(Washington) Le député conservateur au cœur de la saga de l’ingérence étrangère du Canada a raconté son histoire au Capitole des États-Unis mardi devant des législateurs américains attentifs, déterminés à confronter les efforts de la Chine pour saper les limites de la démocratie occidentale.
Le message de Michael Chong : faisons-le ensemble.
« Le Canada doit travailler plus étroitement avec ses alliés démocratiques comme les États-Unis pour contrer les tentatives de Pékin d’interférer dans notre vie démocratique », a déclaré M. Chong aux membres de la Commission exécutive du Congrès sur la Chine.
L’ingérence étrangère constitue une menace sérieuse pour la sécurité nationale des deux pays, ce qui nécessite une approche unifiée entre alliés partageant les mêmes idées, a-t-il soutenu.
« Nous devons saisir toutes les opportunités disponibles pour renforcer ce partenariat afin de relever le défi de la montée de l’autoritarisme et de préserver nos libertés fondamentales, la démocratie et l’État de droit », a ajouté M. Chong.
L’appel a été bien accueilli à Washington, où tant les démocrates que les républicains décrivent désormais ouvertement la Chine comme un agresseur mondial inquiétant, avec une influence économique bien trop grande sur la vie américaine.
Une plus grande collaboration
Les membres du comité ont passé les 30 premières minutes de l’audience à prononcer des déclarations d’ouverture belliqueuses, dénonçant les tactiques répressives de la Chine, notamment l’intimidation, le harcèlement des dissidents et les assassinats.
« La stratégie (du Parti communiste chinois) consistant à tenter de réécrire les normes mondiales a réussi dans de trop nombreux cas », a déclaré Christopher Smith, coprésident du comité et représentant du New Jersey.
« Nous ne pouvons pas et ne permettrons pas au Parti communiste chinois de nous effrayer et de nous soumettre par le biais de ces tactiques », a-t-il poursuivi.
La première question de Christopher Smith à M. Chong était de savoir si les États-Unis et le Canada pourraient travailler plus étroitement ensemble qu’ils ne le font déjà.
Le Canada étudie actuellement l’idée de mettre en place un registre des agents étrangers pour mieux surveiller ceux qui opèrent sur son sol. Ottawa pourrait donc utiliser l’expertise des États-Unis, qui en disposent depuis près de 100 ans, a mentionné M. Chong.
Il a également suggéré que les deux pays comparent leurs notes sur la meilleure façon d’utiliser « la lumière du jour et la transparence » pour dénoncer publiquement les activités d’ingérence étrangère qui pourraient ne pas atteindre le niveau d’activités criminelles.
« Une façon de contrer cela est de rendre l’information publique, de dire aux membres du public, aux membres du Congrès, aux membres du Parlement, que c’est exactement ce qui se passe », a déclaré M. Chong.
Ce type d’informations « donnerait aux citoyens et aux élus les détails dont ils ont besoin pour se protéger », a-t-il soutenu.
Quant à la lutte contre la désinformation sur les réseaux sociaux, M. Chong a vanté le modèle déployé à Taïwan.
« Cela repose sur la résilience, sur le système éducatif, le système d’enseignement primaire et secondaire, et sur l’autonomisation des groupes de la société civile pour contrer cette désinformation », a-t-il soutenu. En fin de compte, nous devons trouver un équilibre entre deux choses concurrentes : l’une est de lutter contre cette désinformation, tout en défendant la liberté des médias et la liberté d’expression. »
Il a hésité lorsqu’on lui a demandé s’il obtenait le soutien nécessaire du gouvernement fédéral, qui est assiégé politiquement depuis des mois par les conservateurs, dans sa gestion du dossier.
« Les démocraties tardent souvent à réagir à la menace des États autoritaires, qui peuvent agir beaucoup plus rapidement », a observé M. Chong. Depuis le printemps, le gouvernement canadien s’est levé et m’a soutenu. »
Représailles
Le gouvernement fédéral a confirmé en mai un article de presse selon lequel des responsables du renseignement avaient détecté un complot d’intimidation chinois visant M. Chong et ses proches à Hong Kong en 2021. Ottawa a expulsé le diplomate chinois Zhao Wei après un tollé soutenu au Parlement.
En réponse, l’ambassade de Chine a expulsé un employé consulaire canadien à Shanghai et a publié une déclaration accusant le Canada de violer le droit international et d’agir sur la base d’un sentiment anti-chinois.
M. Chong aurait été pris pour cible après avoir parrainé une motion à la Chambre des communes qualifiant de « génocide » le traitement réservé par Pékin aux musulmans ouïghours en Chine. Cependant, il n’a jamais été informé de ces menaces, une erreur qu’il a qualifiée de « défaillance systématique de l’appareil gouvernemental ».
Même si c’était à peu près la seule rancune partisane décelable dans le témoignage de M. Chong, une grande partie de ce qu’il proposait pour remédier à la domination économique croissante de la Chine faisait écho à la doctrine conservatrice des deux pays. .
Il a proposé d’interdire le financement gouvernemental des entités chinoises engagées dans des projets sensibles de recherche et développement dans les domaines des télécommunications, de l’informatique quantique, de l’intelligence artificielle et des produits biopharmaceutiques.
Il a appelé à une réforme de la réglementation au Canada pour accélérer les projets de ressources naturelles dont le pays a besoin, tels que les terminaux et les pipelines d’exportation de gaz naturel liquéfié, ainsi que les mines et les installations de traitement des minéraux critiques.
Il a désigné le Canada comme le partenaire idéal des États-Unis pour fournir au monde ce qu’il appelle une « combustion plus propre » et comme une source alternative importante de matières premières utilisées dans les batteries des véhicules électriques.
La semaine prochaine, la juge Marie-Josée Hogue de la Cour d’appel du Québec entamera une enquête publique sur les allégations d’ingérence dans les affaires canadiennes de la Chine, de la Russie et d’autres États étrangers et acteurs non étatiques. Ce processus devrait prendre 16 mois.
Un rapport préliminaire est attendu fin février, suivi d’un rapport final en décembre 2024.
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