-droite et une forte discipline de parti qui ont produit le fait majoritaire à partir de 1962.
Ce monde semble révolu aujourd’hui. Compte tenu de l’évolution de l’électorat, des majorités stables sont beaucoup moins probables avec le mode de vote actuel. Notre Assemblée actuelle en témoigne. Un système proportionnel, éventuellement accompagné d’une prime majoritaire accordant une prime de députés au parti arrivé en tête, y contribuerait sans doute bien plus sûrement.
Obstacles politiques
Face à la crise politique, il convient également de noter qu’elle favorise le soutien aux institutions et à la participation. L’abstention est ainsi en moyenne inférieure de 7,5 points, selon Lijphart, et même de 12 points inférieure chez les jeunes, selon un rapport de 2016 de l’Union interparlementaire, dans les pays qui la pratiquent.
Lors des élections législatives, il est également beaucoup plus difficile d’appliquer la parité avec le vote majoritaire. A l’inverse, les élections régionales, municipales ou européennes, toutes proportionnelles, lui obéissent strictement. Cela rapproche également les choix parlementaires de la position de l’électeur médian sur les grandes questions de politique publique. D’autres études, comme celles de politologues André Blais et Peter Loewen, corroborent l’idée selon laquelle les citoyens sont plus satisfaits de leur démocratie et que les élus sont plus réceptifs aux choix de l’électorat.
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