Quand il s’agit de parler de Jean-François Sivadier, on se retrouve face à un paradoxe. L’homme est à la fois transparent en apparence et énigmatique. Lumineux et semblant préserver jalousement ses zones d’ombre et de secret. Sa présence, minérale, massive, habite l’espace banal où il a donné rendez-vous, tout en se dissolvant de manière aérienne et rêveuse. Il est l’un des plus grands metteurs en scène de théâtre et d’opéra français, l’un des plus célébrés, doublé d’un auteur, mais… Mais quoi ? Il s’échappe, y compris ses proches, qui témoignent de cette dimension insaisissable.
En attendant, le candidat réalise l’un des meilleurs shows de la rentrée, avec cette Portrait de famille, une histoire des Atridesà voir au Théâtre de la Commune (jusqu’au 29 septembre), à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis), puis en tournée dans toute la France jusqu’à la fin de la saison : quatre heures de plaisir chimiquement pur, qui retournent les spectateurs comme une crêpe entre le rire et l’effroi. Le spectacle, créé avec une classe d’élèves comédiens du Conservatoire national supérieur d’art dramatique, s’offre comme une quintessence de son art de metteur en scène-auteur, où les paradoxes dansent la sarabande, entre tragédie et comédie, théâtre savant et fête populaire, énergie fracassante et mélancolie.
À 61 ans, il semble avoir gagné encore plus de liberté. Elle ne lui manquait pourtant pas dans les spectacles montés avec la troupe dirigée par son alter ego Nicolas Bouchaud, de Le mariage de Figaro (2000) à Othello (2022), en passant par La vie de Galilée (2002) ou Le Roi Lear (2007), ainsi qu’à l’opéra, où il impose d’autres codes, tant avec La Traviata (2011) qu’avec Don Giovanni (2017) ou Carmen (2010).
« Espace de liberté »
Est-ce parce que le théâtre a été son compagnon de toujours, ou presque, qu’il peut le transformer en un vaste terrain de jeu où tout est possible, pour la plus grande joie des spectateurs ? « Je ne sais pas ce qui a tissé cette fibre artistique qui nous a contaminé, mon frère. (Pierre-Michel Sivadier, pianiste, compositeur, chanteur et auteur) et moiil se demande. Peut-être est-ce dû à un épisode un peu mythique de notre famille : avant notre naissance, nos parents ont parcouru l’Afrique centrale, de village en village, avec leur petite entreprise de cinéma ambulant.
Lorsque les deux frères Sivadier naissent, l’aventure est terminée, ce qui laisse sans doute des relents de nostalgie. Les parents tiennent un garage-station-service au Mans. D’aussi loin qu’il se souvienne, Jean-François Sivadier crée des marionnettes dans sa chambre et fonde un club de théâtre à l’école dès l’âge de 10 ans. Premier spectacle : une adaptation de Peau d’âneaccompagné d’imitations de Claude François. Cet éclectisme et ce goût pour la variété française seront toujours là, tout au long d’une carrière où le théâtre fut comme un ventre maternel qu’il ne quitta jamais.
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Quand il s’agit de parler de Jean-François Sivadier, on se retrouve face à un paradoxe. L’homme est à la fois transparent en apparence et énigmatique. Lumineux et semblant préserver jalousement ses zones d’ombre et de secret. Sa présence, minérale, massive, habite l’espace banal où il a donné rendez-vous, tout en se dissolvant de manière aérienne et rêveuse. Il est l’un des plus grands metteurs en scène de théâtre et d’opéra français, l’un des plus célébrés, doublé d’un auteur, mais… Mais quoi ? Il s’échappe, y compris ses proches, qui témoignent de cette dimension insaisissable.
En attendant, le candidat réalise l’un des meilleurs shows de la rentrée, avec cette Portrait de famille, une histoire des Atridesà voir au Théâtre de la Commune (jusqu’au 29 septembre), à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis), puis en tournée dans toute la France jusqu’à la fin de la saison : quatre heures de plaisir chimiquement pur, qui retournent les spectateurs comme une crêpe entre le rire et l’effroi. Le spectacle, créé avec une classe d’élèves comédiens du Conservatoire national supérieur d’art dramatique, s’offre comme une quintessence de son art de metteur en scène-auteur, où les paradoxes dansent la sarabande, entre tragédie et comédie, théâtre savant et fête populaire, énergie fracassante et mélancolie.
À 61 ans, il semble avoir gagné encore plus de liberté. Elle ne lui manquait pourtant pas dans les spectacles montés avec la troupe dirigée par son alter ego Nicolas Bouchaud, de Le mariage de Figaro (2000) à Othello (2022), en passant par La vie de Galilée (2002) ou Le Roi Lear (2007), ainsi qu’à l’opéra, où il impose d’autres codes, tant avec La Traviata (2011) qu’avec Don Giovanni (2017) ou Carmen (2010).
« Espace de liberté »
Est-ce parce que le théâtre a été son compagnon de toujours, ou presque, qu’il peut le transformer en un vaste terrain de jeu où tout est possible, pour la plus grande joie des spectateurs ? « Je ne sais pas ce qui a tissé cette fibre artistique qui nous a contaminé, mon frère. (Pierre-Michel Sivadier, pianiste, compositeur, chanteur et auteur) et moiil se demande. Peut-être est-ce dû à un épisode un peu mythique de notre famille : avant notre naissance, nos parents ont parcouru l’Afrique centrale, de village en village, avec leur petite entreprise de cinéma ambulant.
Lorsque les deux frères Sivadier naissent, l’aventure est terminée, ce qui laisse sans doute des relents de nostalgie. Les parents tiennent un garage-station-service au Mans. D’aussi loin qu’il se souvienne, Jean-François Sivadier crée des marionnettes dans sa chambre et fonde un club de théâtre à l’école dès l’âge de 10 ans. Premier spectacle : une adaptation de Peau d’âneaccompagné d’imitations de Claude François. Cet éclectisme et ce goût pour la variété française seront toujours là, tout au long d’une carrière où le théâtre fut comme un ventre maternel qu’il ne quitta jamais.
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