La loi n’interdit pas de manière absolue le recours à l’intelligence artificielle, mais cela pourrait constituer un délit si la justice estime que l’électeur a été induit en erreur.
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A moins de deux mois des élections européennes du 9 juin, les candidats poursuivent leurs invitations sur les scènes et leurs opérations de communication. Juliette de Causans, présidente du petit parti Europe Egalité Ecologie, a publié son affiche de campagne sur X, pour l’Ecologie au centre de la liste, vendredi 12 avril. Les internautes l’ont accusée d’avoir retouché sa photo grâce à l’intelligence artificielle (IA).
C’est avec plaisir que je vous annonce que @EEE_parti #EuropeEnsemble moi y compris, rejoignez la liste #Ecologieaucentre conduit par @JM_Governatori. La seule liste écologiste centriste comprenant un programme complet sur#IA. J’ai l’honneur d’être inclus dans un poste éligible. pic.twitter.com/QI6iUdoAxa
— 🇪🇺 Juliette de Causans (@JulietteCausans) 12 avril 2024
Juliette de Causans a pris la responsabilité de ces modifications auprès du journal Le Parisien. “Sur cette photo, il y a des choses qui ont été supprimées, mais rien n’a été ajouté, assure-t-elle. Il a été retouché sur le ventre, nous avons ajouté du maquillage, le grain de peau a été uniformisé. Mais après, les traits n’ont pas été modifiés en tant que tels, que ce soit sur le visage ou sur la poitrine par exemple.”
La candidate justifie son action par la volonté de porter “un message” sur l’essor des technologies et leur place dans “notre société”. Lors des élections législatives de 2023, Juliette de Causans avait déjà retouché la photo figurant sur son affiche de campagne. Si elle accepte pleinement la modification, aucune mention du recours à l’intelligence artificielle n’apparaît sur les affiches.
Aucune obligation de mentionner d’éventuelles retouches
Comme tous les éléments d’une campagne, les affiches officielles sont soumises à des règles détaillées dans le code électoral. Il est donc interdit de faire figurer le drapeau français ou les trois couleurs bleu, blanc et rouge juxtaposées, sauf si celles-ci figurent sur le logo du parti.
Les affiches ne peuvent être imprimées sur du papier blanc que si elles contiennent des caractères ou des illustrations en couleur. Le nom du candidat, du parti ou mouvement politique ainsi que le slogan de la campagne doivent apparaître sur l’affiche. La taille du support, 59,4 sur 84,1 cm, est également réglementée.
Mais aucune loi n’oblige les candidats à mentionner que l’IA a été utilisée pour modifier leur affiche de campagne. “Les mentions et le contenu des affiches ne sont pas contrôlés”assure à franceinfo Romain Rambaud, spécialiste du droit électoral. « Aucune disposition du code électoral ne prévoit l’affichage obligatoire d’informations sur les affiches », il ajoute. Selon la loi, les candidats peuvent donc librement retoucher leurs affiches, avec ou sans intelligence artificielle. “Il n’y a, à ma connaissance, aucune obligation d’indiquer des retouches par Photoshop ou l’utilisation de l’IA au sens strict”note le spécialiste.
Le candidat pourra être sanctionné s’il utilise l’IA pour désinformer
Dans Dans une décision rendue le 27 octobre 2023, le Conseil constitutionnel précise également l’utilisation de photos retouchées sur le matériel électoral : celles-ci sont considérées comme acceptables tant qu’elles ne sont pas susceptibles d’induire l’électeur en erreur. « Une révision excessive peut conduire à une représentation inexacte du candidat, qui pourrait être perçue comme trompeuse par l’électorat »détaille l’avocat Antoine Chéron, interrogé par franceinfo.
Le candidat pourra également être sanctionné s’il donne des informations erronées via l’IA. « Dans le cas où l’utilisation de l’IA est trompeuse, les fausses nouvelles constituent une infraction pénale », constate Romain Rambaud. L’article L97 du code électoral punit ainsi la diffusion de fausses informations d’une amende de 15 000 euros. “Il est toutefois peu probable que cela s’applique à de simples modifications concernant l’apparence physique d’un candidat, même si celles-ci étaient réalisées à l’aide de l’IA.” Prévient toutefois Antoine Chéron. Selon Romain Rambaud, il s’agit donc “très improbable” que Juliette de Causans soit traduite en justice.
Aucune obligation d’inclure votre visage
D’autres règles s’ajoutent à celles dictées par le code électoral. C’est le cas du port de l’uniforme militaire, interdit “à l’occasion de toute activité ou manifestation à caractère syndical ou politique”, selon le décret du 14 décembre 2007. Une règle apparemment oubliée par les Républicains, qui n’ont pas hésité à présenter le général Christophe Gomart, numéro trois de leur liste pour les européennes, en uniforme militaire sur les réseaux sociaux.
Il n’y a cependant aucune obligation d’afficher les visages des candidats sur une affiche, comme en témoignent ceux du Parti animaliste pour les élections européennes de 2019 ou les législatives de 2022.
La campagne des élections européennes débutera officiellement le 27 mai à minuit. C’est à partir de ce moment que les panneaux publicitaires seront installés devant les bureaux de vote et les affiches officielles de campagne des différentes listes seront donc affichées.