Vainqueur de l’Open d’Australie en dĂ©but d’annĂ©e et devenu numĂ©ro un mondial, Jannik Sinner n’a plus eu Ă dĂ©montrer ses prouesses tennistiques. En remportant l’US Open dimanche, l’Italien de 23 ans a cependant prouvĂ© Ă quel point il Ă©tait fort psychologiquement.
Les conditions de son succĂšs Ă©taient en effet loin d’ĂȘtre rĂ©unies puisque l’Agence internationale pour l’intĂ©gritĂ© du tennis (Itia) avait rĂ©vĂ©lĂ© cinq jours avant le dĂ©but du tournoi que Sinner avait Ă©tĂ© testĂ© positif Ă deux reprises Ă un anabolisant en mars, mais qu’il Ă©tait innocentĂ© en raison du taux extrĂȘmement faible de produit interdit (le clostebol) retrouvĂ© dans ses urines qui corroborait sa ligne de dĂ©fense, Ă savoir une contamination.
C’est donc avec beaucoup d’inquiĂ©tude que l’Italien s’est prĂ©sentĂ© Ă New York et avec beaucoup d’inquiĂ©tude qu’il a rĂ©pondu aux questions des mĂ©dias et du tribunal.
Son jeu a souffert tout au long de la compĂ©tition, n’arrivant jamais Ă jouer Ă son meilleur niveau, celui qui lui avait permis de s’imposer Ă Melbourne en janvier aprĂšs ĂȘtre revenu de deux sets en finale contre Daniil Medvedev.
Il a perdu le premier set de son premier match, puis a de nouveau eu du mal lors de son deuxiĂšme match, mais a progressivement pris de l’ampleur, battant une nouvelle fois Medvedev, cette fois en quart de finale, avant de dominer l’AmĂ©ricain Taylor Fritz en finale.
– “Sans trop d’attentes” –
« J’ai pris les choses un jour Ă la fois, sans trop d’attentes. J’ai essayĂ© de trouver mon jeu, mon rythme. Chaque jour, j’ai essayĂ© de reprendre confiance », dit-il.
Heureusement pour lui, Sinner aime jouer sous pression, non seulement parce qu’il « s’entraĂźne pour cela », mais aussi parce qu’avant de jouer au tennis, il skiait en compĂ©tition.
« En ski, on descend une pente pendant 90 secondes et si on fait une erreur, c’est fini », explique-t-il, soulignant qu’en comparaison, « au tennis, on peut jouer deux heures, faire beaucoup d’erreurs et quand mĂȘme gagner le match ». A condition d’avoir un mental solide.
Lui-mĂȘme a pris le temps de se consacrer au tennis.
NĂ© dans le Tyrol italien, il n’a abandonnĂ© les skis pour les raquettes qu’Ă l’adolescence. Cependant, il a reçu sa premiĂšre raquette de son pĂšre alors qu’il n’avait que trois ans.
C’est Ă l’Ăąge de treize ans qu’il descend sur la cĂŽte ligure pour rejoindre l’acadĂ©mie de Ricardo Piatti, entraĂźneur de tennis italien rĂ©putĂ© qui a notamment accompagnĂ© Novak Djokovic.
Le ski « Ă©tait dangereux. Une mauvaise chute peut ruiner une saison entiĂšre », avait-il notĂ© il y a quelques annĂ©es, soulignant qu’un des avantages du tennis Ă©tait de pouvoir y jouer « toute l’annĂ©e ».
Mais “le plus important, c’est qu’au tennis, on voit son adversaire. On sait si on est en avance au score, ou en retard, si on va devoir changer quelque chose ou pas”, a-t-il expliquĂ©.
– MontĂ©e express –
Voici donc le longiligne Italien (1,88 m et 76 kg), reconnaissable de loin avec ses cheveux roux cachés sous une casquette quand il joue, sur le circuit ATP depuis 2018.
En bon alpiniste, il ne lui a pas fallu longtemps pour gravir la hiérarchie mondiale.
En 2019, lors de sa premiĂšre saison presque complĂšte sur le circuit, il a grimpĂ© de plus de 450 places, jusqu’au top 80 (78e). En 2020, il a Ă©tĂ© le meilleur joueur de moins de vingt ans, en 2021, il est entrĂ© dans le Top 10, il a terminĂ© 2023 Ă la quatriĂšme place et en juin 2024, il est devenu le premier numĂ©ro 1 mondial italien.
Pour ce faire, il s’appuie sur une frappe puissante et prĂ©cise aussi bien en coup droit qu’en revers et une dĂ©fense trĂšs efficace.
“Le bruit de sa frappe de balle, c’est quelque chose, non ?”, apprĂ©cie l’entraĂźneur australien Darren Cahill, qui a rejoint son Ă©quipe Ă l’Ă©tĂ© 2022.
“Cela vient de son timing et de sa vitesse de main”, explique-t-il. “Beaucoup de grands champions ont un son de frappe caractĂ©ristique. Agassi, ça donnait l’impression d’ĂȘtre plus fort que tout le monde. Rafa (Nadal), c’est exactement la mĂȘme chose. (…) Jannik a ça, sans aucun doute.”
Entre son caractĂšre effacĂ© et son tennis robotique, il n’est pas le joueur le plus excitant Ă regarder jouer. Mais pour l’instant, il est le plus efficace.
En 2023, il avait cumulĂ© 64 victoires sur la saison, soit plus que tout autre joueur. Cette annĂ©e, il devance toujours tout le monde sur dur avec 35 victoires et six titres dont les deux Majeurs de dĂ©but et de fin de saison. Il est Ă jamais le premier Italien Ă avoir remportĂ© l’Open d’Australie et l’US Open.
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